Le projet collectif C’est notre histoire, album hommage à Renée Martel auquel contribuent une dizaine d’artistes, sera porté sur scène dimanche, dans le cadre des Francos. La Presse a rencontré certains artisans du spectacle durant une journée de répétitions.

L’ambiance aux studios Showmedia, rue Parthenais, fait très Woodstock. Ce sont les mots de Laurence Lebel, la fille de Renée Martel, lorsqu’elle nous accueille là où son projet d’hommage à sa maman est en train de se transformer en grand spectacle.

Laurence a réuni 12 artistes sur un album qui reprend des chansons de Renée Martel, décédée en 2021. De ce disque naît maintenant un concert, auquel participent Alexe Gaudreault, Antoine Corriveau, Elliot Maginot, Étienne Coppée, Fanny Bloom, Gab Bouchard, Les sœurs Boulay, Pilou, Saratoga et Tire le coyote. Pour compléter le groupe en beauté, Cindy Bédard et Mara Tremblay, qui ne participent pas au disque, seront aussi du spectacle.

Rassembler tout ce beau monde, pour trois jours de répétitions et pour le concert ensuite, « ça relève du miracle », lâche le musicien et réalisateur Pilou en entrevue.

On a l’heureux problème d’avoir des artistes super talentueux, en demande, qui sont aux quatre coins du Québec tout le temps.

Laurence Lebel, fille de Renée Martel

L’idée de réunir cette « belle brochette » pour un spectacle a germée presque en même temps que celle de faire l’album C’est notre histoire. Pour faire vivre ce bel hommage plus longtemps, plus vivement, quoi de mieux qu’une rencontre directe avec le public ? Les Francos, « c’est le plus bel endroit pour le faire », estime Laurence.

Rassemblement familial

La répétition commence. Après quelques tentatives, l’auteur-compositeur-interprète et réalisateur Pilou, qui aujourd’hui tient également le rôle de metteur en scène et de directeur musical, parvient finalement à rassembler tous les artistes derrière leur micro. Oui, l’ambiance est « woodstockienne », un peu bohème, et on travaille à la bonne franquette. Mais on travaille pour que ce spectacle soit à la hauteur de celle à qui on rend hommage.

Il y a de l’improvisation calculée dans ce spectacle, que le talent des artistes présents dans la salle rend possible.

Pilou, avec flegme et naturel, dirige ses artistes vedettes et les musiciens qui les accompagnent pour créer une belle cohésion. « Ça fait longtemps que je n’avais pas fait de gros show comme celui-là, commente-t-il. Être sur scène [il joue et chante aussi] et diriger cette belle gang-là, c’est un retour aux sources. »

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Pilou en répétition

Mis à part Laurence Lebel, qui est idéatrice et conceptrice et qui travaille aussi à la mise en scène de ce spectacle en l’honneur de sa mère, Pilou est la personne la plus proche du projet. C’est lui qui a réalisé l’album l’an dernier, en plus d’y interpréter la pièce C’est mon histoire.

Écoutez C’est mon histoire

Après quelques prouesses pour concilier les horaires de tout le monde, des séances d’enregistrement ont eu lieu l’hiver dernier. Pour Pilou, réaliser cet album consistait à « mettre tous les éléments en place pour que tout le monde soit bien, se sente en confiance, ait envie de se dépasser et de jouer ».

PHOTO ANDRÉ PICHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Renée Martel, en 2018

Il fallait que l’ambiance soit bonne, « familiale », pour créer une œuvre qui représenterait bien Renée Martel. Moins dans le son que dans l’esprit.

« Renée aimait beaucoup le cocooning ; pour elle, les musiciens, c’était la famille, dit Pilou. On a ramené ça sur l’album et on veut recréer ça avec le spectacle. Ce serait nono d’avoir Alexe [Gaudreault] et les sœurs Boulay side stage pendant qu’on fait une chanson où il y a plein de voix et qu’elles ne soient pas sur scène. Mon défi, c’est d’amener tout le monde à faire des chœurs, ramener l’esprit d’un jam dans un salon, avec tout le monde qui chante ensemble. »

Renée Martel et la génération qui lui succède

« Avec ce projet-là, je pense que Laurence ne cherchait pas à faire un hommage classique à Renée Martel, mais à revisiter ses œuvres, parce que Renée était super intéressée par la découverte de nouveaux artistes, dit Stéphanie Boulay. Nous, on avait une couleur country dans notre background à nos débuts, mais sinon, elle n’est pas allée chercher dans les évidences au niveau du style. »

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Elliot Maginot et Stéphanie Boulay

Ses chansons sont un terrain fécond pour des reprises comme les nôtres, elles sont faciles à approcher pour en faire notre propre truc.

Elliot Maginot

L’auteur-compositeur-interprète reprend la ballade Mon roman d’amour, « une de ses tounes les plus emo, qui se portait le plus à ce que je puisse en faire une version qui me ressemble ». Les sœurs Boulay, elles, interprètent sur le disque et sur scène la chanson Cowgirl dorée.

Mélanie Boulay, quand on lui parle de Renée Martel, pense à une anecdote qui lui a montré le rapport qu’entretenait l’artiste avec les plus jeunes. « Elle avait donné une entrevue à Deux hommes en or, juste après le scandale d’Hubert Lenoir qui s’était mis le trophée dans la gorge à l’ADISQ. On lui avait demandé ce qu’elle pensait de ça, elle qui a beaucoup de respect pour l’ADISQ, pour Félix Leclerc, pour l’institution. Elle avait répondu la meilleure chose que j’aurais pu entendre de quelqu’un de sa génération : elle disait que quand elle était jeune, c’est sa génération qui choquait les plus vieux. Leur mandat était de déstabiliser, de faire avancer les choses. Alors bien sûr qu’elle était choquée de voir [ce qu’Hubert Lenoir avait fait], mais elle ne s’attendait pas d’elle-même de comprendre. »

Renée Martel était en phase avec le temps qui passait, dans l’accueil de ceux qui lui succédaient. Sa fille avait l’habitude de lui faire découvrir de nouveaux artistes, comme Étienne Coppée, l’un des derniers qu’elle a pu lui faire connaître et qui reprend pour le projet la pièce Nos jeux d’enfants. Il était tout indiqué que des musiciens de la nouvelle génération reprennent ses titres pour lui rendre hommage.

Elliot Maginot sait à quel point Renée Martel était ouverte sur le monde, sur la musique des autres. « Je l’ai rencontrée sur le show hommage L’histoire de mes chansons, raconte-t-il. Après ça, on se parlait par courriel. Elle m’envoyait des vidéos YouTube, en me disant qu’elle me voyait bien reprendre telle ou telle chanson, ou juste pour me montrer des chansons qu’elle avait aimées. »

En répétition, lors du passage de La Presse, les artistes reprennent ensemble C’est mon histoire, avec Pilou au micro principal.

Avec quelques directives, tous trouvent leur place sur la chanson, qui, déjà, sonne magnifiquement bien dans le studio de Showmedia. Puis, c’est au tour d’Alexe Gaudreault de répéter Liverpool, suivie de Tire le coyote qui chante Si on pouvait recommencer. On plane entre la douceur et l’impact, on retrouve la touche distincte de chaque artiste derrière les mots et les mélodies qui ont appartenu à Renée Martel.

« L’album est très smooth, très contemplatif et vaporeux, observe sa fille Laurence. Mais le show qu’on va présenter, c’est rock, on a du fun, ça déménage et on amène quelque chose de plus que sur l’album. On a juste hâte de faire vivre les tounes. »

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