Dans Entre le meilleur et le pire, un artiste revisite, une chanson à la fois, les sommets et les vallées de son œuvre. Premier candidat : Dumas.

La chanson que tu n’en peux plus de jouer

J’ai choisi Miss Ecstasy [2001], même si ça me fait plaisir de la jouer, parce que les gens ont une relation avec cette chanson-là qui me dépasse. Exemple : l’été passé, à Dolbeau, j’ai compris que Miss Ecstasy a tourné pendant des années dans un bar du coin et ça fait que Miss Ecstasy a une dimension exceptionnelle là-bas. On ne pouvait pas ne pas la jouer.

Mais quand je la joue, il faut que je me répète que je revisite le kid que j’étais à 18 ans. Ça paraît dans le texte que je sortais d’Arts et lettres au cégep. Je ne m’étais pas encore trouvé.

La chanson que tu préférerais ne pas avoir enregistrée

J’aurais pu en choisir quelques-unes de L’heure et l’endroit [2012], mais j’y vais avec Jamais de trêve. [Il lance la chanson sur son ordinateur et grimace.] C’est terrible, ce que tu me fais subir !

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Dumas, en mai 2001

J’étais dans une drôle de zone lorsque j’ai fait cet album-là. C’était mon retour avec Carl [Bastien, réalisateur du Cours des jours, 2003]. Je pensais que la magie allait opérer, mais la magie ne peut pas opérer quand les tounes ne sont pas là. On avait fixé une date de sortie, mais on aurait dû prendre un an de plus. C’est bizarre, mais après 10 ans de succès, j’ai comme perdu confiance. Quand je réécoute l’album, je l’entends. Il y a une nouvelle génération qui montait et je cherchais ma place. Jamais de trêve, c’est une tentative The Kinks en français pas très réussie.

Ta chanson la plus bizarre

Un jour, on passe par Québec, et à Québec, je mets tout le temps CHYZ, la radio universitaire. À un moment donné, quelque chose joue et je me dis : « C’est cool, ça, je pense que j’ai ça chez nous sur un disque. » Puis là, j’allume : c’est une de mes tounes, un des instrumentaux des EP ! [En 2008 et 2009, Dumas a enregistré quatre EP. ] Je ne me rappelle plus c’était lequel exactement, peut-être 11-40.

La chanson que tu aimes plus maintenant que lorsque tu l’as créée

Une journée parfaite [2014]. Quand je l’ai écrite, je n’étais pas habitué à visiter cette zone-là, à parler de paternité. Aujourd’hui, avec la quarantaine, j’ai beaucoup moins de misère à aller dans l’intime. C’est aussi l’album sur lequel je commençais à retrouver ma confiance, mais je me cherchais encore.

Ton plus beau moment aux Francos

Chanter avec Bashung en 2005, c’est dur à battre. L’autre beau souvenir, c’est mon premier Spectrum, en 2003, quelques mois après la sortie du Cours des jours. Pendant Linoléum, ça s’était mis à chanter spontanément. C’était la première fois que je sentais que les gens connaissaient vraiment une de mes chansons. Et c’est là que je me suis dit : OK, ça se pourrait, ça pourrait marcher.

PHOTO IVANOH DEMERS, ARCHIVES LA PRESSE

Dumas devant La Tulipe en 2004

L’artiste pour qui tu aimerais le plus écrire une chanson

J’aimerais travailler avec Régine Chassagne, en français.

Ta chanson que tu aimerais le plus entendre dans la bouche d’un autre

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Je trouve que Quelque part [2009] n’a pas eu le succès qu’elle aurait pu avoir. La version sur l’EP [Rouge] est cool, mais pas top, parce qu’on faisait les choses vite, et dans la version de Traces, j’ai enlevé une mélodie que j’aurais dû garder. J’ai toujours pensé qu’Isabelle Boulay pourrait la chanter. [Rires] Je ne lui ai jamais dit.

Ta meilleure chanson méconnue

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Atlantica [2009]. François Plante [son bassiste] n’arrête pas de me dire que je devrais monter un show juste avec des obscurités.

La chanson dont tu es le plus fier

Leitmotiv [2023], parce qu’elle représente le courage que ça m’a pris pour demander à Philippe Brault [réalisateur de son plus récent album, Cosmologie] de venir écouter mes démos. On ne se connaissait pas avant de se croiser sur la montagne, pendant qu’on courait tous les deux, durant la pandémie. Bon, Philippe, lui, dit qu’il m’avait laissé un message sur mon répondeur à l’époque de L’écrivaine [2001] pour me proposer de jouer de la basse avec moi et que je ne l’avais jamais rappelé. [Rires] Pour moi, c’est le Rick Rubin québécois.

Il y a aussi Chicago [2023]. Je me suis assis sur la chaise Michel Rivard [Dumas loue un local de répétition jadis occupé par Michel Rivard, qui y a abandonné un tabouret sur lequel est inscrit son nom] et elle est sortie d’un jet. Ça faisait longtemps que ça ne m’était pas arrivé.

La phrase tirée d’une de tes chansons qui te représente le plus

[Dans L’ailleurs, 2023] « Peut-être que je ne suis qu’un rêveur, qui sait ? » Parce que ça décrit bien comment je suis lunatique au quotidien, mais aussi parce que le rêve habite toujours ma vie de créateur. Je n’ai pas encore l’impression d’avoir écrit ma meilleure chanson.

Dumas sera aux Francos le 15 juin, sur la scène Loto-Québec, à 20 h.

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