En 2009, un parfait inconnu, de 20 ans à peine, s'empare du Festival de Cannes et devient instantanément l'une des grandes vedettes du cinéma mondial. Derrière le conte de fées qu'a vécu Xavier Dolan, il y a eu deux ans de galère.

«J'ai un scénario, voulez-vous le lire?»

Il a suffi d'un regard. Bien sûr, l'histoire est un peu plus complexe dans son ensemble, mais sans le premier contact visuel, lors d'une fête, entre Xavier Dolan - alors un parfait inconnu - et Carole Mondello, une femme de cinéma depuis plus de 30 ans, la trajectoire de J'ai tué ma mère n'aurait sans doute pas été la même.

«C'était un soir de 2007 au cours d'un garden-party magnifique, raconte-t-elle. Manuel Tadros, que je connaissais bien parce que nous avions travaillé ensemble sur la série Omertà, vient me voir en m'annonçant que son fils de 18 ans est là, et qu'il a écrit un scénario. Je suis sur la terrasse, le garçon se présente à moi et le premier contact visuel entre lui et moi se fait les yeux dans les yeux. J'ai alors eu un choc dont l'effet se fait encore ressentir aujourd'hui. Il me dit: "Madame, je suis Xavier Dolan, j'ai un scénario, voulez-vous le lire?"»

Ce scénario, intitulé J'ai tué ma mère, a comme source une nouvelle, Le matricide, que Xavier Dolan a écrite à 16 ans dans le cadre d'un travail scolaire.

«J'ai écrit le film peut-être un an et demi plus tard, après avoir quitté l'école. J'ai toujours été mauvais élève, sauf dans les matières qui me passionnaient. Mais je savais tellement que je voulais être un artiste!», affirmait Xavier Dolan dans Télérama - L'image originelle.

Un scénario très dur

«Xavier m'a téléphoné deux jours plus tard pour me demander si j'avais lu son scénario, poursuit Carole Mondello. Non, car j'étais à l'extérieur et je n'avais pas encore eu l'occasion de l'imprimer. À son intonation, j'ai compris l'urgence qui l'animait. Et là, j'ai lu. J'ai été choquée au point où j'ai fait "revoler" plusieurs pages de ce scénario. Je n'en revenais pas qu'un enfant puisse parler comme ça à sa mère. Étant moi-même mère d'un fils, j'ai été grandement perturbée. Puis, une fois calmée, je l'ai relu. J'ai revu Xavier en lui expliquant qu'étant une femme de terrain, je ne m'immiscerais pas dans le contenu, même si je le trouvais très dur. Je dirais que ce qu'on retrouve dans le film a été atténué d'environ 30 % par rapport à la toute première version. Y en avait, y en avait, y en avait!»

À cette étape, la mise en chantier du projet s'annonçait difficile. «Personne ne connaissait Xavier et, avant notre rencontre, il avait déjà fait le tour de toutes les maisons de production possibles et imaginables, explique celle qui portera finalement les casquettes de directrice de production et de productrice déléguée du film. Personne ne voulait de ce projet, pour toutes sortes de raisons. Un premier dépôt a quand même été fait avec un producteur que Xavier avait fini par trouver, qui avait sa propre équipe, dont je ne faisais pas partie. Ça m'a beaucoup attristée et déçue.»

Le rapport de lecture de l'évaluateur de Téléfilm Canada, révélé par La Presse en 2010, est impitoyable. «Ce film n'a aucune chance de se démarquer tant sur les marchés internationaux que dans les festivals», peut-on lire. «On peut se tromper, a déclaré Michel Roy, alors président du conseil d'administration de Téléfilm, dans une entrevue au Journal de Montréal publiée en juin 2009. Je n'ai pas honte du travail de notre jury, mais il est clair qu'à la lumière de ce que l'on sait aujourd'hui, c'est regrettable de ne pas avoir investi dans ce film-là.»

