Depuis le début du confinement et jusqu’à récemment, Mathieu Dufour a piloté le Show-rona virus, rendez-vous quotidien en direct sur son compte Instagram. Son ascension vers le succès était déjà entamée, mais le projet a propulsé l’humoriste au rang de véritable vedette du web. Rencontre avec un personnage sans limites.

Mathieu Dufour vit des choses improbables tous les jours. C’est comme si la vie lui envoyait constamment du matériel pour ses blagues. Car c’est le genre d’humour qu’il présente : des anecdotes, récentes ou tirées de son enfance, qu’il raconte sur les réseaux sociaux ou sur scène. 

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« Quand je monte sur scène, je ne sais jamais ce que je vais dire », affirme celui qui a grandi en faisant de l’improvisation. « J’ai toujours des anecdotes qui n’ont pas de bon sens, je suis un aimant à anecdotes. J’en parle, et ça fait un show. Et si quelque chose se passe dans la salle qui me fait penser à un sujet intéressant, je pars là-dedans. Ça évolue au fil de la soirée. »

C’est sans texte sur lequel s’appuyer qu’il est à son « plein potentiel », dit Mathieu Dufour. Il l’a compris à l’École nationale de l’humour (ENH), où il s’est enrôlé « sur un coup de tête » après des études en arts et en technologies des médias au Cégep de Jonquière. « J’essayais d’écrire mes textes parce que c’était le seul modèle qu’on nous enseignait. Ça fonctionnait, mais je n’étais pas à l’aise. En parlant avec des profs, en essayant de trouver des solutions, j’ai découvert ma manière de travailler », dit le vingtenaire originaire du Saguenay–Lac-Saint-Jean.

Cette méthode le distingue et lui réussit. Il a notamment su attirer l’attention d’une certaine Véronique Cloutier, qui a fait une apparition quasi quotidienne durant ses Show-rona virus, sans même avoir déjà rencontré Mathieu en personne.

« Le feedback que je reçois de gens qui ont une opinion valide en humour est que j’offre quelque chose de rafraîchissant et d’unique », dit Mathieu Dufour.

De grandes ambitions

S’il est diplômé de l’ENH, « Math Duff » rechigne à l’idée d’être confiné dans la case « humoriste ». 

« Un humoriste, on voit ça comme quelqu’un qui écrit ses textes à la lettre près, qui prépare un show d’une heure et qui le présente pendant un an et demi, deux ans. Par rapport à ces critères, je ne me vois pas comme un humoriste parce que j’improvise à 100 % et que ce n’est pas mon but de faire un spectacle en tournée longtemps », explique Mathieu Dufour.

Lui fait plutôt dans le « divertissement ». Le terme est plus large. Tout comme ses ambitions, qui ne se restreignent aucunement à du stand-up. « J’ai plusieurs médiums, que ce soit la radio, les réseaux sociaux ou la scène, dit-il. J’ai le goût de jouer aussi. » 

Sur V, il a été un personnage récurrent de la première saison de l’émission L’open mic de…, avec son hilarant Jean Paupière, maquilleur des stars. Il a aussi participé à l’émission Colocs !, toujours sur V. 

Un jour, Mathieu Dufour veut animer son propre talk-show. Il a fait ses premières armes avec le Show-rona virus, qui a été un rendez-vous incontournable pour beaucoup de monde en confinement. En moyenne, 7000 personnes regardaient ses directs. Les vidéos restaient en ligne pendant 24 heures ensuite et accumulaient en moyenne 35 000 visionnements. Après une cinquantaine d’épisodes, son tout dernier « talk-show de fin de soirée » Instagram a rassemblé 15 800 personnes en direct.

Et dire que tout cela est parti d’un (autre) coup de tête, d’une impulsion sans grand dessein. « Le mercredi avant le confinement, j’ai atteint 60 000 abonnés sur mon compte Instagram. Chez moi, sur la toilette, j’ai vu ça et je me suis dit que j’allais faire un direct. Il y avait 1500 personnes ! », raconte Mathieu Dufour. Il a pris conscience des possibilités s’il lançait l’invitation pour un rendez-vous. Le direct du lendemain, à 21 h, a attiré environ 4000 personnes, dit-il.

Alors, il a continué. En invitant des amis humoristes, comédiens ou chanteurs à se joindre à lui, d’abord. « On improvisait, on avait du fun et le monde capotait, raconte Mathieu. Ça donnait un accès à ce monde-là que les gens n’ont pas habituellement. » Au fil des soirées, des invités comme Horacio Arruda, Laurent Duvernay-Tardif, Julie Snyder, Howie Mandel et Valérie Plante ont été de passage au Show-rona virus.

Fonctionner à l’instinct

Le Show-rona virus a été « une autre de mes niaiseries qui va trop loin », lance Mathieu Dufour à la blague. On décèle ici une certaine tendance. Il fonctionne « par instinct » et, souvent, ça lui réussit. « Mon mantra dans la vie, c’est de choisir de m’amuser, au quotidien », dit-il. 

Autre exemple : à la date limite des inscriptions à l’École nationale de l’humour, ses amis l’ont mis au défi de s’inscrire. Il l’a fait et a été admis. 

Chaque fois que j’embarque dans une aventure, je me dis que je vais le faire au mieux possible et en ayant le plus de fun possible.

Mathieu Dufour

À l’École de l’humour aussi, il a embarqué et en a retiré « une grande expérience ». Son bagage de l’ENH lui sert, mais son parcours en impro également. « D’abord pour développer ma répartie, qui est un muscle que tu dois travailler et qui est aussi ma plus grande force, affirme Mathieu. Mes amis humoristes me demandent si c’est épeurant d’aller sur scène sans avoir préparé de texte, mais non, parce que c’est ce que j’ai toujours fait dans la vie. Ça ne m’a jamais nui. »

Aussi, dit-il, monter sur scène « n’est pas comme aller à la guerre ». Il ne ressent pas de pression et voit plutôt l’exercice comme « un beau moment avec une grosse gang qui veut avoir du fun, comme une soirée entre amis, mais durant laquelle [il est] le seul à parler pendant une heure ! »

Son offre si singulière est sollicitée un peu partout ces derniers temps. Il participera notamment au festival HAHAHA, le 30 mai. « Je suis le seul show en direct, ça va un peu avoir la formule du Show-rona, décrit Mathieu Dufour. Juste pour rire m’a donné carte blanche pour que des invités viennent faire des prestations. »

Plus tard cet été, il se joindra à l’équipe de L’été, c’est fantastique. Si tout va bien, il montera sur la scène de la salle Wilfrid-Pelletier, de la Place des Arts, l’automne prochain pour son spectacle à guichets fermés, initialement prévu en juillet. 

Et ensuite ? Il verra en temps et lieu. « J’aime être dans un projet, le terminer et voir après ce qui me tente », dit-il. En tout cas, Mathieu Dufour a l’ambition de « tout faire ». Son talk-show, du jeu et, un jour, un spectacle au Centre Bell. « C’était une inside pendant le Show-rona virus, raconte-t-il. Il n’y a rien en branle. Mais je te garantis que, dans les prochaines années, je vais faire un Centre Bell. »