Brad Pitt a effectué aujourd’hui sa visite annuelle à Cannes, cette fois pour lancer Killing Them Softly, un film de gangsters à saveur politique. De son côté, l’habitué Ken Loach a bien fait marrer la Croisette avec The Angel’s Share, une comédie sociale décapante.







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Quand une superstar comme Brad Pitt s’amène sur la Croisette, c’est forcément le branle-bas de combat. Plus rien d’autre ne semble exister dans l’actualité du jour que la présence de la vedette dans les parages. Une heure avant la tenue de sa conférence de presse, les journalistes s’agglutinaient déjà nombreux à la porte. La cohue. Nombreux sont ceux qui, à l’encontre de toute éthique professionnelle, ont même apporté photos et affiches dans l’espoir de pouvoir la faire signer par la star. «Oui mais c’est Brad Pitt», pourraient-ils même avancer comme excuse.

Ce n’est pas que la star, nommée aux Oscars cette année grâce à sa performance dans Moneyball, se fasse rare. Brad Pitt vient à Cannes pratiquement tous les ans. Il en fait de même à Toronto, à Venise, bref, il fréquente tous les festivals du carré d’as quand l’un des ses films est sélectionné. Partout, toujours, la même effervescence, la  même folie. Qu’il affronte avec aplomb et humour.

Cette année, Brad Pitt est venu sur la Croisette pour défendre Killing Them Softly, le troisième film américain présenté en compétition officielle. Réalisée par le Néo-Zélandais Andrew Dominik (The Assassination of Jesse James by the Coward Robert Ford), cette adaptation du roman de George V. Higgins Cogan’s Trade emprunte d’abord la forme d’un film de gangsters classique. De fortes connotations politiques viennent toutefois se greffer au récit. 

Brad Pitt, qui agit aussi à titre de producteur du film, se glisse dans la peau d’un homme de main à qui les caïds de la mafia font appel pour faire un peu de ménage dans les organisations criminelles. Cela dit, la particularité de ce long métrage réside dans la transposition d’époque d’un récit qui, dans le roman, se déroulait dans les années 70. Dominik a en effet décidé de camper l’intrigue en 2008, soit au moment où une grave crise financière faisait des ravages aux États-Unis et ailleurs dans le monde. C’est aussi l’année où Barack Obama fut porté au pouvoir.

«En tant que producteur, j’aime appuyer des films plus difficiles à monter, a déclaré Brad Pitt. Des films comme ceux que fait Andrew. J’ai été intéressé par le fait que Killing Them Softly commence comme un thriller pour ensuite aborder des thèmes beaucoup plus larges. Quand on regarde quels sont nos films favoris, on s’aperçoit que ce sont toujours des oeuvres comportant plusieurs dimensions.»

Dans Killing Them Softly, la crise financière a une incidence directe sur les actions des organisations criminelles. La violence y est crue, mais toujours montrée à distance. D’où le titre. Qui évoque la méthode utilisée par Cogan. Ce dernier ne veut jamais tuer ses victimes de près afin d’éviter tout sentimentalisme.

Pour Andrew Dominik, le capitalisme est une extension de la théorie de l’évolution. «Une sélection naturelle est faite», dit-il.

À cet égard, on pourra interpréter l’aspect politique du récit comme une critique virulente du régime Obama, marqué par la désillusion. Brad Pitt réfute pourtant cette vision.

«Que le film sorte à l’automne, alors que nous serons tout près de l’élection présidentielle, relève d’une pure coïncidence, soutient-il. Mais les responsables de la crise d’il y a quatre ans n’ont toujours pas payé pour leurs crimes. J’étais à Chicago quand Barack Obama a été élu. Ce fut une soirée incroyable. Or, son discours d’unité n’a pas été entendu. Les Américains sont plus divisés que jamais. Je vous prédis des publicités négatives comme jamais on n’en aura encore vues dans notre histoire quand nous approcherons de l’élection. C’est un constat. Je ne voudrais pas que le film soit perçu comme une attaque d’aucune façon.»

Killing Them Softly prendra l’affiche le 21 septembre en Amérique du Nord.

Drôle de Loach



On le connaît surtout pour ses films dramatiques à forte teneur sociale. The Wind that Shakes the Barley lui a valu une Palme d’or en 2006. Avec The Angel’s Share, le vétéran britannique Ken Loach emprunte cette fois un ton plus léger pour raconter l’histoire d’un petit délinquant écossais qui se refait une vie grâce à son nez. Initié par hasard à l’art du whisky, le jeune homme affiche contre toute attente un réel talent de dégustateur, exceptionnel au point où il aura bientôt ses entrées dans les clubs les plus sélects.

Portant à l’écran un scénario écrit par son fidèle complice Paul Laverty, Loach propose ici un film très marrant, empreint aussi de chaleur humaine. L’accent écossais fait le reste. Tout comme le whisky qui l’accompagne.