Les hommes bleus sont de retour! Le trio d'acteurs et percussionnistes qui parcourt le monde depuis 25 ans sera au Théâtre St-Denis ce soir pour une courte série de spectacles. La Presse s'est entretenue avec l'Allemand Bernard-Felix Haas, Blue Man depuis six ans, qui décode l'ADN de ces bêtes de scène.

Comment décrire un Blue Man?

«Il n'est ni tout à fait humain ni tout à fait extraterrestre, mais il incarne une part de nous. La part la plus espiègle qui s'exprime librement, sans tenir compte des conventions, explique Barney Haas, un des acteurs et percussionnistes de Blue Man Group, acquis par le Cirque du Soleil il y a 18 mois. C'est un peu l'enfant qui sommeille en nous, donc il a un côté naïf, mais en même temps, il a une sagesse à l'épreuve du temps.» À retenir: un Blue Man ne parle jamais ni ne sourit, façon Buster Keaton. «Évidemment, nous sommes des humains, concède Barney Haas. Donc si un Blue Man regarde un peu trop longtemps ses chaussures, il y a de bonnes chances qu'il réprime un rire...»

Bleu comme le ciel

S'il est bleu, c'est pour traduire son «ouverture», indique Barney Haas. Comme le ciel ou l'océan, illustre-t-il. «Le Blue Man ne juge pas, c'est une version libre de nous-mêmes, qui vit dans une réalité augmentée où tout a un sens. Par ailleurs, s'il était rouge, on pourrait croire qu'il est diabolique ou dangereux; s'il était vert, on dirait que c'est un extraterrestre et s'il était jaune... bien, il ne serait pas beau!» La métamorphose dure environ une heure. Après s'être collé un bonnet en latex (pour cacher ses cheveux), il se badigeonne la tête et le cou d'une peinture bleue «très grasse». «C'est comme plonger la main dans un pot de Nutella et se recouvrir le visage», détaille Barney Haas. Pour les plus curieux, c'est avec de l'huile d'avocat qu'il se démaquille. Une huile «rajeunissante», constate le principal intéressé...

Musicien à la base

La plupart des Blue Men ont une formation musicale, même si ce n'est pas obligatoire. Bon nombre d'entre eux sont des joueurs de batterie. C'est le cas de Barney Haas, qui faisait les beaux jours d'un groupe rock en Allemagne avant de se joindre à la troupe, qui compte six spectacles permanents (New York, Boston, Chicago, Orlando, Las Vegas et Berlin), en plus de ses spectacles de tournée. «C'est de la musique tribale, explique l'homme bleu. De la musique percussive crue inspirée du taiko japonais [entre autres du groupe Kodo], que l'on joue avec des instruments insolites comme des tuyaux en PVC.» Ils sont accompagnés sur scène par quatre musiciens, qui jouent entre autres d'une cithare électrique et qui multiplient les effets de bruitage.

Un regard de braise

Comme les hommes bleus ne parlent jamais, ils communiquent beaucoup avec les yeux. Ceux de Barney Haas, ronds comme des boules de loto, sont d'ailleurs très expressifs. «C'est notre mission première, résume-t-il: créer une connexion entre nous et avec le public. C'est notre curiosité qui passe par nos yeux. Entre nous, il y a quelque chose de l'ordre de la télépathie. On sait toujours ce que l'autre est en train de penser. Avec le public, on va établir un contact, mais le Blue Man demeure mystérieux», explique l'homme de 33 ans. Un des défis de Barney Haas est de ne pas jouer. «On incarne un personnage qui voit et qui ressent les choses au moment présent, sans filtre. C'est d'abord un état d'esprit.»

1 parmi 1000

Barney Haas est l'un des nombreux acteurs de Blue Man Group, qui compte entre 50 et 60 hommes bleus dans le monde. Le processus de sélection est ouvert à tous et il n'y a officiellement aucun préalable requis, mais au bout du compte, il y a très peu d'élus. Environ 1 sur 1000. Une fois choisie, la nouvelle confrérie des hommes bleus est formée à New York pendant deux mois avant de faire la tournée des six spectacles permanents de la compagnie. «Après, on travaille en trio avec les mêmes personnes», nous dit Barney Haas, qui fait maintenant partie des équipes de tournée. «J'adore voyager, explique-t-il, et ce qui me fascine, c'est que si on mettait tous les publics de toutes les cultures dans la même salle, ils nous comprendraient tous!»

Blue Man Group, du 15 au 17 février au Théâtre St-Denis.