Un tribunal du Maine vient d’éliminer le dernier obstacle important qui menaçait le mégacontrat d’exportation d’Hydro-Québec vers le Massachusetts en permettant la reprise des travaux de construction de la ligne de transport qui doit acheminer l’électricité à Boston.

À moins que les opposants interjettent appel de la décision rendue par un jury unanime mercredi, les travaux stoppés depuis la fin de 2021 pourraient reprendre sous peu des deux côtés de la frontière.

« On va collaborer avec nos partenaires pour déterminer les prochaines étapes », a fait savoir la porte-parole d’Hydro-Québec, Lynn St-Laurent, en ajoutant ne pas pouvoir se prononcer sur un échéancier précis.

La société d’État s’est dite très satisfaite de ce jugement, qui était le dernier obstacle juridique important devant ce projet qui doit générer des revenus de 10 milliards pour Hydro-Québec.

Le contrat avec le Massachusetts a été conclu en 2018. Il porte sur l’exportation de 9,45 térawattheures par année pendant 20 ans. Les premières livraisons devaient commencer en décembre 2022.

Référendum contesté

Un premier projet de construction d’une ligne de transport à travers le New Hampshire a dû être abandonné devant l’opposition de la population de l’État. Le trajet actuel, qui passe par le Maine, était donc un plan B et il s’est lui aussi heurté à un fort mouvement de contestation.

Dans l’État du Maine, une improbable coalition formée d’environnementalistes et de producteurs d’énergie fossile a combattu le projet de ligne de transport par tous les moyens disponibles.

Cette opposition a culminé avec un référendum citoyen au terme duquel la population a voté à 59 % contre le projet de ligne de transport dont le coût est estimé à 1,3 milliard US et qui est sous la responsabilité d’Avangrid, le partenaire américain d’Hydro-Québec.

Le partenaire d’Hydro-Québec a contesté les résultats du référendum en plaidant avoir déjà exécuté environ 40 % des travaux de construction et investi 450 millions US avant d’avoir dû tout arrêter après la consultation.

La Cour suprême de l’État a décidé que le référendum violait le droit acquis du promoteur de réaliser un projet ayant obtenu tous les permis et autorisations requises avant le début des travaux.

La cour a toutefois demandé à un tribunal de première instance de statuer sur la bonne foi du promoteur qui a commencé les travaux alors qu’il savait qu’un référendum pourrait menacer son projet.

C’est cette dernière hypothèque qui vient d’être levée et qui permet la reprise des travaux à l’arrêt depuis 33 mois et la réalisation du contrat d’exportation d’électricité.

Un actif pour « plusieurs décennies »

La ligne de transport est longue de 233 kilomètres, dont 100 au Québec, entre le poste de Saint-Adrien-d’Irlande et la frontière américaine. Les travaux sur la portion québécoise, dont le coût est estimé à 600 millions, avaient aussi été arrêtés après le référendum du Maine.

CAPTURE D’ÉCRAN DU SITE D’HYDRO-QUÉBEC

Tracé retenu pour la ligne d’interconnexion des Appalaches-Maine

Hydro-Québec, qui voit venir la fin de ses surplus et qui est submergée par une nouvelle demande pour son électricité renouvelable, n’a jamais songé à se retirer de ce contrat pour allouer l’électricité à d’autres fins, avait fait savoir son ex-PDG, Sophie Brochu, peu avant son départ. « Hydro-Québec n’est pas dans la business de se sortir de ses contrats. On honore les contrats qu’on a », avait-elle assuré, en ajoutant que les batailles juridiques étaient menées par son partenaire américain.

Même si cinq années se sont écoulées depuis sa signature et que les livraisons d’électricité seront retardées, la rentabilité du contrat pour Hydro-Québec est toujours là, assure sa porte-parole.

Les coûts de construction de la portion américaine de la ligne sont assumés par le partenaire américain, mais Hydro-Québec a dépensé plusieurs millions de dollars pour défendre les intérêts du projet pendant la campagne référendaire.

« Le contrat demeure payant pour Hydro-Québec », assure Lynn St-Laurent, en ajoutant qu’une ligne de transport est un actif pour « plusieurs décennies », au-delà de la durée du contrat avec le Massachusetts.

Hydro-Québec a conclu un autre gros contrat d’exportation avec l’État de New York, qui dépend de la construction d’une ligne de transport passant sous le lac Champlain et le fleuve Hudson pour rejoindre la ville de New York. Le projet connu sous le nom de Champlain Hudson Power Express est en cours de réalisation.