(Cannes) Le Festival de Cannes avait promis que l’Ukraine serait dans toutes les têtes « lors de son édition-anniversaire, qui se termine samedi. Tour d’horizon des quatre films présentés dans différentes sections.

 Pamfir

Présenté à la Quinzaine des réalisateurs, ce premier long métrage de Dmytro Sukholytkyv-Sobchuk dresse un tableau sans concession de la région du Tchernivtsi, à la frontière entre l’Ukraine et la Roumanie, une région pauvre et corrompue, mais aussi pétrie de traditions millénaires.

Pamfir gagne honnêtement sa vie dans le bâtiment en Roumanie, mais doit pour cela laisser sa femme et son fils adorés pendant des mois. Très affecté par ses absences, son fils commet un acte de vandalisme, que Pamfir doit réparer.

Pour y parvenir, il renoue avec la contrebande, qu’il avait laissé tomber des années plus tôt. Un engrenage tragique va se refermer sur lui et sa famille.

Le réalisateur a voulu aborder la question de l’émigration ukrainienne et du « gouffre qui sépare l’Ukraine et l’Union européenne ». Le réalisateur assure que depuis le début de la guerre, il n’a quitté l’Ukraine « que quelques jours pour achever la postproduction » du film, mais souhaite y retourner rapidement, pour « documenter » ce qui s’y passe.

 Butterfly Vision

Photo tirée du site web du Festival de Cannes

Butterfly Vision

À la lisière du documentaire, Butterfly Vision, premier long métrage de Maskym Nakonechni présenté en Sélection officielle, revient sur le sort des femmes soldats ukrainiennes capturées par les Russes.

Le film a été tourné dans la région du Donbass, qui a été, en 2014 — bien avant la guerre actuelle — un lieu d’affrontements entre le gouvernement ukrainien, des séparatistes prorusses et la Russie.

Il raconte l’histoire de Lilia, spécialiste en reconnaissance aérienne qui tente de surmonter le traumatisme de sa capture, et de son viol commis par des Russes. Un film ancré dans le réel, explique son réalisateur à l’AFP, qui raconte avoir couvert avec « des collègues réalisateurs » les évènements dans le Donbass en 2014.

Alors qu’il réalise un documentaire sur des femmes soldats, il se rend compte qu’elles redoutent une chose bien plus que la mort : être violée. Récit fort sur les cicatrices invisibles laissées par la guerre, Maskym Nakonechni espère que son film permettra de rendre compte de la vie de ces femmes. Et d’envoyer le message suivant : « Une guerre ne s’achève jamais avec le dépôt des armes ».

The Natural History of Destruction

Photo tirée du site web du Festival de Cannes

The Natural History of Destruction

Habitué de la Croisette, le réalisateur de Maïdan ou Donbass, Sergei Loznitsa, a présenté, en Sélection officielle, The Natural History of Destruction, un documentaire sur la destruction des villes allemandes par les Alliés pendant la Seconde Guerre mondiale.

Inspiré de l’ouvrage de l’écrivain W. G. Sebald, le film exhume d’impressionnantes images d’archives sur ces bombardements stratégiques destinés à détruire les capacités militaires de l’Allemagne nazie et saper le moral du peuple allemand.

Figure importante du cinéma ukrainien, Sergei Loznitsa a été, fin mars, écarté de l’Académie cinématographique d’Ukraine pour avoir refusé de mettre tous les artistes russes dans le même panier. Position qu’il a de nouveau défendue auprès de l’AFP, qualifiant « d’attitude inhumaine » le projet de boycottage des artistes russes en raison de leur seule nationalité.

Mariupolis 2

Photo tirée du site web du Festival de Cannes

Mariupolis 2

Film posthume montrant l’Ukraine sous les bombes, Mariupolis 2 est le dernier documentaire du Lituanien Mantas Kvedaravičius, tué il y a à peine deux mois dans la ville martyre.

Sans voix off ni musique, ce long métrage à l’os alterne entre longs plans montrant des paysages de désolation et scènes de la vie quotidienne d’habitants tentant de survivre, certains réfugiés dans le sous-sol d’une église. Un témoignage rare d’une ville qui a longtemps été le symbole de la résistance ukrainienne, avec la présence de soldats retranchés dans l’usine Azovstal, avant de tomber aux mains des Russes.

Après la mort de Mantas Kvedaravičius, sa fiancée Hanna Bilobrova, qui l’accompagnait, a pu rapporter les images tournées là-bas et les assembler. « C’était important pour lui de montrer la vie et les gens en temps de guerre plutôt que la guerre », a-t-elle raconté à l’AFP.