La détermination fait foi de tout

«Quelques mois après les refus, à l'été 2008, Xavier me croise au Festival des films du monde, se rappelle Carole Mondello. Il me prend les deux poignets et me dit: "Carole, si je ne fais pas mon film, je vais MOURIR." Il avait le même regard qu'à notre première rencontre. Ce fut pour moi le même choc. Le producteur qu'il avait trouvé n'était plus dans le décor et nous avons repris notre collaboration. Avec le mince budget à notre disposition, qu'il a puisé dans ses propres économies, on a quand même réussi à réunir une équipe. Beaucoup d'amis, dont plusieurs acteurs, ont aussi contribué financièrement. La détermination de Xavier a fait foi de tout. Il a trouvé les lieux, qui étaient souvent des maisons où vivaient des membres de sa famille, y compris la maison de sa mère, et le tournage a pu commencer.»

Même si la petite équipe a pu jusque-là se débrouiller avec les moyens du bord, les ressources financières ont vite fondu. En novembre 2008, le tournage s'arrête, d'autant plus qu'Anne Dorval a d'autres obligations. Entre alors en scène le producteur Daniel Morin, qui a été chargé de refaire un budget et de proposer de nouveau le projet à la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC), à la tête de laquelle se trouvait alors Jean-Guy Chaput.

Pendant ce temps, Xavier Dolan monte frénétiquement des scènes du film, histoire de pouvoir présenter des images à l'organisme québécois. Et de bonifier son dossier. Il faut encore sept jours de tournage pour terminer le film.

«Cet assemblage a convaincu la SODEC d'embarquer grâce à un programme d'aide à la postproduction, rappelle Daniel Morin. La décision de la SODEC est tombée le 23 décembre 2008. Grâce à cette aide et au crédit d'impôt, le budget total du film s'est élevé à 800 000 $. Nous aurions probablement trouvé des solutions si la SODEC avait refusé, mais le film n'aurait sans doute pas pu se terminer aussi rapidement. L'aide de la SODEC est vraiment arrivée à un bon moment!»

Le tournage de J'ai tué ma mère a pris fin en janvier 2009. Prochain objectif: le Festival de Cannes.

«À l'impossible je suis tenu» - Jean Cocteau

L'un des aspects les plus spectaculaires de J'ai tué ma mère est la réunion d'actrices et d'acteurs de renom dans un premier long métrage écrit et réalisé par un jeune homme qui, avant le premier jour de tournage, n'avait encore aucune espèce d'expérience de réalisation. Et qui, de surcroît, est pratiquement de toutes les scènes de son film à titre de comédien.

En 2008, quand commence le tournage, Anne Dorval (la mère), Suzanne Clément (la prof) et Patricia Tulasne (la mère du chum) sont des actrices accomplies. François Arnaud (l'amant) et Niels Schneider (l'autre amant) commencent leur carrière, sans être des débutants. Tous se sont laissé convaincre. La première rencontre entre Xavier Dolan et Anne Dorval fait d'ailleurs maintenant partie de la mythologie du cinéma québécois. Elle se produit dans un studio de doublage, quand l'actrice voit entrer un adolescent d'environ 16 ans, admiratif de son travail dans Le coeur a ses raisons.

«Je ne le connaissais pas du tout, a dit Anne Dorval lors d'une interview accordée à La Presse en 2014. Il m'appelait "madame". Il était super mignon, son discours était hyper éloquent et je me suis dit: "Mais c'est qui, ça ?"»

Déjà le Xavier qu'on connaît

Suzanne Clément, l'autre muse du cinéma de Xavier Dolan, connaît déjà un peu le jeune homme quand ce dernier lui parle de son scénario lors d'une soirée.

«J'ai trouvé ce scénario très fort du début à la fin, avec une vraie courbe scénaristique, claire et séduisante, une verve, des dialogues puissants, osés, explique-t-elle. J'ai accepté de jouer le rôle de l'enseignante et nous sommes devenus amis à ce moment-là. Xavier était déjà le Xavier qu'on connaît : hyper impliqué, avec une vraie intensité de création, une folie créatrice, des idées fortes, qu'il partageait avec nous afin de rendre l'expérience tangible et pour que, d'une certaine façon, nous soyons attachés émotionnellement au projet. J'ai été très touchée et interpellée par l'énergie et la foi de Xavier.»

