Dans l’infolettre L’argent et le bonheur, envoyée par courriel le mardi, notre journaliste Nicolas Bérubé offre des réflexions sur l’enrichissement. Ses textes sont repris ici le dimanche.

Parce qu’elles sont liées à notre capacité à nous loger, à nourrir notre famille et à payer nos factures, les nouvelles économiques sont souvent stressantes.

Pourtant, j’aimerais croire qu’un Martien fraîchement débarqué sur Terre serait surtout impressionné par ce qui va bien, plutôt que par ce qui va mal.

En ce début d’été, voici six raisons de sourire.

PHOTO KOSTAS TSIRONIS, ARCHIVES BLOOMBERG

Une décennie après la terrible crise économique qui a secoué le pays, la Grèce a réussi, avec beaucoup de difficulté, à surmonter ses problèmes.

La Grèce est de retour

Vous souvenez-vous de la crise économique grecque qui a eu lieu au début des années 2010 et qui faisait chaque jour les manchettes partout sur le globe ? À l’époque, le gouvernement du pays dissimulait l’ampleur de sa dette et lorsque la crise a éclaté, les taux d’intérêt grecs ont explosé et les services publics ont été coupés. Athènes vivait des affrontements violents entre manifestants et policiers, et de nombreux analystes entrevoyaient la faillite de la Grèce et la fin de l’euro. Une décennie plus tard, l’euro est toujours en circulation et la Grèce a réussi, avec beaucoup de difficulté, à surmonter ses problèmes, comme l’a rapporté récemment La Presse1. Le pays rembourse en avance les milliards d’euros reçus des pays européens pendant la crise, le taux de chômage a diminué de moitié et la Bourse grecque est l’une des plus performantes d’Europe.

PHOTO MARK BLINCH, ARCHIVES REUTERS

L’indice du S&P/TSX, qui suit les 250 plus grandes entreprises à la Bourse de Toronto, est en hausse de 2 %.

Marchés en hausse

Avez-vous l’impression de vous enrichir cette année ? Près de la moitié de 2023 est derrière nous (et plus du tiers de la décennie) et les marchés financiers se portent très bien, merci. L’indice NASDAQ, qui rassemble les plus grandes sociétés technologiques américaines, est en hausse de 31 % depuis le début de l’année. L’indice du S&P 500, qui représente les 500 plus grandes entreprises aux États-Unis, est en hausse de 15 % depuis le 1er janvier. On enregistre un gain de 11 % pour la Bourse française, de 15 % pour la Bourse allemande et de 28 % pour la Bourse japonaise. L’indice du S&P/TSX, qui suit les 250 plus grandes entreprises à la Bourse de Toronto, est en hausse de 2 %. Bref, si vous êtes le propriétaire d’un portefeuille d’actions diversifié, vous vous êtes enrichi de près de 8 % jusqu’ici en 2023, alors qu’un portefeuille de 60 % d’actions et 40 % d’obligations est en hausse de 5 %, sans compter les dividendes. Pas mal moins dramatique qu’à la même date en 2022.

PHOTO JESSICA RINALDI, ARCHIVES REUTERS

Selon un sondage Léger, 61 % des Américains estiment que les conditions économiques dans leur pays sont mauvaises.

L’enfer, c’est les autres

Un sondage Léger a révélé le mois dernier que 58 % des Canadiens et 61 % des Américains estiment que les conditions économiques dans leur pays sont mauvaises. Mais quand les sondeurs ont demandé aux gens de qualifier leur situation économique à eux, 59 % des Canadiens et 63 % des Américains ont dit que la situation financière de leur ménage était bonne.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Contre toute apparence, l’inflation des dernières années est sous la moyenne.

L’inflation est sous la moyenne

Si je vous disais que l’inflation des dernières années est sous la moyenne, est-ce que vous me traiteriez de fou ? Voyons voir : de 1960 à 2020, l’inflation au Canada a été de 3,8 % par année en moyenne. Et, depuis 2020, l’inflation au pays a été de… 3,6 % par année en moyenne. Vous ne me croyez toujours pas ? Sortez votre calculatrice : l’inflation était de 0,72 % en 2020, 3,4 % en 2021 et 6,8 % en 2022, pour une moyenne de 3,6 %. Quant à 2023, on ne sait bien sûr pas comment l’année va finir. Mais si l’inflation vécue le mois dernier (4,4 %) devait représenter la moyenne de l’année en cours, on en serait à une moyenne de 3,8 % de 2020 à la fin de cette année. Bref, pas de quoi écrire à sa mère (mais écrivez quand même à votre mère si elle est toujours parmi nous, la vie est comme l’inflation, imprévisible).

