Le 20 juin 1975, le long métrage Jaws (Les dents de la mer) de Steven Spielberg s'inscrivait dans l'histoire du cinéma en devenant la première superproduction estivale.

Des millions de personnes ont convergé vers les salles de cinéma pour voir ce savant mélange d'horreur, d'aventure et de drame. D'aucuns chez ces spectateurs sont repartis avec de sérieux doutes sur les joies de la baignade en eau libre.

Tourné avec un budget d'environ 9 millions de dollars, le double des prévisions, le film a rapporté 470 millions au box-office, dont 260 millions aux États-Unis.

On connaît la carrière qu'aura Spielberg par la suite. Quant au film, il a depuis longtemps fait sa place au panthéon des classiques du septième art.

Afin de célébrer les 40 ans de la sortie du film, plusieurs cinémas américains annoncent des projections-anniversaires les 21 et 24 juin. Une rare occasion de voir l'oeuvre sur grand écran.

Du roman à l'écran

Jaws est l'adaptation du roman éponyme de Peter Benchley, ex-journaliste du Washington Post et rédacteur de discours pour le président Lyndon B. Johnson. 

Benchley a nourri son récit de quelques histoires documentées d'attaques de requins commises sur la côte est américaine. Mais, plus particulièrement, il a trouvé l'inspiration dans la capture, en 1964, d'un grand requin blanc de 4550 livres au large de Montauk, riche station balnéaire de Long Island. Le scénario du film a été écrit par Carl Gottlieb.

L'équipe du film avait surnommé le requin « Bruce » du nom de Bruce Ramer, avocat de Spielberg. Nous n'étions pas encore à l'ère des effets spéciaux numériques et la bête mécanique était déplacée sur des rails ou par des plongeurs. 

Il y a eu plusieurs pépins sur le plateau, le monstre ne fonctionnant pas comme souhaité et coulant à pic au premier test. Irrité, Spielberg évoqua le requin en disant The Great White Turd (comme dans « crotte »).

Duel contre Jaws

Avant Jaws, Spielberg avait tourné Duel, un thriller dans lequel le chauffeur d'un semi-remorque, fou de rage, prend en chasse un automobiliste. Le cinéaste a vu des similitudes entre les deux histoires. Deux titres de quatre lettres et deux colosses en leur genre pourchassant des humains. 

On pourrait ajouter à cela que les deux prédateurs sont pratiquement toujours invisibles; on ne voit jamais le visage du conducteur du camion et le requin n'est montré entièrement que très tard dans le film.

Pas des premiers choix

Roy Scheider, Robert Shaw et Richard Dreyfuss n'étaient pas les premiers choix pour jouer les rôles principaux. Pour incarner l'océanographe Matt Hooper (Dreyfuss), Spielberg a d'abord pensé à Jon Voight, Timothy Bottoms et Jeff Bridges. 

Pour interpréter le shérif Brody, les producteurs voulaient un nom connu alors que le réalisateur cherchait un nouveau visage. Il rencontra Roy Scheider dans une fête et celui-ci se proposa. 

Quant à Quint, le pêcheur, Spielberg proposa d'abord le rôle à Lee Marvin et à Sterling Hayden avant d'arrêter son choix sur Robert Shaw.

Deux notes

Deux notes: mi et fa. Jouées à répétition et de plus en plus vite. Voilà l'essentiel d'un des thèmes musicaux les plus connus de l'histoire du cinéma. 

Lorsque le compositeur John Williams (Star Wars, Raiders of the Lost Ark) l'a joué à Spielberg, ce dernier a cru à une blague, avant de réaliser à quel point cela créait une forte tension. Williams a remporté l'Oscar de la meilleure trame sonore. En matière de thème minimaliste, il allait remettre ça avec les cinq notes de Rencontre du troisième type, autre film de Spielberg.

Martha's Vineyard

L'histoire se déroule dans l'île fictive d'Amity. Le plateau s'est installé à Edgartown et à Menemsha, dans l'île très cossue de Martha's Vineyard. De là, il était possible de tourner au large dans des eaux d'une dizaine de mètres de profondeur avec un fond sablonneux sans qu'on ne voie la côte, ce qui accentuait l'impression de danger. 

Mais les règles de travail étaient extrêmement strictes. Le gouvernement local n'a autorisé la construction que d'un seul bâtiment, la cabane de Quint. Quant au grand panneau municipal sur lequel on lisait « Amity Island », il a été démonté dès le tournage terminé.