Vingt trophées Iris seront attribués dimanche à des longs métrages de fiction québécois. Nous avons mis « en duel » quelques candidatures dans des catégories où la course s’annonce très serrée.
Meilleur film
1991/Une colonie
Pour le plus bel Iris, le film le plus populaire de l’année est en lice contre le film le plus primé de l’année. S’il transforme en trophées ses 16 citations, 1991 pourrait fracasser le record établi il y a 13 ans par C.R.A.Z.Y., de Jean-Marc Vallée. Le troisième volet de la série autobiographique de Ricardo Trogi est fort sympathique, mais les membres votants vont-ils le plébisciter à ce point ?
Une colonie, premier long métrage de fiction de Geneviève Dulude-De Celles, arrive déjà fort d’un prix prestigieux glané au Festival de Berlin, sans oublier le prix du meilleur film de l’année aux Écrans canadiens. Les cinq autres longs métrages retenus, À tous ceux qui ne me lisent pas, La Bolduc, Genèse, La grande noirceur et Répertoire des villes disparues, ne sont pas non plus à exclure de la course.
Meilleur scénario
À tous ceux qui ne me lisent pas/Une colonie
Alors que la compétition pour la meilleure réalisation ressemble sensiblement à celle pour le meilleur film, on ne peut s’attendre à une copie conforme dans la catégorie du scénario. Sélectionné 12 fois, À tous ceux qui ne me lisent pas pourrait s’y distinguer. Le cinéaste Yan Giroux, qui a signé son scénario avec Guillaume Corbeil, s’est librement inspiré de la vie du poète Yves Boisvert pour offrir un film très évocateur et engageant.
On prêtera aussi les meilleures chances à Geneviève Dulude-De Celles. La cinéaste, qui signe aussi le scénario de son film, a su se démarquer par la finesse avec laquelle elle dessine le portrait d’une adolescente. Cela dit, Ricardo Trogi pourrait l’obtenir si 1991 fait la vague. Avant qu’on explose et Origami sont aussi en lice.
Meilleure interprétation féminine – Premier rôle
Debbie Lynch-White/Brigitte Poupart
L’excellente performance de Debbie Lynch-White élève le niveau de La Bolduc, un drame biographique bien appliqué, très classique. En se glissant dans la peau de Mary Travers, qui a fait turluter le Canada français dans ses heures les plus sombres, l’actrice mérite assurément cette reconnaissance.
Tout comme Brigitte Poupart, exceptionnelle dans Les salopes ou le sucre naturel de la peau. L’actrice a courageusement plongé dans un rôle casse-gueule en modulant toutes les tonalités d’un personnage complexe. Ses chances sont cependant plus minces, car le film de Renée Beaulieu n’est cité dans aucune autre catégorie. Josée Deschênes (Répertoire des villes disparues), Karelle Tremblay (La disparition des lucioles) et Carla Turcotte (Sashinka) complètent le quintette.
Meilleure interprétation masculine – Premier rôle
Martin Dubreuil/Théodore Pellerin
Cette catégorie sera probablement celle où la course sera la plus serrée. Tout devrait se jouer entre Martin Dubreuil et Théodore Pellerin. Dans À tous ceux qui ne me lisent pas, Martin Dubreuil est en parfaite symbiose avec le poète « maudit » Yves Boisvert. Cet acteur unique — aussi en vedette dans La grande noirceur — n’a été cité qu’une seule fois dans l’histoire du gala (pour Les sept jours du talion en 2011). Il est « dû ».
En revanche, le magnétisme de Théodore Pellerin (lauréat l’an dernier de l’Iris de la révélation) dans Genèse est puissant. Le jeune acteur y incarne un pensionnaire extraverti, qui s’offre en spectacle pour mieux dissimuler un monde intérieur trouble. N’écartons pas d’emblée non plus les trois autres candidats. Patrick Hivon est électrisant dans Nous sommes Gold, un film trop peu vu, Pierre-Luc Brillant est remarquable dans La disparition des lucioles, et Jean-Carl Boucher ne pourrait être un meilleur alter ego pour Ricardo Trogi dans 1991. Pas facile…
Meilleure interprétation féminine – Rôle de soutien
Sandrine Bisson/Larissa Corriveau
Déjà lauréate du même prix pour le même rôle grâce à 1981, Sandrine Bisson est en lice pour la quatrième fois au gala, mais pour la troisième fois pour avoir incarné la mère de Ricardo Trogi dans 1991, quatre ans après 1987. Si le trophée lui avait alors échappé à la faveur de la vague Mommy, il se pourrait bien qu’il lui revienne cette année.
