Bye bye bye Karim – La veillée des ami.e.s

À peine six mois après l’annonce de sa mort tragique, les Francos de Montréal ont dédié cette année leur édition complète à Karim Ouellet. Un spectacle hommage a aussi été organisé par les proches et la famille musicale de l’auteur-compositeur-interprète de Québec – Alaclair Ensemble, Claude Bégin, Sarahmée, La Bronze, Luis Clavis, entre autres – le 12 juin sur la place des Festivals. Un spectacle imparfait, un peu bancal, mais nécessaire et porté par une telle charge d’amour que ses défauts n’étaient pas si graves quand on y repense. Les interprétations remplies d’émotion contenue d’Ariane Moffatt ou de Fanny Bloom, le groove fabuleux de l’affable renard sur lequel nous avons dansé doucement, la voix de Karim lui-même qui a résonné en fin de concert avec une chanson inédite, les larmes qui coulaient sur les visages des spectateurs : il y a eu ce soir-là un grand moment de communion, une tristesse partagée, un intense désir de dire je t’aime en regardant vers le ciel. Pour que ni Karim ni sa musique ne tombent jamais dans l’oubli.

Josée Lapointe, La Presse

Une bière sur la tête avec Luke Combs

PHOTO CAROLINE GRÉGOIRE, ARCHIVES LE SOLEIL

Luke Combs

On s’attarde souvent aux concerts spectaculaires, montés avec de grands moyens. Le chanteur de country américain Luke Combs, qui a rempli le Centre Bell jusqu’aux derniers rangs des gradins en novembre, n’a eu besoin d’aucun artifice pour emballer la foule et offrir un concert mémorable. Il a chanté dans le plus grand amphithéâtre en ville comme il l’aurait fait dans un bar, en misant sur l’essentiel : ses chansons simples et accrocheuses, sa voix pleine d’âme et une attitude humble, empreinte de gratitude pour le succès qui lui est tombé dessus. Les concerts de cette envergure où l’atmosphère est aussi conviviale sont rares. Ça chantait, ça dansait et ça souriait, du début à la fin. Même quand, au dernier rappel, suivant l’exemple de Luke Combs, de nombreux spectateurs ont lancé leur verre de bière dans la foule : ça revolait des gradins au parterre ! Un enthousiasme pour le moins généreux vu le prix de ladite bière. On sentait le fond de tonne en sortant du Centre Bell. On avait aussi le cœur léger.

Alexandre Vigneault, La Presse

Le roy, la rose et le lou(p) aux Francos de Montréal

PHOTO PHILIPPE BOIVIN, ARCHIVES LA PRESSE

Ariane Roy, Thierry Larose et Lou-Adriane Cassidy

Le titre du spectacle présenté en juin à l’extérieur, Le roy, la rose et le lou(p), était un clin d’œil à deux concerts événementiels du passé du même concept, celui de réunir trois des auteurs-compositeurs-interprètes les plus doués et les plus inspirés de leur génération (et enfin des femmes !), soit Ariane Roy, Thierry Larose et Lou-Adriane Cassidy, qui sont aussi de grands amis qui s’apprécient autant qu’ils s’admirent. Vibrants interprètes, instrumentistes aguerris, ils ont une aisance décomplexée et magnétique sur scène, mais aussi un catalogue de grandes chansons : Les amants de Pompéi, Entre mes jambes, Tu voulais parler… Une vive flamme musicale brûle en eux si bien que leur spectacle, à la hauteur de ses ambitions historiques, fait désormais partie des annales des Francos de Montréal. La reine a dominé le centre-ville, la rose a éclos dans toute sa splendeur alors que la louve a hurlé dans la nuit. On remet ça dans 10 ans ?

