Pas facile d’attirer des programmeurs dans une ville où se côtoient Ubisoft, Electronic Arts, Warner Bros. Games et d’autres grosses pointures du jeu vidéo. L’entreprise de logiciels pour le traitement de photos Médiaclip ne peut pas rivaliser avec ces multinationales sur le plan des salaires. Elle tente donc de se démarquer avec un atout inédit : un grand chalet au bord d’un lac, offert pour le télétravail ou des fins de semaine en famille.
« On se bat contre des gros joueurs. En termes de salaire, on n’est même pas proches », dit Marion Duchesne, fondatrice et chef de la direction de Médiaclip. L’entreprise de Montréal, installée dans un immeuble industriel reconverti du quartier Mile-Ex, compte l’application Miméo, Fujifilm et Costco parmi ses principaux clients.
Pour attirer les talents, l’entreprise tâche de rivaliser sur un autre terrain que la rémunération : celui des avantages sociaux.
Tout le monde a des tables de baby-foot. Certains ont mis des murs d’escalade, mais ils font faire du temps supplémentaire à tous leurs employés !
Marion Duchesne, chef de la direction de Médiaclip
De son côté, Marion Duchesne voulait montrer que dans sa boîte, la conciliation travail-famille (ou simplement vie-famille), c’était du sérieux.
De l’air pour les programmeurs
Durant la pandémie, elle constatait que plusieurs de ses employés passaient leurs journées de travail seuls dans leur appartement. Ou pire : coincés à deux ou trois colocataires dans des logements trop petits.
« Certains travailleurs qui avaient déjà accès à un chalet en profitaient. D’autres sont allés travailler dans le Sud, en Colombie-Britannique… Tout le monde était un peu éparpillé. Je trouvais ça triste. »
Marion Duchesne a eu l’idée de leur fournir elle-même un petit coin de nature pour travailler.
Mais la recherche de la propriété idéale s’est avérée ardue.
« On était pendant la COVID, ça fait que tout le monde se garrochait sur les chalets, raconte-t-elle. J’en avais visité un au lac des Piles, et c’était vraiment trop cher pour ce que c’était. »
L’agent d’immeubles lui a ensuite montré une propriété mal-aimée dans le secteur de Saint-Gérard-des-Laurentides, à Shawinigan. Les vendeurs avaient négligé la mise en valeur de la propriété (home staging).
Il nous avait montré des photos et c’était vraiment laid. Les murs étaient beiges, il y avait des têtes de castor partout…
Marion Duchesne, à propos des premières images de ce qui deviendrait le chalet Médiaclip
Mais sur place, la patronne de Médiaclip a su qu’elle avait trouvé le petit coin de paradis qu’il fallait à ses employés.
« Quand je suis allée, j’ai capoté ma vie ! dit en rigolant Marion Duchesne. On est sur le bord d’un lac écologique, le lac à la Perchaude… »
Achetée 675 000 $ en octobre, la vaste demeure n’avait rien de particulièrement abordable. Mais elle avait presque tout ce dont Médiaclip avait besoin : la taille, l’emplacement, les possibilités d’aménagement à l’intérieur et à l’extérieur…
L’entreprise a fait refaire le sous-sol en y aménageant des espaces pour le télétravail et une chambre familiale supplémentaire. « Ce même chalet-là dans les Laurentides au nord de Montréal, ça vaut plus de 1 million ! », assure Marion Duchesne.
Depuis, les employés s’y rendent à volonté pour travailler. Cinq chambres sont aménagées pour les accueillir.
À tour de rôle, ils peuvent aussi réserver le chalet la fin de semaine. « Je suis allée par ancienneté : choisissez vos dates », explique la patronne.
Pour la fête nationale, régime spécial : tout le monde pouvait y aller. « Ils se sont fait un petit party. »
Un atout considérable
La réputation du nouveau « chalet Médiaclip » le précède même lors des entrevues d’embauche.
« Des candidats me demandent : ‟Il est où, le chalet ?” » Ça suscite vraiment l’intérêt des gens. »
Le chalet ressort clairement dans les sondages de satisfaction que mène Médiaclip auprès de ses employés. « Sauf que ça a fait un effet d’entraînement. Les gens disent : ‟C’est cool, mais si on travaillait quatre jours par semaine, on en profiterait plus !” », dit en riant Marion Duchesne.
Pas fou. Pour la première fois, son entreprise teste l’horaire de quatre jours et demi cet été. « Et aménager le même nombre d’heures sur quatre jours, ça peut être possible aussi. »
Avis aux intéressés. Par les temps qui courent, Médiaclip, qui compte 35 employés au total, cherche 9 nouveaux développeurs, dit Marion Duchesne. « Le manque d’employés, c’est le principal frein à ma croissance. »