Niels Schneider n'avait alors joué que dans deux films, dont Tout est parfait. Le soir de la première du long métrage d'Yves Christian Fournier, en février 2008, le jeune acteur voit un inconnu s'approcher.

«Xavier se présente et il me demande si j'accepte de lire son scénario et de lui donner mon avis. Il était sympathique et il émanait de lui une très grande envie de cinéma. Je le trouvais audacieux aussi. J'ai lu le scénario le lendemain et j'ai été époustouflé par la maturité de son écriture. Je lui ai accordé ma confiance très vite. Xavier a une autorité naturelle et il savait déjà où il allait de façon très précise, même s'il n'avait aucune expérience!»

Un mal pour un bien

Réunir une excellente distribution n'est pas une fin en soi. Aux difficultés de financement s'ajoute celle de la diffusion. Une entente se dessine avec un distributeur, Films Séville (qui n'avait pas encore fusionné avec Alliance Vivafilm à l'époque), mais celui-ci se désiste en cours de route.

Encore aujourd'hui, Louis Dussault, de K Films Amérique, s'explique mal la volte-face de Séville. Il s'en réjouit en même temps, car son entreprise, alors au bord du gouffre, a joué le meilleur coup de son existence en acquérant les droits d'exploitation de J'ai tué ma mère.

«Au printemps 2009, Xavier vient au bureau pour me montrer son film et, vraiment, les bras m'en tombent. Tous les membres de mon équipe ont la même réaction et nous manifestons tout de suite notre intérêt.»

Une course contre la montre

Le lendemain, Xavier Dolan apprend à son nouveau distributeur que le film est sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes.

«Il fallait agir très rapidement, se souvient Louis Dussault. Nous sommes en avril, à quelques semaines du festival. Le film n'est pas encore mixé, le générique n'est pas fait, et il n'existe aucun matériel pour la promotion et pour la presse. Bref, il reste un travail énorme à faire.»

Le distributeur indépendant, dont le catalogue à cette époque comprend des films comme La question humaine (Nicolas Klotz) et Fais-moi plaisir (Emmanuel Mouret), explique qu'il a dû avoir recours au système D pour financer l'opération. J'ai tué ma mère n'ayant pas été financé par les institutions, il n'était pas admissible aux programmes d'aide à la promotion.

«On est allés à Cannes en loadant nos cartes de crédit au maximum! dit-il. La SODEC a dégagé une somme pour couvrir les frais de voyage de l'équipe du film, mais il n'y avait pas assez d'argent pour financer le matériel de promotion, l'affiche, la bande-annonce, etc. Pour nous, il était aussi très clair que J'ai tué ma mère devait sortir au Québec tout de suite après Cannes afin de profiter des retombées. Il n'était pas question d'attendre une présentation au festival de Toronto à l'automne.»

Prochaine étape: se faire valoir sur la Croisette

Une étoile est née

PHOTO CLARA PALARDY, FOURNIE PAR K FILMS AMÉRIQUE, PHOTOMONTAGE LA PRESSE

Avant même d'avoir écrit une seule phrase de son scénario, Xavier Dolan a un objectif bien précis: présenter son film au Festival de Cannes. Très tôt dans le processus, il en parle à Carole Mondello, celle qui, d'une certaine façon, l'a «accouché» en tant que cinéaste.

«Évidemment, tu as d'abord tendance à prendre ça avec un grain de sel, explique- t-elle. Un premier film réalisé par un jeune sans expérience, que personne ne connaît, qui serait sélectionné à Cannes? Ben voyons. Mais quand c'est Xavier qui dit ça, avec l'intensité et la détermination dont il est capable, tu ne peux pratiquement pas faire autrement que d'y croire!»

Présélectionné partout!

Le producteur Daniel Morin, qui a mis les choses en place afin de trouver in extremis du financement auprès de la SODEC pour terminer le film, se souvient très bien du processus qui a mené à la sélection de J'ai tué ma mère à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes. «À l'invitation de Téléfilm Canada, les sélectionneurs des trois sections - la sélection officielle, la Semaine de la critique et la Quinzaine - sont venus à Montréal pour voir ce que le Québec avait à proposer. J'ai tué ma mère a été présélectionné par les trois comités!»

