Les employés du gouvernement du Québec perdaient des plumes année après année, compte tenu de l’inflation. L’État rognait sur leur paye pour financer ses déficits récurrents.

Or en 2022, pour la première fois depuis 10 ans, l’écart de rémunération désavantageux des serviteurs de l’État s’est nettement rétréci avec les autres employés comparables du marché du travail.

La nouvelle est tirée du rapport de l’Institut de la statistique du Québec, qui compare la rémunération de l’administration publique québécoise à celle du secteur privé et des autres organismes publics (fédéral, municipal, universitaire, etc.). Tout est pris en compte : salaires, avantages sociaux, régimes de retraite, congés et vacances, etc.

Cette année, donc, les fonctionnaires du Québec touchent un salaire de 55 652 $, en moyenne. Quand on ajoute les autres composantes de la rémunération, la paye globale équivaut à 44,69 $ pour chaque heure travaillée.

Ce niveau horaire demeure inférieur de 3,9 % à celui des autres salariés semblables dans les organisations de 200 employés et plus, publiques ou privées, mais cet écart défavorable n’a jamais été aussi bas depuis 2009.

Bref, la paye des fonctionnaires a cessé de stagner ou de reculer, relativement parlant, une première en 10 ans.

Entre 2010 et 2021, période caractérisée par de nombreux déficits, le gouvernement du Québec offrait une rémunération entre 5,6 % et 9,4 % moins intéressante que les postes comparables du marché, public et privé confondus. L’écart est tombé à 3,9 % en 2022.

Autre motif de réjouissance pour les employés de l’État : alors que leur rémunération globale était essentiellement équivalente à celle du secteur privé depuis 10 ans, elle est aujourd’hui supérieure de près de 4 % (toujours en tenant compte des avantages sociaux). De plus, l’écart défavorable avec les autres organisations du secteur public (municipal, provincial, etc.) est maintenant de 20,4 %, contre 25 à 29 % au cours des dernières années.

La comparaison de l’ISQ est publiée chaque année en novembre. Elle arrive cette année dans le contexte du début des négociations pour le renouvellement des conventions collectives de nombreux employés de l’État. Les demandes syndicales risquent d’être salées avec le fort taux d’inflation postpandémique qui sévit.

Dans son étude, l’ISQ cible 74 emplois repères comparables, qui touchent précisément 78 887 salariés de l’État (secrétaire, technicien, ingénieur, etc.). L’étude exclut toutefois les enseignants et les infirmières, entre autres, car il y a peu de comparables dans le marché.

Tout de même, cette tendance à la hausse de la rémunération s’est aussi fait sentir dans les secteurs de l’éducation et de la santé. Visiblement, les grands besoins de l’État, la pénurie de main-d’œuvre et l’amélioration de la situation budgétaire depuis cinq ans ont fait tourner le vent en faveur des employés de l’État.

L’une des responsables de l’étude, Nadège Jean, fait toutefois remarquer que l’écart moins défavorable cette année pourrait en partie s’expliquer par le fait qu’une grande proportion des employés des autres secteurs publics comparés (44 %) ont une convention collective qui est échue. Ce n’est pas le cas, en revanche, dans le secteur privé comparé (seulement 6 %).

Et quoi qu’il en soit, les comparaisons annuelles par rapport à 10 ans plus tôt montrent une amélioration en 2022, ce qui n’était pas le cas des années précédentes.

Greffière et Justice

Malgré tout, il subsiste d’importants écarts pour certains postes. Mon collègue Louis-Samuel Perron a fait état du grand manque de greffières au palais de justice de Montréal, qui a pour effet de retarder ou de compromettre de nombreux procès.

Lisez l'article « Palais de justice de Montréal : record de salles d'audience fermées »

L’ISQ n’a pas recensé spécifiquement le poste de greffière. Il reste que l’écart de rémunération global avec le marché pour les postes de techniciennes en droit au gouvernement illustre bien la situation.

Une technicienne de 2e niveau (sur 3 niveaux) peut gagner 41,27 $ l’heure, avantages sociaux et vacances compris, soit 27 % de moins qu’au privé et 44 % de moins qu’au municipal. Ayoye…

Les villes au sommet… encore

Comme toujours, la rémunération du secteur municipal demeure très nettement au-dessus des autres. L’écart de rémunération global des postes représentatifs que j’ai choisis varie entre 17 % et 51 % au-dessus de celle de l’administration publique québécoise, régime de retraite compris.

Malgré tout, le monde municipal continue de se plaindre du manque de fonds pour servir sa population et réclame plus d’argent du gouvernement du Québec. Les municipalités, faut-il dire, n’ont pas le droit de lock-out. Et quel maire osera vraiment affronter ses employés ?

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