Utiliser son propre téléphone plutôt qu’acheter celui qu’offre son fournisseur, une tendance à laquelle échappait l’Amérique du Nord, est maintenant un réflexe bien implanté au Canada. Et si les plaintes des consommateurs sont en baisse, 15 % en ont tout de même déposé une dans l’année et 21 % ont changé de fournisseur dans les deux dernières années, révèle un sondage commandé par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC).

Le document que La Presse a obtenu auprès de l’organisme fédéral dresse par ailleurs un portrait d’une grande précision des consommateurs, basé sur un sondage auprès de 1671 adultes canadiens mené en décembre 2022. Le CRTC mène cet exercice, commandé cette année à la firme Phoenix pour 113 466 $, depuis 2014, ce qui permet de dégager des tendances.

Codes inconnus

La première tendance, persistante : très peu de Canadiens connaissent les trois codes de protection des consommateurs qui s’appliquent sur les services sans fil, les services internet et auprès des fournisseurs de télévision. Pas moins de 80 % des répondants n’ont tout simplement « aucun souvenir » de ces codes, alors que seulement 5 % affirment s’en souvenir clairement. L’an dernier, les proportions étaient respectivement de 76 % et 4 %.

Ces codes constituent pourtant des victoires notables pour les consommateurs. Établi en 2013, le Code sur les services sans fil interdit notamment aux fournisseurs d’imposer des frais de plus de 50 $ à leurs clients qui consomment trop de données. En 2017, un autre code est venu encadrer les fournisseurs de services de télévision : ils doivent informer leurs clients de l’existence d’un forfait de base. Enfin, depuis 2020, le Code sur les services internet prohibe l’imposition d’une limite aux forfaits internet résidentiels dits « illimités » et rend obligatoire un affichage clair des prix.

Propriétaires et abonnés

Pour la première fois depuis la mise en place de ce sondage, on retrouve par ailleurs presque autant d’abonnés aux services sans fil arrivant avec leur propre téléphone, ce qu’on appelle « BYOD » en anglais, que ceux achetant un téléphone proposé par leur fournisseur. Notons que 11 % des consommateurs, en outre, choisissent de louer leur téléphone, une question que le CRTC a ajoutée seulement en 2022 ; 9 % des répondants avaient alors signalé avoir choisi la location.

En tout, 88 % des répondants ont un forfait sans fil avec données. Phénomène intéressant, la popularité grandissante des « forfaits avec données illimitées », qui offrent en fait des vitesses réduites après un certain nombre de gigaoctets, semble s’estomper. « La tendance croissante vers les forfaits proposant une quantité illimitée de données que l’on avait observée en 2022 s’est arrêtée à 18 % », note-t-on.

Les deux catégories de forfaits de données les plus populaires sont celles offrant entre 1 et 5 Go, ainsi que de 6 à 10 Go. Elles attirent 16 % des consommateurs chacune. La grande majorité des répondants, soit 75 %, n’ont pas eu à payer de frais de données excédentaires dans les 12 derniers mois ; 17 % ont déclaré avoir eu à le faire « une ou deux fois ».

Plaintes en baisse

Les relations entre les consommateurs canadiens et leurs fournisseurs sans fil se sont assurément améliorées depuis 2014, les sondages du CRTC en témoignent. Alors que 26 % d’entre eux avaient porté plainte en 2014, ils ne sont plus que 15 % à l’avoir fait dans le rapport pour 2023. Au Québec, la satisfaction est encore plus grande : 95 % des répondants n’ont pas porté plainte dans le plus récent sondage.

On note par contre des différences au sein des groupes de consommateurs à l’échelle canadienne. Les membres de ce que le CRTC appelle les « communautés racisées » ont par exemple porté plainte dans une proportion de 21 %, contre 12 % des « non-racisés ».

Le motif de plainte le plus fréquent était la qualité inadéquate du service, pour 43 % des répondants ; 36 % se sont par ailleurs plaints pour des frais facturés à tort. Dans l’écrasante majorité des cas, soit 92 %, les plaintes ont été faites directement au fournisseur. À peine 6 % des consommateurs l’ont fait auprès de leur fournisseur et de la Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision (CPRST). Personne n’a déposé de plainte uniquement à la CPRST.

Enfin, 21 % des répondants ont décidé de changer de fournisseur dans les deux dernières années, une tendance légèrement à la hausse. Ils étaient 16 % à avoir déclaré ce changement en 2018. La principale raison, citée dans 69 % des cas : « Un autre fournisseur a présenté une meilleure offre. » Dans 26 % des cas, le consommateur était insatisfait des services. En tout, 83 % ont trouvé facile de changer de fournisseur.

Avec la collaboration de William Leclerc, La Presse