(New York) Le producteur déchu Harvey Weinstein a défendu son recours à des détectives privés qui auraient prétendument tenté d’obtenir le silence de ses accusatrices, en affirmant l’avoir fait « pour des journées comme celles-ci ».

À sa sortie du tribunal de New York où il subit son procès pour viol, Weinstein a répondu jeudi à la question d’un journaliste qui voulait savoir pourquoi l’accusé avait embauché Black Cube, une firme fondée par un ancien spécialiste du renseignement israélien.

Les procureurs ont indiqué que les détectives de la firme avaient emprunté de fausses identités pour rencontrer des journalistes et discréditer d’éventuelles accusatrices du producteur américain.

Le jury composé de sept hommes et cinq femmes a entendu jeudi le témoignage d’un avocat qui avait aidé Weinstein à engager la firme en 2017, au moment où des journalistes du New Yorker et du New York Times avaient commencé à fouiller le passé du producteur.

Les jurés ont pris connaissance d’un courriel de Harvey Weinstein à un employé de Black Cube dans lequel il désignait des personnes d’intérêt. Selon les procureurs, il s’agissait d’identifier les accusatrices du producteur. Le nom de l’actrice Annabella Sciorra, qui avait témoigné la semaine dernière avoir été violé par lui, y figurait.

Témoignage d’un ex-petit ami

Plus tôt jeudi, l’ex-petit ami d’une actrice débutante a raconté comment celle-ci était entrée à la maison « assez choquée, bouleversée, en colère » et « un peu horrifiée » après sa rencontre dans une chambre d’hôtel avec Harvey Weinstein, qui lui avait offert des rôles au cinéma en échange de relations sexuelles à trois.

Lincoln Davies, qui fréquentait Dawn Dunning en 2004, a été appelé à la barre par la poursuite pour renforcer le témoignage très émotif de l’accusatrice et d’une autre aspirante actrice. Ces deux femmes ont accusé mercredi le producteur déchu d’avoir profité de leur vulnérabilité en suggérant que la célébrité dans cette industrie passait par les faveurs sexuelles.

Mme Dunning a également soutenu que Weinstein avait mis sa main sous sa jupe et sur ses parties génitales quelques semaines plus tôt la même année. Son ex-petit ami a précisé jeudi qu’elle ne lui en avait jamais parlé.

Les jurés ont aussi entendu jeudi le témoignage du gérant d’un établissement populaire auprès des célébrités à Manhattan. Une ancienne serveuse, Tarale Wulff, soutenait mercredi que Harvey Weinstein l’avait entraînée vers une terrasse sombre et avait commencé à se masturber. Maurizio Ferrigno a raconté qu’il avait vu le producteur et la jeune femme monter l’escalier, mais il a reconnu en contre-interrogatoire que les procureurs l’avaient aidé à se souvenir des événements, qui se seraient produits il y a une quinzaine d’années, selon Mme Wulff.

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Une ancienne serveuse, Tarale Wulff, soutenait mercredi que Harvey Weinstein l’avait entraînée vers une terrasse sombre et avait commencé à se masturber.

Les témoignages de Tarale Wulff et de Dawn Dunning ne font pas partie à proprement parler de l’acte d’accusation contre Weinstein à ce procès à New York. Le magnat du cinéma, dont la déchéance brutale a donné naissance au vaste mouvement #moiaussi, est accusé d’avoir agressé sexuellement une assistante de production, Mimi Haleyi, dans son appartement en 2006, et d’avoir violé une actrice en herbe dans une chambre d’hôtel en 2013. Cette femme pourrait d’ailleurs témoigner plus tard cette semaine au procès.

Les procureurs peuvent toutefois appeler à la barre d’autres accusatrices en vertu d’une loi de l’État qui autorise les témoignages sur les antécédents de l’accusé, ce qui leur permet d’explorer des éléments tels que le mobile, l’intention criminelle et le profil de prédateur du prévenu.

Harvey Weinstein, âgé de 67 ans, plaide que les relations sexuelles étaient pleinement consenties ; il risque la prison à vie s’il est reconnu coupable.