On parle souvent des valeurs gasconnes de D'Artagnan et des trois mousquetaires, Athos, Porthos et Aramis. Mais comment s'expriment ces valeurs aujourd'hui? Nous avons demandé à Philippe Thibault-Denis, Éric Bruneau, Guillaume Cyr et Benoît McGinnis de se prononcer sur l'amitié, la bravoure, la séduction et la virilité.

L'AMITIÉ

«Un pour tous et tous pour un.» Cette devise des Trois mousquetaires résume le lien d'amitié et de loyauté qui unit les quatre héros d'Alexandre Dumas. Une devise que Guillaume Cyr a faite sienne. Le hasard a fait qu'il partagera la scène avec ses trois meilleurs amis: Éric Bruneau, Mani Soleymanlou et Jean-Moïse Martin - avec qui il a présenté cette année la pièce Ils étaient quatre. «Ça fait huit mois qu'on travaille ensemble!, se réjouit-il. Honnêtement, mon amitié avec eux me rattache à la terre. C'est ma deuxième famille.» Impossible de ne pas faire le parallèle entre l'amitié des trois mousquetaires et celle vécue par des comédiens qui partagent la scène. «On crée des liens en travaillant ensemble», constate la recrue Philippe Thibault-Denis, qui défendra le rôle de D'Artagnan. Benoît McGinnis ajoute le terme «respect» à celui d'«amitié». «Le fait d'accepter les autres comme ils sont est au coeur de l'amitié, estime-t-il. D'ailleurs, les trois mousquetaires sont très différents les uns des autres. Ils doivent apprendre à vivre ensemble.»

LA BRAVOURE

Ils n'ont pas froid aux yeux, les mousquetaires de Dumas. Et ils n'hésitent pas à mettre leur vie en jeu lorsqu'il s'agit de défendre leur honneur! Qu'est-ce qui se rapproche de la bravoure aujourd'hui? «On peut démontrer un certain courage dans nos choix professionnels ou même dans la décision d'avoir un enfant», estime Guillaume Cyr. Évidemment, ces petits «actes de bravoure» ne mettent pas nos vies en danger. «On peut être brave en sauvant quelqu'un de la noyade, mais ça demeure exceptionnel, admet Benoît McGinnis. Dans la vie de tous les jours, ça s'exprime de façon plus subtile.» Donner une opinion politique, voilà un acte de bravoure!, renchérit Guillaume Cyr. «Parce que les artistes sont nombreux à avoir peur de perdre des fans sur Facebook.» «On peut aussi vouloir rester neutre, lui répond McGinnis. Ce n'est pas nécessairement de la bravoure.» Est-on plus lâche aujourd'hui? «En tout cas, on est plus individualiste, tranche Philippe Thibault-Denis. On est moins porté à défendre des causes collectives.»

LA SÉDUCTION

On le sait, d'Artagnan est un chaud lapin. Porthos et Aramis aussi. «À l'époque, on se faisait courtiser, nuance Guillaume Cyr, mais on n'a jamais autant été dans la séduction qu'aujourd'hui. Il n'y a qu'à voir le nombre d'émissions de téléréalité sur le sujet. En plus, on fait un métier où on est à fond dans la séduction. Tout est basé là-dessus. On parle d'arme de séduction massive!» «Paradoxalement, note Benoît McGinnis, on n'a jamais été aussi seuls...» «On existe individuellement à travers le regard des autres, c'est tout le paradoxe du selfie», ajoute Éric Bruneau. Philippe Thibault-Denis croit aussi qu'aujourd'hui on séduit pour se valoriser soi-même. «Dans le roman de Dumas, les personnages sont plus dans la conquête. Le duc de Buckingham séduit la reine parce que c'est la reine, pas pour se magnifier lui-même! Il y a un abandon de soi dans l'acte de séduction. Ce n'est peut-être plus le cas aujourd'hui.» «La rareté crée l'intensité, ajoute Éric Bruneau. À l'époque, ils s'écrivaient des lettres; il fallait l'écrire, l'envoyer, attendre la réponse. Aujourd'hui, on se texte tout ça en quelques secondes.»

LA VIRILITÉ

On évoque le sang bouillant de D'Artagnan, mais comment nos quatre amis expriment-ils leur virilité aujourd'hui? «C'est sûr que la définition d'un homme viril a changé, croit Philippe Thibault-Denis. L'égalité homme-femme y est pour beaucoup.» N'empêche, quand il enfile son costume et ses bottes de mousquetaire, Benoît McGinnis sent monter en lui son instinct animal! «Quand on se bat à l'épée durant les répétitions, ça revient, on a le goût de fesser!» En fait, c'est une question de confiance, croit Éric Bruneau. «La virilité, c'est assumer qui on est, être bien dans son corps et avec soi-même. Ça n'a rien à voir avec l'homme des bois ou l'homme qui fesse.» «Les gars qui se battent à l'épée dans Les trois mousquetaires, on les trouve virils, mais deux gars qui se tapent dans un bar, on va dire qu'ils sont cons, fait remarquer Guillaume Cyr. La virilité, c'est aussi l'indépendance d'esprit, l'intégrité, la discrétion, mais il faudrait peut-être demander aux filles...»

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Au TNM du 16 juillet au 16 août, dans le cadre du Festival Juste pour rire.