Émilie Côté, La Presse

Généreux Nick Cave

PHOTO ANNA KURTH, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Nick Cave

Pour avoir assisté à de nombreux spectacles de l’icône rock, on savait Nick Cave généreux. Et Montréal a été choyé par l’Australien en 2022. En plus de son exposition Stranger Than Kindness présentée en exclusivité nord-américaine durant six mois dans la métropole, le chanteur a offert non pas un, mais deux spectacles en deux soirs à la salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts. Accompagné de son comparse de toujours, le barbu et excentrique Warren Ellis, il a chanté avec véhémence l’ensemble de l’album Carnage, a jasé avec le public et s’est payé la tête d’un spectateur arrivé en retard – impardonnable quand on a un billet au centre de la première rangée ! Une soirée construite en crescendo, avec des classiques en fin de parcours en provenance du répertoire de son groupe, les Bad Seeds. Au rappel se sont enchaînées les chansons Hollywood et Jubilee Street devant des spectateurs qui en voulaient encore plus… Ce qui fut fait ! Deuxième rappel, donc, avec Into my Arms et Ghosteen Speaks en formule cabaret. Les fans sont repartis avec le sentiment d’avoir vu un Nick Cave en grande forme. Ce qui était le cas.

Philippe Beauchemin, La Presse

Rendez-vous dans les petits lieux

PHOTO POONEH GHANA, FOURNIE PAR 4AD

Dry Cleaning

Pleurer toutes les larmes de son corps pendant la très païenne cérémonie sacrée de Nick Cave à Wilfrid-Pelletier ? Se faire pulvériser les tympans par Judas Priest à la Place Bell et se promettre de ne plus jamais laisser ses bouchons à la maison ? Entrer dans la transe de Sons of Kemet au Corona comme on entre en religion ? Ces concerts figureront au palmarès des moments parfaits de 2022. Celui qui se distingue des autres en est toutefois un plus modeste, survenu au Fairmount en mai avec la formation post-punk anglaise Dry Cleaning, alors que toute la ville commençait à respirer plus à l’aise. Sur scène, le guitariste Tom Dowse empilait les couches de larsen, pendant que la chanteuse Florence Shaw peinait à conserver son habituelle mine impassible, trop émue par les corps qui s’entrechoquaient doucement devant elle. À l’heure où les géants de la billetterie semblent avoir élu les usuriers comme parangons moraux, gardons en tête que les meilleurs spectacles se produisent souvent dans de petits lieux – encore plus petits que le Fairmount. En 2023, rendez-vous dans les cabarets feutrés, les bars mal éclairés, les sous-sols d’église pas assez chauffés et sous les belvédères du parc de votre quartier.

Dominic Tardif, La Presse

RY X au Théâtre Corona

PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE L’ARTISTE

Ry X

Il y a de ces moments où la musique semble arrêter le temps. Ça peut être à l’écoute d’un disque, d’une chanson. Ça peut aussi être pendant un concert, comme ce fut le cas durant la prestation de l’Australien Ry X au Théâtre Corona de Montréal. En cette fin de septembre, l’auteur-compositeur-interprète a figé le temps en créant un moment tout en délicatesse, envoûtant. Ses chansons, ancrées dans un folk électro qui tire sur la pop planante, sont le parfait matériau pour qu’en concert, on se retrouve enveloppé d’une douceur apaisante. C’est ce qui s’est passé ce soir-là. Le Théâtre Corona semblait hypnotisé par la présence et la voix de Ry Cuming, fabuleux chanteur. Nous avons eu les larmes aux yeux, les frissons nous ont rarement quittés. C’était l’un de ces moments que l’on chérit, auquel on repense souvent, reconnaissants d’avoir été là.

Marissa Groguhé, La Presse

Gros Mené aux Francos de Montréal

PHOTO JACQUES BOIVIN, FOURNIE PAR LAZY AT WORK

Gros Mené

On l’avoue d’emblée, l’époque où l’on écoutait les concerts debout près de la scène est loin derrière nous. Mais il fallait faire une exception pour Gros Mené, qui faisait aux Francos la rentrée montréalaise de sa tournée Pax et Bonum, album rock de l’année aux derniers GAMIQ et première offrande en 10 ans pour le projet stoner de Fred Fortin. C’est donc debout au centre du parterre du Club Soda que l’on a fait le plein d’anticorps rock, administrés par des musiciens gonflés à bloc – Olivier Langevin, Tonio Morin-Vargas et Robbie Kuster accompagnaient Fortin sur scène. Sans compter que le quatuor était précédé par les jeunes prodiges de zouz, qui ont chauffé les planches avec une prestation sans faille, malgré la complexité de leur répertoire. Bref, du rock bien vivant, énergisant à souhait pour démarrer l’été en trombe.

Pierre-Marc Durivage, La Presse