Conte naïf et absurde qui se termine sur un vœu pieux, Le cochon de Gaza réussit à parler d’une situation dramatique – le conflit israélo-palestinien en général et les conditions de vie misérables des Palestiniens dans la bande de Gaza en particulier – sur le ton de la franche rigolade. Comédie burlesque qui a remporté le César du meilleur premier film, le long métrage du journaliste et écrivain français Sylvain Estibal est un vibrant plaidoyer pacifiste qui démontre qu’avec beaucoup de bonne volonté, on peut réussir à s’entendre.



La vie de Jafaar est pénible: pêcheur sans poissons, criblé de dettes, vivant avec des soldats israéliens qui font le guet sur le toit de sa maison, il garde la tête hors de l’eau de peine et de misère. Lorsqu’il prend dans ses filets un cochon vietnamien, il fait quelques tentatives puériles pour s’en débarrasser, puis surmonte son dégoût et ses croyances pour tirer profit de cette prise miraculeuse.

Jafaar (joué par l’extraordinaire acteur israélien Sasson Gabay) entreprend alors un commerce assez particulier avec Yelena (incarnée par l’actrice tunisienne Myriam Tekaïa), juive russe résidant dans une colonie – on ne vous dira pas à quel genre d’échange ils se livrent, histoire de ne pas brûler le punch. Bien sûr, il doit faire tout cela en cachant l’encombrante bête, qu’il déguise parfois en mouton... Jafaar, on le voit, n’est jamais à court d’idées.

Humour bon enfant



Entre un attentat suicide raté et les points de contrôle effectués par de jeunes soldats juifs mal à l’aise, il y a aussi une telenovela brésilienne et des répliques assassines – «Un cochon est un cochon partout. Comme les hommes», dit la femme de Jafaar, philosophe... L’humour bon enfant basé sur le comique de situation fait souvent mouche, d’autant que les situations sont inusitées. Par exemple, comment tirer avec une vieille Kalashnikov quand on n’a pas tenu de fusil entre ses mains depuis la guerre de Six Jours?

En renvoyant dos à dos les deux peuples ennemis, mais aussi en mettant l’accent sur ce qui les raproche, Sylvain Estibal signe une fable politique rigolote sur des enjeux plus que sérieux, qui fleure parfois l’angélisme – personne n’y meurt, malgré les nombreux dangers encourus. Mais comment être contre une histoire qui se termine avec les mots «ensemble» et «paix»?




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Le cochon de Gaza. Comédie de Sylvain Estibal. Avec Sasson Gabay, Myriam Tekaïa, Baya Belal et Gassan Abbas. 1h38.