Ils ont réussi en affaires. Et ils ont envie de donner au suivant. Cela ne fait pas d'eux des mécènes pour autant. Ce sont plutôt des "anges" de la finance qui gardent les deux pieds sur terre et qui souhaitent aider les entrepreneurs à mener à terme leurs projets novateurs.

«Nous amenons de l'argent et de l'expertise», résume André Forest, 58 ans, vice-président du réseau d'anges financiers Anges Québec.

L'ex-président fondateur de Jobboom consacre lui-même trois jours par semaine à ce travail d'accompagnement. Il y trouve une grande satisfaction. «J'aime cette interaction avec les entrepreneurs, confesse-t-il. J'aime les voir en action avec du feu dans les yeux.»

Il semble que ce soit contagieux. En cinq ans, Anges Québec a réussi à recruter un nombre impressionnant de mentors aux poches relativement profondes. «Nous n'étions qu'une quinzaine à nos tout débuts, s'étonne-t-il. Nous sommes plus de 130 et nous recevons constamment des propositions de gens d'affaires expérimentés pour adhérer à notre organisation. C'est stimulant et c'est particulièrement agréable de savoir que nous pouvons avoir une influence sur la façon de communiquer nos connaissances.»

Réseaux de contacts

Parce que c'est effectivement ce dont ont besoin les entrepreneurs, des conseils judicieux et un solide réseau de contacts. «Il ne faut pas croire qu'un projet se concrétisera uniquement s'il est bien financé, précise le professeur Jean-Marc Suret, à la Faculté des sciences de l'administration de l'Université Laval. Il est important de se tourner vers des gens qui vont vous guider et vous donner des opinions éclairées. Les anges financiers peuvent très bien jouer ce rôle.»

Le professeur et chercheur dans le domaine du financement des PME insiste sur la qualité de l'encadrement quand vient le moment de lancer une entreprise, aussi prometteuse soit-elle dans les marchés qu'elle compte solliciter. «Trouver de l'argent est une chose, aller chercher de l'information et des conseils appropriés pour aller de l'avant en est une autre», résume-t-il.

Mais comment faire pour réussir à promouvoir son projet auprès d'un de ces mentors aguerris? «Il faut comprendre que les anges financiers vont généralement s'investir dans quelque chose qu'ils connaissent, répond le professeur sans détour. Ils vont embarquer s'ils croient que leur investissement sera rentable.»

Or, un trop grand nombre de projets de démarrage seraient mal montés. «Ce qu'il faut soumettre, conseille-t-il, ce sont des projets innovants qui présentent du potentiel dans des secteurs d'avenir, dans les technologies, par exemple. Je dis parfois à mes étudiants, pour faire image, qu'il ne faut pas chercher à obtenir du capital de démarrage pour s'ouvrir une pizzeria en faisant valoir qu'on aura des clients demain matin.»

Du succès

Il faut croire que le réseau Anges Québec est parvenu à faire le tri des projets qui lui ont été soumis avec un grand souci du discernement. Sur les 1600 propositions qui ont été portées à l'attention de l'organisation, seulement 30 ont passé le test. Pour ces projets, les anges financiers leur ont accordé du financement à hauteur de 12 millions, en retour d'une prise de participation au capital-actions pouvant atteindre 30%.

«La quasi-totalité de nos interventions s'est avérée un succès jusqu'à présent, conclut André Forest. Nous sommes très heureux des résultats, mais tout n'est pas encore gagné. Une entreprise en démarrage demeure une entreprise fragile, et il ne faut jamais cesser d'en surveiller la progression.»