Il faudra aussi compter sur la présence de Larissa Corriveau, la révélation de Répertoire des villes disparues, de Denis Côté. Aussi réalisatrice et poétesse, l’actrice incarne une femme ressentant les choses différemment de ses concitoyens dans un petit village où apparaissent d’étranges fantômes. Les autres candidates sont Céline Bonnier (À tous ceux qui ne lisent pas), Mélissa Désormeaux-Poulin (Dérive) et Natalia Dontcheva (Sashinka).
Meilleure interprétation masculine – Rôle de soutien
Pier-Luc Funk/Vincent Leclerc
Philippe Lesage a de nouveau utilisé le talent dramatique de Pier-Luc Funk dans Genèse, après lui avoir offert un rôle aussi fort que troublant dans Les démons. L’acteur se glisse cette fois-ci dans la peau d’un jeune homme dont la relation de couple est minée par une maladresse.
De son côté, Vincent Leclerc incarne un sans-abri rêvant simplement d’un appartement « à lui » dans La chute de l’empire américain, de Denys Arcand. Avec Maripier Morin, l’acteur est d’ailleurs le seul représentant du plus récent film du réalisateur des Invasions barbares dans les catégories faisant l’objet d’un vote des membres. Robin Aubert (Une colonie), Alexandre Nachi (1991) et Henri Picard (À tous ceux qui ne me lisent pas) feraient aussi d’honorables lauréats.
Meilleure direction photo
François Messier-Rheault/Sara Mishara
La compétition dans cette catégorie est particulièrement intéressante, dans la mesure où s’affrontent deux approches différentes. Pour Répertoire des villes disparues, tourné en 16 mm, Denis Côté a fait appel à François Messier-Rheault, avec qui il avait déjà tourné Ta peau si lisse. Il lui a demandé une image « granuleuse, pas charmante » en utilisant la grisaille naturelle de l’hiver québécois.
Pour La grande noirceur, de Maxime Giroux, Sara Mishara (Tu dors Nicole), dont il s’agit de la sixième citation, a capté la lumière naturelle du sud-ouest des États-Unis, très contrastée, pour exprimer le sentiment d’exclusion d’un personnage pris dans un conte cruel et violent. Steve Asselin (1991) est par ailleurs cité une 4efois, Ronald Plante (La Bolduc), une 3efois, et Ian Lagarde (À tous ceux qui ne me lisent pas) fait son entrée dans ce club sélect. Aucun des cinq candidats n’a encore remporté le trophée.
Révélation de l’année
Émilie Bierre/Maripier Morin
Quand Denys Arcand a annoncé que Maripier Morin allait tenir le rôle principal féminin de La chute de l’empire américain, l’animatrice a dû surmonter un scepticisme de bon aloi. Il se trouve qu’elle s’est révélée convaincante à titre de comédienne.
On voit cependant mal comment ce prix pourrait échapper à Émilie Bierre. Une colonie, entièrement construit autour de son personnage, lui a en outre valu récemment le prix de la meilleure actrice aux Écrans canadiens. À l’évidence, les chances de ses deux formidables partenaires, Irlande Côté et Jacob Whiteduck-Lavoie, s’en trouvent diminuées, tout comme celles de Lévi Doré, cité grâce à sa performance dans La chute de Sparte, de Tristan Dubois.
> Le Gala Québec Cinéma, qui se tient au studio 42 de la Maison de Radio-Canada dimanche, est diffusé en direct sur ICI Télé dès 20 h.
> Le Gala Artisans, qui se tient à la Société des arts technologiques le même jour dès 16 h, est diffusé sur ICI ARTV et à radio-canada.ca/galaquebeccinema