Le débat s'est intensifié en 2017 sur la question des commissions intégrées (surtout les commissions de suivi) que verse l'industrie des fonds communs aux conseillers financiers.

Comme elles font partie des frais de gestion, et qu'elles sont dans les faits refilées aux détenteurs des titres, ces commissions ont-elles leur raison d'être ? Sont-elles une rémunération nécessaire pour assurer que les petits investisseurs profitent eux aussi des conseils des experts ?

LA QUESTION : FAUT-IL LES ABOLIR ?

Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ont lancé l'an dernier la consultation 81-408 visant à déterminer, entre autres, si les commissions de suivi versées aux conseillers financiers distribuant des fonds communs devaient être abolies. Mais le débat avait commencé bien avant. Dès avril 2013, la Chambre de la sécurité financière (CSF) avait déposé un mémoire auprès des ACVM dans lequel elle s'inquiétait de l'absence de divulgation des commissions de suivi auprès des investisseurs. Et bien qu'elle n'ait pas participé à la plus récente consultation, la position de la CSF n'a pas changé, confirme Julie Chevrette, directrice des communications de l'organisme.

Dans ce mémoire, la CSF a expliqué que la commission de suivi est une catégorie de frais permanents qui a pour objet de rémunérer la prestation de services-conseils, de planification financière, d'établissement de plan financier, de rapport d'étape sur la croissance des actifs et de recommandations d'achat ou de vente de produits financiers que les conseillers sont censés fournir de façon continue aux porteurs après l'acquisition des titres. Au moment de sa publication, la CSF estimait que le conseiller type percevait quelque 64 % de sa rémunération sous forme de commissions de suivi.

Mais l'investisseur reçoit-il vraiment ces services ? Dans le mémoire d'avril 2013 de la SCF, on pouvait lire : « La Chambre comprend qu'il peut même être assez fréquent que l'investisseur assume indirectement ce coût sans jamais obtenir la prestation du conseiller. » Sans prôner pour autant l'abolition, l'organisme indiquait à tout le moins la nécessité d'une divulgation claire de tous les frais. L'investisseur pourrait alors agir en connaissance de cause.

LA MAJORITÉ S'OPPOSE

Au cours de la consultation menée en 2017, 91 des 141 mémoires déposés par des organismes ou participants aux marchés exprimaient une volonté de maintenir ces commissions de suivi. Plusieurs de ces mémoires provenaient de courtiers indépendants en épargne collective. Ce sont eux qui vendent des fonds communs aux petits investisseurs. Et sans les commissions de suivi, ces agents n'auraient plus les moyens de couvrir ce segment de marché.

L'Institut des fonds d'investissement du Canada (IFIC) s'oppose à l'abolition des commissions de suivi.

« Il n'y a pas d'évidence que la situation des investisseurs serait meilleure si on abolissait ces commissions de suivi. »

- Paul C. Bourque, président de l'IFIC

Une étude menée par PwC pour le compte de l'IFIC démontre que le résultat de l'abolition des commissions de suivi serait que les petits investisseurs accumuleraient moins d'épargne, ajoute M. Bourque.

Avec l'abolition des commissions de suivi, beaucoup de gens perdraient tout accès au conseil, ajoute Hélène Gagné, gestionnaire de portefeuille, Peak Gestion privée. C'est que les petits investisseurs n'intéressent guère les firmes offrant de la gestion de portefeuilles. Celles-ci recherchent plutôt les gros clients à qui elles peuvent facturer des honoraires fixes, selon elle.

L'Association professionnelle des conseillers en services financiers (APCSF) a participé à la récente consultation. À son avis, la proposition d'abandonner les commissions de suivi ne sert pas la mission des ACVM qui est la protection du public et l'efficience des marchés, rappelle Bertrand Larocque, trésorier de l'organisme. Le mémoire de l'APCSF demande aux ACVM d'être prudentes afin que la réglementation ne réduise pas la concurrence, mais plutôt qu'elle préserve le choix, la diversité et le conseil indépendant le plus possible, dans l'intérêt du public.