Devant la forte demande pour ses autobus et camions électriques, le nouveau défi de Lion Électrique est clair : il faut en assembler considérablement plus. Déjà, l’entreprise a augmenté de façon substantielle la vitesse de ses chaînes de production – et devra poursuivre en ce sens dans les prochains mois.

Fondée en 2008, Lion Électrique a déjà connu une grande phase de changement au cours de son histoire. C’était en 2017, lorsqu’elle a laissé de côté la production de véhicules à essence pour ne vendre que des autobus et des camions lourds entièrement propulsés à l’électricité. Sans tambour ni trompette, elle traverse actuellement une seconde phase de changement.

Entre le deuxième trimestre de 2021 et celui de 2022, Lion Électrique a mis le paquet pour accélérer la cadence. Devant un carnet de commandes dépassant les 2300 véhicules, l’entreprise de transport a bonifié sa vitesse de production de 72 % en l’espace d’une année, dans son usine de Saint-Jérôme.

En 2021, Lion a livré 196 véhicules. Pour le semestre clos le 30 juin dernier, soit la première moitié de 2022, cette quantité grimpe à 189 – presque autant, en deux fois moins de temps.

Vice-président marketing et communications de Lion Électrique, Patrick Gervais « avait vu venir » cette intensification de la demande.

« À Saint-Jérôme, on a sorti tout notre stock pour maximiser l’emplacement de l’assemblage, explique-t-il en entrevue. On a ajouté des chaînes de montage pour les camions et pour les autobus, sur 200 000 pieds carrés, tout est consacré à l’assemblage des véhicules. L’atelier de peinture est intégré aux lignes et l’usine de batterie est en place. »

Le rythme auquel Lion évolue actuellement est une première dans son histoire. Quelque 350 ingénieurs y travaillent à temps plein au Québec, en recherche et développement. De plus, la société québécoise s’est implantée aux États-Unis, avec une usine à Joliet, dans le nord-est de l’Illinois. On y compte pour l’instant une cinquantaine d’employés, et l’entreprise a l’intention qu’elle soit pleinement opérationnelle pour le marché américain d’ici la fin du calendrier 2022.

Malgré l’instabilité et l’incertitude qui peuvent émaner de cette étape de développement, Patrick Gervais demeure confiant.

« On s’adapte. Ce n’est pas comme si on n’avait jamais construit de véhicules. Oui, c’est une augmentation, mais en fin de compte, ça reste le même processus, détaille-t-il. C’est un modèle d’affaires viable parce qu’il y a une volonté politique d’aller vers l’électrique. »

Verts et à la mode

En juin 2021, 26 camions et 307 autobus électriques circulaient sur nos routes, selon les derniers chiffres de l’Association des véhicules électriques du Québec (AVEQ).

« On s’attend à voir une augmentation assez importante [pour juin 2022], soutient le porte-parole Simon-Pierre Rioux. Environ 150 autobus de plus, et les camions lourds, ça augmente plus lentement, donc une cinquantaine en tout. »

Pierre Rioux affirme que « le Québec n’avait pas la capacité de produire des batteries en volume suffisant pour permettre à un camion de tirer une remorque », il y a une dizaine d’années. Vers 2016, cette technologie a fait son apparition en Europe, avant de faire son chemin vers l’Amérique du Nord.

Les véhicules électriques lourds permettent aujourd’hui à leurs propriétaires de réaliser des économies importantes sur plusieurs points : 80 % en matière de coût d’énergie, 60 % en coût de maintenance et un coût opérationnel qui ne représente « pratiquement rien » comparativement à leurs cousins à essence, selon Patrick Gervais.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Patrick Gervais, vice-président marketing et communications chez Lion Électrique

C’est justement dans un contexte d’augmentation draconienne des gaz à effet de serre que Lion Électrique voit son utilité.

Le camion, c’est l’objet le plus polluant sur lequel on peut avoir un impact immédiat. Un seul camion produit environ 100 tonnes de GES par année.

Patrick Gervais, vice-président marketing et communications chez Lion Électrique

Pour continuer sur la bonne voie, l’AVEQ estime que la province devra « miser sur son savoir-faire, sur la recherche », « attirer du capital de la part des grands manufacturiers » et « encourager les petites compagnies qui sont capables de grandes choses si on leur donne les moyens », dans un secteur où l’ensemble des pays industrialisés sont nouvellement en compétition.

Patrick Gervais, dans tout ça, voit Lion devenir l’éventuel « leader du transport lourd 100 % électrique » au Québec, lui qui possède déjà ce statut pour les autobus.

« Ils ont une occasion devant eux, complète Simon-Pierre Rioux. Ils vont juste devoir s’assurer de s’approvisionner correctement en micropuces, en processeurs, en contrôleurs et en piles avec le nombre d’usines qui augmente. »

En savoir plus
  • 128 000
    Nombre de voitures électriques pour particuliers qui se sont ajoutées sur les routes de la province depuis 2018. Cela représente environ 85 % du parc automobile électrique au Québec.
    SOURCE : Association des véhicules électriques du Québec