Celle-là est vraiment dure pour le moral. On savait que la pandémie n’était pas finie, mais personne ne prévoyait qu’il faudrait annuler, encore cette année, bien des partys du temps des Fêtes. Ouf…

Une fois le choc passé, il faut se demander comment le variant Omicron affectera l’économie, les taux d’intérêt, l’inflation. Les questions sont nombreuses, mais les réponses des économistes sont aussi embrouillées que leur boule de cristal.

« Je reste confiant sur nos prévisions économiques, mais l’incertitude vient de monter d’un cran », reconnaît Matthieu Arseneau, chef économiste adjoint à la Banque Nationale.

« Ça pose un risque assez grand, mais il est difficile de voir de quel bord ça va aller pour l’instant », dit de son côté Robert Hogue, économiste à la Banque Royale.

En fait, tout dépend de l’importance des restrictions et de leur durée. Si les mesures annoncées jeudi par le gouvernement Legault devaient prendre de l’ampleur, l’économie finirait par en pâtir. Et encore davantage, bien sûr, si d’autres provinces ou pays emboîtaient le pas, comme l’Ontario. Une série de restrictions mondiales pourraient ralentir le rétablissement des chaînes d’approvisionnement, qui a un impact sur le niveau des prix.

Des éclaircissements de l’Afrique du Sud

Pour le moment, on sait peu de choses de ce variant Omicron. Vendredi, tout de même, un compte rendu des autorités sud-africaines a apporté des éclaircissements.

Selon le ministre de la Santé, Joe Phaahla, 1,7 % des cas déclarés positifs ont été admis à l’hôpital durant la 2e semaine de cette 4e vague, où le variant Omicron domine (78 % des cas en Afrique du Sud).

En comparaison, cette proportion était de 19 % durant la même semaine de la 3e vague, menée par le variant Delta. À première vue, donc, le variant Omicron est moins agressif, puisque le taux d’admission des malades à l’hôpital est 11 fois moins grand.

L’information est très importante puisque les restrictions sanitaires au Québec comme ailleurs s’expliquent surtout par la volonté des autorités de préserver les hôpitaux d’un engorgement. Si le variant Omicron est moins sévère pour les personnes qui l’attrapent, l’impact sur l’économie sera moins important.

Mais il y a un hic. Le variant Omicron paraît beaucoup plus contagieux que le Delta. En Afrique du Sud, il y a eu plus de 20 000 cas durant la 2e semaine de cette 4e vague, soit 5 fois plus que les 4400 cas de la même semaine de la 3e vague. Bref, au bout du compte, les hospitalisations ont été 2 fois moindres, et non 11 fois, comme le laissent voir les taux d’hospitalisation.

Et encore là, les données sont à interpréter avec prudence, puisqu’on ne connaît pas l’effet de la vaccination sur le taux d’hospitalisation moindre de la 4e vague (44 % des Sud-Africains sont vaccinés aujourd’hui, surtout les plus âgés).

Visionnez la conférence du ministre sud-africain de la Santé (en anglais)

Benoit Durocher, économiste principal au Mouvement Desjardins, croit que le variant Omicron ralentira la récupération de l’économie du Québec et du Canada.

Ça met plus de sable dans l’engrenage. Ça va ralentir, mais jusqu’à quel point ? En même temps, c’est un film qu’on a déjà vu. Il y aura une hausse des cas, puis une baisse au printemps.

Benoit Durocher, économiste principal au Mouvement Desjardins

Autre aspect à considérer : les secteurs qui souffriront, comme la restauration et les arts et spectacles, auront l’appui financier des gouvernements du Québec et du Canada. De plus, les consommateurs dépenseront ailleurs l’argent qu’ils réservaient pour ces secteurs, annulant en partie l’effet économique négatif des restrictions. Qu’on se rappelle le boom de la rénovation en 2021.

Desjardins maintient donc, pour l’instant, sa prévision de croissance du PIB réel de 2,8 % au Québec en 2022 et de 3,9 % au Canada. Le service économique de l’institution estime que les taux d’intérêt monteront à deux reprises en 2022, soit en avril et en juillet, chaque fois de 0,25 point de pourcentage. Une autre hausse aurait lieu en janvier 2023, faisant passer le taux directeur de 0,25 % aujourd’hui à 1 % début 2023.

La Banque Nationale est un peu plus optimiste. Selon elle, le PIB croîtra en 2022 de 3,3 % au Québec et de 4,1 % au Canada (après soustraction de l’inflation). Cette progression serait moindre qu’en 2021 (6,2 % au Québec et 4,6 % au Canada), qui récupérait d’une année 2020 plus difficile.

Le service économique de la Banque prévoit 5 hausses du taux directeur en 2022, ce qui le ferait passer de 0,25 % aujourd’hui à 1,5 % à la fin de 2022, au même niveau qu’avant la pandémie.

Le variant Omicron pourrait donc donner du fil à retordre à la Banque du Canada. La plupart des économistes s’attendent à ce que la Banque n’ait d’autre choix que d’augmenter les taux, vu la force de l’économie – illustrée par la chute du taux de chômage – et la hausse de l’inflation.

D’ailleurs, d’autres banques centrales ont commencé à hausser leur taux d’intérêt, comme la Banque d’Angleterre, ou annoncé des hausses pour 2022, comme la Réserve fédérale américaine.

Mais qu’adviendra-t-il si la relance de l’économie est freinée par les conséquences du variant Omicron ? Que fera la Banque du Canada si le chômage augmente, mais que l’inflation demeure élevée ?

À suivre attentivement.