Olivier Père, dont le mandat de délégué général de la Quinzaine des réalisateurs a pris fin en 2009, raconte: 

«Je ne m'étais pas rendu personnellement à Montréal, mais j'avais délégué un des membres de mon comité de sélection, Stéphane Delorme [aujourd'hui rédacteur en chef des Cahiers du Cinéma]. Il a vu J'ai tué ma mère, a rencontré Xavier Dolan, est ensuite rentré en France et nous a fait partager son enthousiasme. Plus tard, nous avons pu voir le film à Paris à notre tour, et nous l'avons tous apprécié. Nous n'avons cependant pas invité Xavier tout de suite, car nous avions déjà deux autres films québécois dans notre sélection: Polytechnique, de Denis Villeneuve, et Carcasses, de Denis Côté. Comme on ne sélectionne pas plus d'une vingtaine de longs métrages, on essaie quand même de trouver un équilibre entre les pays représentés. Mais là, nous avions un véritable engouement pour ces trois films, alors on s'est finalement dit qu'il valait mieux assumer nos choix, d'autant que nous étions aussi sensibles aux premières oeuvres. On ne l'a pas regretté!»

L'«Arthur Rimbaud du cinéma»

Le 18 mai 2009, en matinée, la toute première projection de J'ai tué ma mère a lieu à Cannes, dans le cadre de la Quinzaine des réalisateurs.

La projection est principalement destinée à la presse, mais le «vrai» public est aussi admis. D'évidence, le film séduit. Le fameux «pétage de coche» d'Anne Dorval, qui remet à sa place un directeur de pensionnat condescendant, est accueilli par une salve d'applaudissements spontanée et bien nourrie. Dès lors, la rumeur favorable amorcée au Marché du film, où le long métrage a déjà suscité l'enthousiasme auprès des acheteurs internationaux, se répand comme une traînée de poudre sur toute la Croisette. Le jeune homme de 20 ans qui, la veille encore, était totalement anonyme, crée l'événement et maîtrise le jeu médiatique à la perfection.

«Xavier est tout de suite devenu une star. Il a immédiatement obtenu les suffrages du public et de la presse. Parmi tous les films que nous avons invités cette année-là, J'ai tué ma mère est sans contredit celui qui a eu le plus grand retentissement», explique Olivier Père, ex-délégué général de la Quinzaine des réalisateurs.

«Ce fut d'ailleurs un peu cruel pour les films de Denis Côté et Denis Villeneuve qui, eux, sont passés plus discrètement. Cela dit, le phénomène qui a entouré J'ai tué ma mère n'est pas unique dans l'histoire de la Quinzaine. Chaque année, un film suscite un enthousiasme très fort, mais c'est peut-être la première fois qu'un tel phénomène est survenu pour un premier long métrage, réalisé par un inconnu, dès sa première présentation. Ça a déclenché une sorte d'hystérie qui ne s'est pas démentie. Très vite, on a dit de Xavier qu'il était l'Arthur Rimbaud du cinéma!», se souvient Olivier Père.

Cet enthousiasme sur la Croisette a bien entendu eu un très fort écho au Québec. Xavier Dolan est devenu une figure médiatique incontournable.

Déjà des prix!

Quelques jours après les présentations du film sur la Croisette, J'ai tué ma mère crée de nouveau l'événement en remportant trois prix à la Quinzaine des réalisateurs. En son for intérieur, le jeune cinéaste rêve surtout de la Caméra d'or, cette récompense remise au meilleur premier long métrage, toutes sections confondues, dont le lauréat est annoncé lors du dévoilement du palmarès officiel.

Deux heures avant la grande cérémonie, nous étions en train de casser la croûte avec celui dont le téléphone n'arrêtait pas de tempêter. L'appel attendu tombe enfin. C'est non*. Les délibérations auraient été longues, et trois films, parmi lesquels J'ai tué ma mère, auraient fait l'objet des discussions finales d'un jury présidé par l'acteur Roschdy Zem. Xavier Dolan est déçu, bien sûr, mais il ne s'apitoie pas sur son sort plus de 30 secondes. Le soir même, il s'envole pour Paris afin d'honorer plusieurs rendez-vous, histoire de préparer Laurence Anyways, qui doit alors être son deuxième long métrage. Il reviendra pourtant l'année suivante sur la Croisette avec Les amours imaginaires.

