Peter Peter a décidé de marier sa mélancolie aux sonorités électros hyper dansantes dans son nouvel album Éther, son cinquième en carrière et le premier qu’il lance depuis son retour au Québec.

« Ça faisait longtemps que j’avais le fantasme de faire quelque chose de radicalement électro », dit l’auteur-compositeur-interprète, qui a attendu des années avant d’être satisfait de son talent de producteur.

Changer de rythme

L’électro et le mélange de textures faisaient déjà partie de son univers. Mais le chanteur, qui fait rarement les choses à moitié, avait envie d’aller encore plus loin. « J’ai fait un zoom, un plan rapproché sur ce que j’avais déjà exploré, plutôt que de ratisser large. » Il s’est investi dans la création d’Éther en « bidouillant » sur ses différents appareils, synthés, séquenceurs, boîtes à rythmes, et bien sûr son ordi. Exit donc la guitare, mais aussi la construction traditionnelle de chansons.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Peter Peter

Il fallait casser certaines habitudes de songwriting. Je m’octroie une liberté que je n’avais pas sur les autres albums.

Peter Peter

Ainsi il s’est forcé à se délester de la forme couplet-refrain, a laissé ses chansons respirer en donnant plus de place à la musique, a joué avec la durée, changé de rythme ou de tonalité à l’intérieur d’une même pièce.

« Quand je l’ai terminé, je l’ai envoyé à quelques personnes, dont Pierrick Devin, avec qui j’ai déjà travaillé. Il m’a dit : “J’ai été surpris, c’est pas mal plus club que je pensais.” C’était ça que je voulais ! » Celui qui distille son spleen sur tous ses albums depuis 2011 le confesse : ce qu’il désirait, c’était faire danser les gens. Et il estime que « l’électro danse music et la mélancolie forment un beau partenariat ».

Extrait de la pièce Ciel, de Peter Peter
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« Et je ne suis pas un clubbeur ! Mais cette puissance de faire danser les gens, cet exutoire, c’est cool. J’aime mieux être de ce côté que du côté de la piste de danse. »

Pour briser le moule de la chanson, il lui fallait aussi « accepter de ne pas chanter toutes les deux secondes ». « La langue vient toujours casser le beat un peu. Une chanson comme Fcking poésie, au début j’avais du texte et du texte, finalement j’ai gardé une phrase ! Et c’est mieux comme ça. »

Extrait de la pièce Fcking poésie, de Peter Peter
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Il y a évidemment des morceaux avec un peu plus de paroles, et on retrouve la plume délicate et la poésie évanescente de l’auteur-compositeur, qui n’a pas voulu un album trop narratif. C’est même seulement à la fin que le titre, Éther, s’est dessiné.

« Depuis le début, mon mandat est de faire de la musique mélancolique, mais aussi de réconforter les gens. Et si ça se trouve, de les anesthésier et leur faire oublier la souffrance humaine. Mais autant j’ai été dogmatique avec le langage électronique, autant je ne l’ai pas été dans les thèmes. Le seul fil rouge était... de ne pas casser le fun ! »

Extrait de la pièce On a besoin d’amour, de Peter Peter
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Retour

Après avoir vécu huit ans en France, Peter Peter est revenu au Québec il y a trois ans. Il s’est d’abord installé en appartement à Montréal, avant de s’acheter une maison l’automne dernier à Québec, près de la rivière Saint-Charles. « Partir de la France a été difficile, il a fallu tirer sur le pansement. Mais là ma vie à Québec me plaît. À Montréal, des fois je me disais : pourquoi j’ai quitté l’Europe déjà ? » Il lui fallait une valeur ajoutée, qu’il a trouvée dans la nature à proximité, le calme et l’espace de sa nouvelle maison, où il a pu se construire un grand studio.

« Mais ce n’est pas là que l’album a été créé. Je l’ai surtout fait entre mes appartements exigus de Paris et de Montréal. Je l’ai longtemps trimballé sur un disque dur. » Quand Guillaume Guilbault a été intégré comme coréalisateur et que le projet est passé « à la vitesse supérieure », Peter Peter, qui avait déjà tout conceptualisé, savait où il s’en allait.

La création aura donc été « moins laborieuse » que pour ses précédents albums, mais le musicien a quand même vécu des moments très difficiles, quand un virus lui a fait perdre une grande partie de son ouïe du côté gauche.

Ça me faisait mal juste entendre de la musique ou écouter un film. Ça me brisait le cœur, et j’ai pensé tout arrêter.

Peter Peter

Il a passé plusieurs mois sans travailler et était même prêt à vendre tout son matériel ! Mais si sa perte d’ouïe est maintenant permanente, il a retrouvé le goût de faire de la musique. « La rémission psychologique a été difficile. Maintenant je mets des bouchons quand je vais dans des concerts, je fais gaffe. » L’épisode lui a aussi fait réaliser que s’il était obligé d’arrêter la musique, il n’avait pas de passion de remplacement et qu’il aurait avantage à être moins monomaniaque.

Extrait de la pièce Danses-tu dehors, ce soir quelque part, loin de ton téléphone ?, de Peter Peter
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Peter Peter, qui vient d’avoir 40 ans, va bien. Il est retourné récemment à Paris en promo, et il est revenu en paix, convaincu que déménager était la bonne décision. Et il sort un album, et « pas n’importe quel » : il en rêvait depuis Noir Eden en 2017. Grâce à lui il espère voyager – « J’aimerais ajouter de nouveaux territoires, aller en Allemagne et au Royaume-Uni, où je puise beaucoup mon inspiration » –, mais aussi renouer avec le public québécois.

« Je me suis fait rare ici. J’ai envie que ce soit mon marché principal, mais aussi de vivre de nouvelles expériences. Je ne dirai non à rien. » Il prépare aussi une tournée où il sera entouré d’un band, et a très hâte de sortir pour aller à la rencontre du public.

« Je suis allé au bout de l’ordi. Je suis content de mon album, mais post-pandémie et tout, j’ai envie de vivre dans le monde réel pendant qu’il existe encore. »

Éther

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