(Québec) Ça sent bon pour le nouveau spectacle d’humour à venir de Marc Dupré. En guise d’amuse-bouche à Ben voyons donc !, qu’il lancera au début de 2024, l’auteur-compositeur-interprète redevenu blagueur animait son tout premier gala comique en carrière au ComediHa ! Fest-Québec, qui s’ouvrait au Grand Théâtre, mardi soir. Et on ne peut que coller une belle étoile dans son cahier pour ce premier test très réussi.

La soirée – généreuse, de plus de trois heures avec entracte, captation télé oblige – a non seulement propulsé ce 24e festival de la Vieille Capitale sur une note heureuse, mais aussi confirmé que Dupré n’a pas perdu ce charisme et cet irrésistible aplomb qui lui avaient valu le titre de révélation du festival Juste pour rire à l’âge tendre de 21 ans, en 1994.

Notre homme en est conscient et il s’en amuse. La génération de ses trois enfants jeunes adultes ignore qu’avant d’entonner Nous sommes les mêmes et d’être coach à La voix, il assurait les premières parties de Céline Dion et de Patricia Kaas avec ses imitations légendaires (Bryan Adams, ça vous dit quelque chose ?) et faisait sensation au point de lancer trois spectacles, en 1996, 1998 et 2001.

Mardi, un Marc Dupré qu’on sentait d’abord nerveux, qui a gagné en confiance au fil de ses numéros, a fortement joué la carte de l’autodérision pour réinstaller son style caustique grand public, souvent baveux mais tout aussi gentil, qui plaira assurément à sa horde d’adeptes déjà séduits de 7 à 77 ans.

Bassin d’admirateurs qui le prend en photo chez Walmart et qui cherche à apercevoir la couleur de ses bobettes dans son cadre de porte à l’Halloween…

La voix hors champ qui l’a escorté à son entrée en scène avait d’ailleurs beurré épais à cet égard. « On a le cul béni de recevoir ce géant du Québec ! » ; « Celui qui a montré à Bryan Adams comment chanter comme Bryan Adams ! » ; « Ça fait 15 ans qu’on ne l’a pas vu faire des imitations vieilles de 20 ans ! »… Dupré a rétorqué qu’il en avait plutôt assez de la célébrité. Son tableau de bienvenue s’est conclu avec une colère improvisée d’Erik et Sonny Caouette, de 2 Frères, qui ont violemment brisé une guitare sur un gâteau géant, et avec l’apparition impromptue de Céline Dion, alias Véronique Claveau, qui allait refaire irruption sporadiquement en cours de spectacle.

PHOTO ERICK LABBÉ, LE SOLEIL

Marc Dupré et Véronique Claveau

Plus tard, pour couronner un segment sur sa nouvelle cinquantaine (franchie le 28 juillet, saluée par l’acquisition d’un bidet et qui frappe fort, semble-t-il), Marc Dupré a réalisé son fantasme de faire partie d’un boys band (le Marc Street Boys !) en s’époumonant avec des danseurs dans une chorégraphie typique du genre.

Fraîchement séparé d’Anne-Marie Angélil, notre hôte a aussi hurlé son exaspération de se faire demander des nouvelles de belle-maman Céline Dion (« Tout c’que je sais, c’est qu’est raide ! […] Quel gars icitte qui a appelé sa belle-mère dernièrement pour prendre de ses nouvelles ? […] Y’a tu quelqu’un qui a demandé à Céline comment moi j’allais ? ») et relaté des embryons d’anecdotes, pas méchantes pour cinq sous et remplies de tendresse, sur feu beau-papa René Angélil. Comme la fois où le regretté imprésario, apparemment malhabile au volant et pionnier dans l’utilisation du système Bluetooth, avait installé son appareil à l’envers.

Invités de tout acabit

Chez les convives de ce gala Dupré, ça piochait un peu dans tous les sens dans un enchaînement résolument sympathique, où se sont notamment succédé Richardson Zéphir, Stéphane Fallu, le drôle de personnage de « jeune vieux » Sam Vigneault, le déjanté duo composé de Mathieu Dufour et Pascal Cameron (dont la vignette kitsch aux allures de fiesta ensoleillée a même été rehaussée de la visite du Bonhomme Carnaval) et les non moins décapants Brick et Brack, célèbre tandem de « poètes radicaux » qui votent pour le fantôme de René Lévesque tant ils espèrent séparer le Québec du reste du Canada. Ils ont été interrompus dans leur « prise d’otage » des visiteurs de ComediHa ! par Gildor Roy, venu s’autoproclamer maître du monde.

En grande forme, Laurent Paquin a discouru sur la drogue qui l’effraie plus qu’elle ne l’enivre.

Petit nouveau dans le monde du stand up, Pascal Morrissette, fort de son expérience des émissions jeunesse, a redoublé d’énergie, allant jusqu’à se lancer par terre pendant sa tirade sur le thème du courage.

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Pascal Morrissette

Yannick de Martino a créé un effet bœuf dans la salle avec les lignes absurdes qu’on lui connaît. Le pauvre est aussi déçu de voir les bols en pain se désintégrer au lave-vaisselle que de constater qu’il ne peut habiter dans une « frite maison » en commandant une patate. Il y a pourtant des gens qui habitent des cottages dans des pâtés de maisons… (vous suivez ?).

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Yannick De Martino

Supplié par ComediHa ! d’intégrer à son menu des pastiches comme ceux d’antan, Marc Dupré nous a gâtés de calques des timbres de Mario Pelchat, Shaggy et Claude Dubois, entre autres. La véritable surprise a néanmoins été amenée par un spectateur recruté dans l’assistance, un dénommé David, qui a époustouflé avec une reproduction quasi parfaite d’une chanson de Laurence Jalbert. À trois, David, Marc Dupré et Véronique Claveau ont recréé avec brio l’illustre moment de Ginette Reno, Céline Dion et Jean-Pierre Ferland sur les plaines d’Abraham en 2008. C’était à s’y méprendre !

Le 24e ComediHa ! Fest-Québec se poursuit jusqu’au 26 août.