Xavier Dolan est né à Cannes. Il en est déjà l'enfant chéri.

Prochaine étape: La suite des choses.

* En 2009, la Caméra d'or a été attribuée au film australien Samson and Delilah, de Warwick Thornton.

La première à Montréal

PHOTO JEAN-PIERRE TADROS, FOURNIE PAR IMAGES DISTRIBUTION, PHOTOMONTAGE LA PRESSE

Le 1er juin 2009, moins d'un mois après le bal cannois, la grande première québécoise de J'ai tué ma mère a lieu au Cinéma Impérial de Montréal. Il y règne l'atmosphère de ces soirs où l'on sent que quelque chose d'important est en train de se passer. La présentation de Xavier Dolan est drôle, vive, et le jeune cinéaste profite de l'occasion pour rendre hommage à Jean-Guy Chaput, au moment où ce dernier est dans la tourmente. Le conseil d'administration de la SODEC reproche au président-directeur général les «dépenses somptuaires» découlant du séjour de l'imposante délégation québécoise à Cannes.

Un vrai succès public

Bien que distribué d'abord dans une douzaine de salles, dont seulement quelques-unes en région, J'ai tué ma mère obtient un très beau succès public au Québec, générant des recettes frôlant le million de dollars (995 196 $ selon la firme Cinéac). Si l'on inclut les salles du Nouveau-Brunswick et de l'Ontario, la barre du million est franchie.

Le film glane des prix dans de nombreux festivals et représente le Canada aux Oscars dans la catégorie du meilleur film en langue étrangère. En 2010, J'ai tué ma mère remporte le Jutra du meilleur film, le prix Claude-Jutra aux Genie Awards à Toronto (attribué au meilleur premier long métrage) et se retrouve finaliste dans la catégorie du meilleur film étranger à la cérémonie des Césars du cinéma français.

Rien de surprenant

À 20 ans, Xavier Dolan s'impose grâce à son talent, mais aussi grâce à sa personnalité. Ne laissant personne indifférent, il ouvre la voie à tous les nouveaux créateurs qui, suivant son exemple, se sont dit qu'il n'était pas obligatoire d'attendre le feu vert des institutions avant de se lancer dans un projet.

Des cinéastes comme Lukas Dhont (Girl) et Nathan Ambrosioni, un jeune Français de 19 ans qui propose cette année son premier film, Les drapeaux de papier (à l'affiche au Québec cet été), ont dit être inspirés par le cinéma de Dolan. L'écrivain Édouard Louis lui a même dédié son roman, Qui a tué mon père?

Rien de tout cela n'étonne Suzanne Clément.

«C'était comme si tout cela relevait de l'évidence. Xavier vit quelque chose pour lequel il est fait, en surdoué.»

«Cela ne veut pas dire que tout lui est facile, mais il a ce génie de création qui le rend capable de s'adapter à tout ça, de faire avancer son travail, son art et ses projets, nuance-t-elle. Chaque étape qu'il a franchie lui a demandé un courage fou, et beaucoup d'audace. Réagir aux critiques autant qu'aux éloges, trouver les mots pour décrire son travail et choisir de se lancer dans une aventure, chaque fois. "Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage", voilà un proverbe qui le définit bien. Il a su le comprendre et s'y atteler dès J'ai tué ma mère. Il aurait pu s'arrêter là, mais ça n'aura finalement été que le point de départ de son épanouissement.»

Dix ans plus tard, Xavier Dolan a réalisé sept autres longs métrages, dont quatre ont été sélectionnés au Festival de Cannes. Matthias et Maxime, qu'il a tourné l'an dernier au Québec, est de tous les pronostics et pourrait être lancé à la grande fête du mois de mai sur la Côte d'Azur.

Sur la Croisette, Dolan est chez lui. Depuis le début.

PHOTO ROBERT SKINNER, PHOTOMONTAGE LA PRESSE