Les entreprises usent de plus en plus de créativité pour fidéliser leur clientèle. Révolu le temps où elles distribuaient des points aux clients sans égard à leur valeur. En 2013, l'heure est à l'offre ciblée et sur mesure.

L'entreprise québécoise Metro l'a bien compris. Le géant de l'alimentation a lancé ce mois-ci une application mobile permettant de dresser une liste d'épicerie. L'utilisateur peut ainsi choisir à distance ce qu'il veut dans cette liste, consulter la circulaire ou encore se faire suggérer des articles personnalisés.

Au-delà de l'application même, la force de la stratégie marketing de Metro réside dans sa structure de base, suggère le professeur titulaire à HEC Montréal Jacques Nantel. Metro, précurseur au Québec, «a commencé à se doter d'un système de profilage des consommateurs il y a trois ans», rappelle-t-il. Depuis 2010, Metro recueille ainsi des données (des habitudes d'achat) des clients lorsqu'ils souscrivent à son programme de fidélisation Metro&moi.

Pas seulement les points

La fidélisation, en outre, se "raffine", s'éloignant des systèmes de points qui la caractérisent traditionnellement. Un exemple: «Air Canada avec [son programme] Altitude va récompenser le grand voyageur avec un accès privilégié, donc on enlève les désagréments comme les files d'attente. Il n'y a ainsi pas juste les points, il y a aussi la création d'une expérience positive», explique Mark Morin, président de Stratégie marketing promotionnel et spécialiste dans la gestion de la relation clientèle.

Les entreprises introduisent également des éléments de jeux dans les programmes de marketing, comme le média social Foursquare avec ses "check-in" qui permettent la géolocalisation. À force de "checker", les utilisateurs obtiennent des distinctions. «C'est intéressant, car contrairement à des programmes de points, c'est des cadeaux intangibles. Il y a un côté ludique à la chose, cette façon d'être reconnu par la communauté", croit Mark Morin.

Marchés saturés

Les programmes de marketing pour s'attirer de nouveaux clients ne datent pas d'hier. Celui de Canadian Tire a plus de 50 ans. Mais la saturation des marchés, notamment dans l'agroalimentaire, pousse aujourd'hui les entreprises à trouver des moyens nouveaux et toujours plus efficaces de fidéliser leur clientèle.

«Il n'y a pas une grosse croissance démographique ou des dépenses par ménage. Alors compte tenu de ça, la seule façon de croitre c'est d'aller chercher un client, ou mieux, de faire en sorte que le client déjà chez nous concentre ses achats chez nous», soutient Jacques Nantel.

Les entreprises s'adaptent donc à l'air du temps en adoptant la plateforme mobile au profit de la bonne vieille carte de fidélité à puce, vouée à s'éteindre progressivement.

Même Canadian Tire s'y met. La chaîne de magasins à grande surface, qui fait partie des précurseurs au pays avec son "argent" en guise de récompense, met actuellement au point un programme de fidélisation «semblable à celui de Metro», indique le professeur à HEC. «L'argent Canadian Tire permet la flexibilité et l'immédiateté, sauf que ça ne donne aucune information en termes de base de données», souligne-t-il.

Big Brother

La table est donc mise pour la prochaine étape de la fidélisation, une réponse en temps réel et encore plus personnalisée, pensent les experts, ce qui implique une connaissance plus intime du consommateur.

À titre d'exemple à suivre, le professeur Nantel cite le groupe Alliance Boots, principal grossiste en médicaments en Europe. «Ils ont cette capacité. Dès que vous rentrez dans une succursale, ils vous font une offre. Ce n'est pas banal! En même temps, ça fait peur, ça fait Big Brother, mais c'est vers quoi on tend», ajoute-t-il.