Les corridors de l’UQAM, plus précisément ceux du département de psychologie, n’ont plus de secrets pour Marc-Simon Drouin. Trente-deux ans après avoir donné son premier cours, ce professeur allumé entretient toujours la même flamme : celle de l’enseignement, celle de la transmission des savoirs. Discussion.

Vous avez commencé l’enseignement comme chargé de cours en 1991, avant de devenir professeur en 2001. Comment expliquer que vous aimiez toujours cela, en 2023 ?

J’aime ça, enseigner. La transmission, ça a toujours été quelque chose que j’ai aimé. Ça fait partie de ce qui m’allume. C’est un avantage avec l’université, on a une clientèle qui est intéressée par rapport au secondaire. Ils enseignent de la matière où les jeunes ne sont parfois pas sûrs de comment ça va leur servir plus tard.

Moi, j’enseigne surtout la psychothérapie, la psychologie humaniste. J’ai une clientèle intéressante parce que déjà, ils ont eu un début de réflexion par rapport à leur parcours. J’ai la chance de donner des cours très près de la pratique professionnelle, différents des collègues ou d’autres universités.

Vous donnez les deux mêmes cours depuis plus de 20 ans. Ça ressemble à quoi ?

Les 10 premières années, il s’agit de trouver la trajectoire du cours ; quels sont les acquis qu’il est raisonnable d’espérer en 45 heures. J’ai le plaisir d’enseigner une matière qui est moins présente chez les collègues ou dans d’autres universités.

Après, pour bonifier les cours, une fois que la trajectoire est trouvée et que les objectifs sont clairs… on peut ajouter des analyses de cas, du nouveau matériel. Les deux cours, ça fait 22-23 ans que je les donne, et ils ont beaucoup changé.

Qu’est-ce qui a évolué, avec les années ?

Il y a des choses qu’on disait et qu’on ne peut plus dire, mais l’essence de l’enseignement n’a pas changé tant que ça. On a accès à plus de matériel clinique et d’outils, comme du matériel plus vivant avec des démonstrations, et pas juste du théorique.

Il y a une certaine prudence, ce qui est une bonne chose à certains égards : on est plus sensibles à des réalités différentes des nôtres… mais en même temps, il ne faut pas se censurer non plus, car on est là pour être en contact avec des conflits et des situations difficiles. Ça fait partie de la vie.

Certains étudiants vous ont-ils marqué ?

J’ai eu des étudiants d’une intelligence émotionnelle extraordinaire. Je pense à quelques-uns d’entre eux, qui ont été d’une sensibilité, mais pas d’une sensiblerie. C’est ça qui fait que c’est le fun, les différents étudiants. On n’a jamais les mêmes questions, jamais exactement le même lien avec eux. Et il y en a qui sont devenus des thérapeutes accomplis… on les remarque, ces étudiants.

Un conseil pour avoir cette longévité devant le tableau, comme vous ?

Gardez votre couleur, prenez un certain nombre de risques calculés, soyez attentif à ce que le message passe. Moi, j’enseigne comme j’aurais voulu qu’on m’enseigne. Ça ne conviendra pas à tout le monde, mais ça passe pas pire.

Et votre couleur à vous ?

J’essaie de toucher mes étudiants, qu’ils soient rejoints. J’aime beaucoup rigoler aussi, je m’arrange pour qu’on ne se prenne pas trop la tête même si on apprend des choses complexes. Je veux faire en sorte que ce soit parlant. Et pour moi, aussi, le respect, ce n’est pas négociable. J’ai encore des collègues qui sont cassants… tu ne gagneras rien à faire ça.

Vous enseignerez encore longtemps, professeur Drouin ?

Je pense faire ça encore au moins sept ou huit ans. Je fais également de la clinique, de la supervision de doctorat et je supervise des psychologues. Je joue de la trompette aussi, mais ça, c’est une autre histoire [rires].

Je ne veux pas paraître vertueux, mais la journée où je n’aurai plus de fun, c’est celle où je vais arrêter d’enseigner.

*À des fins de concision et de lisibilité, les propos de cette entrevue ont été modifiés.