PHOTO FRANCIS MASCARENHAS, ARCHIVES REUTERS

Selon la Banque mondiale, 99 % des ménages indiens ont accès à l’électricité.

L’Inde et l’électricité

Sans consulter Google : quel pourcentage des ménages indiens ont accès à l’électricité ? Est-ce 20 % ? Ou bien 30 % ? La réponse : 99 %, selon la Banque mondiale. C’est donc dire que les citoyens du pays de 1,4 milliard d’habitants, nouvellement le plus populeux du monde devant la Chine, ont massivement atteint ce jalon essentiel au fonctionnement du monde moderne.

PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, ARCHIVES LA PRESSE

La valeur moyenne des achats dans les commerces de la rue Saint-Denis est en hausse depuis l’implantation de la piste cyclable du Réseau express vélo (REV).

La ville revit

Plus près de chez nous, le centre-ville de Montréal, comme beaucoup de centres des affaires dans le monde, ne s’est pas encore remis des effets de la pandémie et de l’arrivée de l’ère du télétravail. Mais des endroits qui en ont arraché pendant des années connaissent une renaissance. C’est le cas de la rue Saint-Denis. En 2020, 25 % des espaces commerciaux de l’artère étaient vacants, un taux qui a baissé à 15 % aujourd’hui. La valeur moyenne des achats dans les commerces est aussi en hausse depuis l’implantation de la piste cyclable du Réseau express vélo (REV), alors que le débit de circulation automobile dans la rue, lui, a chuté de 50 %, selon l’arrondissement. Moins de bruit, moins de poussière, moins de danger pour les citoyens, plus de terrasses, plus de verdure et plus d’activité économique et de création de richesse. De quoi sourire.

Pourquoi pas Buffett ?

PHOTO NATI HARNIK, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Warren Buffett

Un lecteur demande : « Après lecture de votre livre et de vos articles, j’aimerais savoir pourquoi il ne serait pas recommandé d’acheter des actions de Berkshire Hathaway, la société de Warren Buffett, plutôt que des fonds indiciels américains comme ceux de Vanguard. Warren Buffett recommande lui-même d’acheter des fonds indiciels, mais sa société ressemble beaucoup à un fonds indiciel. »

Très bonne question. Pour tout dire, je possède moi-même depuis longtemps des actions de Berkshire Hathaway (celles de catégorie B, hélas). C’est anecdotique : elles représentent moins de 3 % de la taille de mon portefeuille et je les garde comme souvenir de l’époque où j’habitais aux États-Unis, et aussi parce que je ne veux pas payer d’impôt sur le gain en capital.

Côté rendements, Berkshire Hathaway a longtemps battu l’indice du S&P 500, mais ce n’est plus le cas depuis un bon moment : 10 000 $ investis dans l’entreprise de Warren Buffett il y a 20 ans valent 66 000 $ aujourd’hui, contre 69 000 $ pour la même somme investie dans le S&P 500.

Vous avez raison, Warren Buffett recommande aux petits et grands investisseurs d’adopter une approche indicielle passive et va lui-même laisser en héritage à sa femme un portefeuille contenant un fonds Vanguard suivant le S&P 500 plutôt que des actions de Berkshire Hathaway.

Pourquoi ? Buffett a déjà expliqué qu’en plus d’offrir des perspectives de rendement difficiles à égaler, un portefeuille indiciel est moins susceptible de jouer dans les émotions au fil du temps.

Par exemple, dans 10, 20 ou 30 ans, l’investisseur qui détient Berkshire Hathaway pourrait se dire (à tort ou à raison) que les meilleurs jours de l’entreprise sont passés, que si Buffett était là, il ferait les choses différemment, que d’autres entreprises sont plus attrayantes, etc. Il y a toujours cet élément de doute qui peut naître dans la tête de l’investisseur actif et finir par avoir un impact sur son comportement. Une approche indicielle permet d’éliminer ce doute. Quelles seront les plus grandes entreprises des États-Unis et du monde dans 10, 20 ou 30 ans ? Aucune idée, mais l’investisseur indiciel est certain de les avoir dans son portefeuille, et c’est ce qui compte.

1. Lisez la Planète économique du 12 juin dernier « La Grèce est de retour »

Question de la semaine

Vivez-vous du stress et de l’appréhension au sujet de l’économie ?

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