Une usine 4.0, qu’est-ce que cela veut dire concrètement ? À quoi ressemble-t-elle ? Pour inciter les PME québécoises du secteur manufacturier à faire le saut, Investissement Québec–CRIQ a mis sur pied deux usines cyberphysiques, afin de rendre la théorie… bien réelle.

Selon Lyne Dubois, vice-présidente chez Investissement Québec–CRIQ, des PME ont fermé leurs portes durant la pandémie parce qu’elles n’ont pas réussi à s’adapter aux nouveaux enjeux. La crise actuelle est, selon ses observations, un bon moment pour entreprendre le virage vers l’usine du futur. « Si, avant la pandémie, les manufacturiers pouvaient poursuivre leurs activités sans s’être automatisés, c’est de plus en plus difficile maintenant. Il y a les problèmes d’approvisionnement, le manque d’employés, etc. Les besoins des consommateurs ont aussi changé. Ils veulent des produits personnalisés, à temps et qui respectent la qualité-prix. »

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Une grande majorité des entreprises manufacturières québécoises a recours à une forme ou à une autre d’automatisation.

Les robots ne font pas une usine 4.0

Le Regroupement des entreprises en automatisation industrielle (REAI) estime à près de 7500 le nombre de robots en activité au Québec. Il souligne qu’une grande majorité (73 %) des entreprises manufacturières québécoises a recours à une forme ou à une autre d’automatisation. Toutefois, plus de la moitié d’entre elles seraient peu ou marginalement automatisées. Dans les faits, seules les entreprises automatisées à 50 % ou plus auraient modifié en profondeur leurs processus de fabrication. « Les usines 4.0 sont très rares dans la province. Les raisons sont multiples : les entrepreneurs manquent de temps, de main-d’œuvre, ils n’arrivent pas à faire le transfert des compétences, etc. », explique Lyne Dubois.

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Une usine 4.0 ne se limite pas à la seule présence de robots. Elle vise également à optimiser les processus.

Définir et surtout voir une usine 4.0

Une usine 4.0 ne se limite pas à la seule présence de robots. Il s’agit de connecter les machines pour qu’elles se parlent entre elles, mais pour cela, il leur faut des données. « L’usine 4.0 optimise les processus. Elle passe en revue la commande du client, fait l’inventaire des différentes ressources, répertorie le fournisseur, etc. Cela peut même toucher le département des finances. Toutes les étapes qui mènent à la production et à la livraison d’un produit peuvent être concernées. Il s’agit de beaucoup, beaucoup de données », explique Geneviève Lefebvre, directrice en transformation numérique chez Investissement Québec–CRIQ.

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Les deux usines cyberphysiques d’Investissement Québec–CRIQ permettent de démontrer de façon concrète tout le potentiel de l’usine 4.0.

Un processus étourdissant

La possibilité d’une production aux méthodes standardisées, sans interruption, tout en suivant minutieusement la recette de la production figure aussi parmi les avantages de l’usine 4.0, mais la complexité de la tâche peut facilement être étourdissante pour un entrepreneur. C’est la beauté des deux usines cyberphysiques – dont une est établie à Québec depuis 2017 et la seconde, à Montréal depuis 2021 –, puisqu’elles simplifient la compréhension de ce concept. « Nous avons sur place une chaîne de production entièrement automatisée guidée par un système de RFID [Radio Frequency Identification]. Lorsqu’on démarre le système, les stations qui permettent l’assemblage se mettent en branle en analysant toutes les données qu’elles ont reçues. Tout y passe : la production de l’objet, les passages sur le convoyeur, le contrôle de qualité grâce à une caméra intelligente, l’emballage… On est sur place et on explique tout le concept et son système de pilotage », dit la spécialiste en transformation numérique.

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La formation proposée par Investissement Québec–CRIQ a été un déclic pour bon nombre d’entrepreneurs selon sa vice-présidente, Lyne Dubois.

Une bougie d’allumage

Près de 1500 personnes se sont déplacées dans les locaux d’Investissement Québec–CRIQ jusqu’à présent pour y voir les installations. Selon Lyne Dubois, il ne fait aucun doute que la démonstration a été un déclic pour bon nombre d’entrepreneurs et employés qui ont pu se projeter dans leur réalité. « Tout n’est pas intéressant à automatiser, mais c’est une opportunité d’y réfléchir et cela vient illustrer le monde de possibilités. La formation permet de clarifier les concepts et la fameuse question “par où commencer ?” », affirme la vice-présidente.

La suite ? Investissement Québec–CRIQ confirme qu’il dispose de ressources pour accompagner les manufacturiers dans leur transformation numérique. « On peut les aider à déterminer les projets par priorité. Les manufacturiers n’ont plus le choix de faire plus avec moins, la compétition mondiale est là pour rester et les problèmes de main-d’œuvre ne sont pas près d’être réglés », conclut Geneviève Lefebvre.