«Pense aux initiales d'une personne que je ne pourrais pas connaître. Pendant ce temps, serre mon bras avec ta main», m'ordonne Bedros «Spidey» Akkelian, étudiant à Concordia en psychologie, adepte de magie et de mentalisme.

Je pense «M.G.»

En récitant l'alphabet et me regardant dans les yeux, Bedros devine rapidement la réponse à son énigme. Quelques instants plus tard, il me fait aussi remarquer que son bras porte une marque en forme de «M».

Étrange...

«J'utilise des techniques de psychologie qui me permettent de comprendre comment pense la personne en face de moi. Je n'ai pas de pouvoirs surnaturels», insiste Bedros, avant de retourner auprès de ses confrères magiciens qui ont passé les trois derniers jours dans l'hôtel Alt à s'échanger des trucs et astuces.

L'un d'entre eux est Jason England, spécialiste de la tricherie aux cartes. Les casinos l'engagent pour repérer les petits malins à la table de poker. Il exécute devant mes yeux une agile arnaque qui permet au dealer de tourner le jeu à son avantage. Désolée, Jason, mais je n'ai pas du tout pigé comment tu avais transformé le roi de coeur en as de carreau.

«Le plus grand magicien au monde»

Pendant le court, mais déconcertant spectacle de micromagie du new-yorkais Éric DeCamps, j'ai aussi repéré dans la salle la présence du magicien Luc Langevin, vedette de la série Comme par magie, à Artv. Dans cette série, Langevin l'illusionniste aborde les gens dans la rue et enfreint les lois de la nature avec des objets quotidiens. Pas de verre truqué ni de baguette magique. Rien dans les mains, rien dans les poches...

Le jeune homme de 26 ans, qui fait un doctorat en physique, m'a confié son ambition de devenir le «plus grand magicien au monde».

«La magie m'intéresse depuis que j'ai 6 ans. Je suis quelqu'un de curieux, qui aime comprendre les choses, c'est aussi ce qui m'a attiré vers la physique. Ça prend un esprit logique pour aborder les tours de magie, cela ressemble au travail d'un ingénieur», explique le jeune magicien, qui attribue à Harry Potter l'engouement pour la magie d'une jeune génération.

Dans le sillon des Criss Angel

Sophie-Anne Vachon, du comité organisateur de la Convention nationale de magie, est l'une des très rares femmes dans la communauté des magiciens.

«Officiellement, je suis une assistante», précise la jolie brunette, passionnée de l'histoire de la magie et des «sideshows». Avec son fiancé Marc Trudel - ancien magicien officiel du musée Juste pour rire - Sophie-Anne a conçu plusieurs numéros périlleux. La fille qui se fait trancher en deux dans la boîte, c'est elle...

«Les Criss Angel et David Blaine ont rajeuni l'image du magicien en tuxedo et chapeau haut de forme», dit l'éloquente jeune femme, qui se fait régulièrement attacher puis zigouiller en deux, devant des publics d'écoliers...

«En Europe, les magiciens ont droit à une plus grande reconnaissance. Des grandes maisons comme Cartier ou Hermès font appel à leurs services pour présenter leurs produits. Alors qu'ici, je pense que les producteurs n'estiment pas le grand nombre d'heures de travail que demande la création d'un show de magie.»

Pendant 72 heures, magiciens amateurs et illustres illusionnistes se sont épatés les uns les autres, en faisant disparaître des oeufs, défiant la gravité et rivalisant de dextérité. Un univers en marge, fait d'esprits scientifiques, de showmen et petits vites.

Comme Paul Lumbden, ado de 16 ans d'Ottawa, qui a fait le voyage à Brossard avec ses parents qui ont renoncé à comprendre les trucs de fiston. «Je lis les pensées et je peux faire des trucs avec des cartes à jouer», m'a révélé le timide garçon, qui a été initié à la magie dans un camp de vacances.

«Pige une carte, montre-moi la pas...» C'était le 10 de trèfle. Sans baguette magique, ni poudre de perlimpinpin, il l'a devinée.

Bravo petit. L'avenir t'appartient, et Vegas n'attend que toi...