(Québec) En reconnaissance des dommages passés, Hydro-Québec versera 32 millions sur 23 ans à la communauté d’Unamen Shipu, où la rivière du Petit Mécatina est dans le viseur de la société d’État. Pour les Innus, cette entente se veut un prérequis à toutes négociations futures.

Le gouvernement Legault a donné le feu vert à l’entente Mishta Uashat Lac-Robertson conclue entre Hydro-Québec et Unamen Shipu et qui prévoit le versement de 32 millions répartis en paiements annuels pour les 23 prochaines années.

Il s’agit d’une entente de compensation pour l’aménagement en 1995 de la centrale hydroélectrique du Lac-Robertson. Les sommes annoncées lundi serviront à financer différents projets sociaux identifiés par la communauté. Unamen Shipu veut notamment construire une résidence pour aînés de 21 places.

Le ministre responsable des Premières Nations et des Inuit, Ian Lafrenière, et la ministre de l’Emploi, Kateri Champagne Jourdain, qui est aussi ministre responsable de la Côte-Nord, se sont déplacés lundi dans la communauté, située à plus 1300 kilomètres à l’est de Montréal. Le grand patron d’Hydro-Québec, Michael Sabia, est aussi sur place.

La première fois que j’ai pris connaissance de l’histoire [de la centrale du Lac-Roberston], j’ai appris que ce projet avait été fait sans la collaboration de la communauté. J’ai seul mot : inacceptable. Je suis désolé.

Michael Sabia, PDG d’Hydro-Québec

« C’était mon intention de rectifier la situation, nous allions faire les choses autrement […] je comprends qu’aucun montant, qu’aucune entente n’efface le passé […] ceci dit nous avons maintenant de meilleures bases pour bâtir une relation de confiance et de respect », a-t-il ajouté.

L’entente se veut un premier pas vers la conclusion de partenariats futurs pour le développement énergétique. Comme le rapportait La Presse en avril, le gouvernement Legault, qui rêve de nouveaux barrages, aura fort à faire pour obtenir le consentement des Innus.

PHOTO JOSIE DESMARAIS, ARCHIVES LA PRESSE

Le chef d’Unamen Shipu, Raymond Bellefleur

Lors de notre visite dans la communauté, le chef Raymond Bellefleur a été clair : pas question de discuter de la possibilité de construire un barrage sur la rivière du Petit Mécatina ou de nouveaux projets énergétiques avant la conclusion d’une entente sur la centrale hydroélectrique du Lac-Robertson.

Cette centrale n’est pas reliée au réseau de transport principal d’Hydro-Québec. Elle alimente des communautés à proximité et celles situées le long de la côte labradorienne du détroit de Belle Isle.

« La décision est à vous »

Le PDG d’Hydro-Québec a d’ailleurs voulu être rassurant, lundi. « La transparence est indispensable. […] Si on développe une autre installation ici ou non, la décision est à vous. La décision est à vous. Ce n’est pas notre décision », a-t-il répété lorsqu’un membre de la communauté a exprimé ses inquiétudes pour la suite lors de la conférence de presse.

Au cours des derniers mois, le gouvernement Legault et Hydro-Québec n’ont pas lésiné sur les efforts pour gagner la confiance de la communauté. Le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon s’est rendu sur place à deux reprises. Michael Sabia s’est aussi déplacé en novembre dernier pour remettre une lettre d’excuses au chef de l’administration précédente.

Une entente similaire est aussi en préparation avec la communauté voisine de Pakua Shipi.

Québec veut que les Premières Nations deviennent propriétaires des futurs ouvrages énergétiques pour accélérer leur développement. Hydro-Québec est à la croisée des chemins et doit doubler sa production énergétique d’ici 2050. Cela signifie ajouter 200 térawattheures d’énergie, dont 60 térawattheures d’ici 2035. C’est l’équivalent de construire sept fois et demie le mégacomplexe de la Romaine d’ici 11 ans.

L’appétit énergétique pour soutenir la croissance économique et décarboner le Québec est tel que la société d’État a ressorti du tiroir où elle dormait depuis 20 ans l’idée d’un projet hydroélectrique sur la rivière du Petit Mécatina, en Basse-Côte-Nord.

L’annonce de la reprise des études, en avril 2023, a provoqué une levée de boucliers.

En entrevue en avril, Pierre Fitzgibbon affirmait que son souhait pour la Basse-Côte-Nord est, à court terme, de développer des projets éoliens et d’augmenter la puissance des ouvrages existants.