Par les temps qui courent, les constructeurs de voitures électriques ont tous la même idée en tête, celle de créer des voitures entièrement recyclables (le plus possible, du moins) afin de limiter leur empreinte environnementale.

Or, voilà qu’une nouvelle composante pourrait leur venir en aide, un produit baptisé par les anglophones black mass. Ce matériau est obtenu à partir des résidus de vieux véhicules électriques, plus précisément de leurs vieilles batteries.

Ce nouveau matériau s’annonce prometteur au sein de l’industrie, si bien que certains vont jusqu’à le surnommer « le nouvel or noir »... Et si on prend en considération que la demande de batteries pour les voitures électriques est en forte hausse ces années-ci, il est facile de croire que ce nouvel or noir puisse devenir un produit hautement prisé.

Les défis des constructeurs

Quelques défis se posent toutefois face à ce produit. Il faut savoir tout d’abord qu’actuellement, l’industrie de la construction des véhicules électriques fait face à deux problèmes majeurs.

Primo, les constructeurs doivent négocier avec la pollution causée par l’absence de recyclage d’une grande partie de leurs composants. Voilà qui ne plaît guère.

Secundo, plusieurs constructeurs font face à des difficultés d’approvisionnement en ce qui a trait à plusieurs matières de base, des matières qui proviennent de l’extérieur et qui pourraient d’ailleurs se raréfier au cours des années à venir. Ces temps-ci, on observe justement ce phénomène avec la décision de la Chine de limiter les exportations de certains métaux importants pour l’industrie, notamment le gallium.

C’est précisément là qu’entre en scène la fameuse black mass (appelons-la « masse noire » en français, pour plus d’élégance...), qui nous arrive telle une sauveuse. Car oui, elle pourrait devenir une solution bien utile aux Occidentaux que nous sommes pour contrer les défis cités précédemment. Et pourquoi ne pas régler les deux problèmes à la fois ?

Les vieux moteurs à la rescousse

Mais de prime abord, de quoi est faite cette fameuse masse noire qui pourrait sauver l’avenir de la production de véhicules électriques ?

Le processus est plutôt simple. La masse noire est obtenue lorsque nous recyclons les piles usagées, ou encore lorsque nous recyclons les résidus générés par leur fabrication.

Quand une batterie de véhicule électrique arrive en fin de vie, on peut la démonter, la broyer et recueillir ce qui en ressort, une masse noire poudreuse, faite de lithium, de cobalt et de nickel, entre autres. Or, ce sont précisément ces métaux précieux qui risquent de se faire de plus en plus rares.

Il en résulte un matériau recyclé susceptible de réduire les exigences en métal de l’industrie des véhicules électriques, tout en amenuisant notre dépendance par rapport aux pays lointains qui ont recours à l’extraction minière.

Et pas qu’un peu... On parle ici d’une réduction considérable. Pour donner une petite idée, disons que selon les évaluations faites à ce jour, on estime que les matières recyclables représenteront 15 % de la production de lithium d’ici 2030, 11 % de la production de nickel et jusqu’à 44 % en ce qui concerne le cobalt. C’est dire à quel point le potentiel de cette matière est d’intérêt.

Mais évidemment, comme rien n’est parfait, le tout n’est pas sans embûche.

Des embûches ? Quelles embûches ?

D’abord, il faut savoir que pour le moment, la production de la masse noire est insuffisante à l’échelle européenne et accuse aussi du retard par rapport à l’Asie. À l’heure actuelle, c’est la Corée du Sud qui s’impose comme cheffe de file dans ce secteur.

Mais encore, le recyclage des masses noires pourrait, à son tour, poser quelques défis environnementaux. En fait, la classification du matériau varie considérablement d’un pays à l’autre, ce qui complique la production à grande échelle.

Idéalement, on devrait classer la masse noire dans la catégorie des « déchets dangereux ». Lorsque cette étiquette sera apposée, seuls les pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pourront l’exporter.

Or, une autre ombre s’ajoute au tableau, soit l’apparition de nouveaux types de piles créées à base de fer, de lithium et de phosphate, pour ne donner ici que quelques exemples. Ces piles sont moins chères à fabriquer, mais il y a là aussi un revers de la médaille, puisque leur recyclage est beaucoup plus complexe.

Autrement dit, autant les avantages de la masse noire sont considérables et prometteurs en théorie, autant en pratique, l’adoption de ce matériau à grande échelle pourrait constituer un défi de taille pour que son potentiel puisse être pleinement exploité.

À l’heure actuelle, l’avenir de la masse noire demeure donc incertain. Il n’en reste pas moins que, compte tenu de son grand potentiel, l’industrie automobile a tout intérêt à suivre toute forme de développement en ce qui la concerne.