L’ingérence étrangère

Les policiers de la GRC en ont actuellement « plein les bottes » avec les enquêtes sur l’ingérence étrangère, affirme le commissaire Mike Duheme, qui souligne que ces dossiers représentent un défi de taille pour les forces de l’ordre.

« On en voit de plus en plus », confirme M. Duheme. Et le phénomène donne du fil à retordre aux enquêteurs.

« C’est complexe à enquêter », affirme le commissaire. D’autant plus que très souvent, les agences de renseignement canadiennes, comme le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) ou le Centre de la sécurité des communications (CST), accumulent une tonne de preuves de leur côté qui ne peuvent pas être transmises à la police ni utilisées dans un procès.

J’ose espérer que dans la commission d’enquête sur l’ingérence étrangère, on va aborder la question de l’utilisation du renseignement comme élément de preuve.

Mike Duheme, commissaire de la Gendarmerie royale du Canada

Par exemple, lorsque le premier ministre Justin Trudeau affirme détenir des informations sur l’implication d’agents indiens dans l’assassinat du militant séparatiste sikh Hardeep Singh Nijjar, cela ne signifie pas nécessairement que celles-ci seront accessibles aux policiers qui mènent l’enquête sur le meurtre.

« Le premier ministre a accès à des informations auxquelles moi, je n’ai pas toujours accès », souligne M. Duheme, qui ajoute toutefois que « toutes les ressources appropriées » sont mobilisées pour le volet criminel de l’affaire.

Les lois et le fardeau de la preuve 

Certaines lois devraient être changées, de façon à faciliter le travail des policiers et l’échange d’information, et le fardeau de la preuve devrait être renversé pour certains crimes.

Par exemple, les drogues de synthèse sont illégales, mais pas l’importation des produits servant à leur fabrication et des machines servant à les encapsuler. Le commissaire propose que les policiers puissent saisir le matériel et que l’importateur ait à justifier ce qu’il fait avec ces produits et cette machinerie.

PHOTO FOURNIE PAR LA GRC

En 2019, les enquêteurs de l’Unité mixte d’enquête contre le crime organisé (UMECO) de la Division C de la GRC ont arrêté plusieurs personnes des régions de Toronto et de Montréal dans le démantèlement d’un important réseau de recycleurs d’argent provenant de la vente de la drogue (Projet Collecteur).

« L’arrêt Jordan [qui limite la durée du processus judiciaire] ne nous aide pas, mais dans un dossier de blanchiment d’argent, c’est seulement une fois que les éléments de preuve ont été saisis que l’enquête commence. Renversons le fardeau de la preuve. Tu as 4 millions de dollars dans ton compte de banque ? Comment as-tu obtenu tout cet argent ?

« Le gouvernement envisage de créer une nouvelle agence d’enquête sur le financement qui s’occuperait seulement du blanchiment. Mais si tu ne changes pas la législation qui existe en matière de blanchiment d’argent, tu n’avanceras pas », dit-il.

Le crime organisé

« S’il y a une chose sur laquelle on se penche beaucoup [actuellement], c’est comprendre les cartels mexicains au Canada. Ils sont présents. Mais c’est l’ampleur de cette présence dont nous tentons de dresser un portrait. Le fentanyl et les cartels, c’est le même problème. Il y a des choses qui proviennent du Mexique et qui arrivent sur la côte Ouest par camion. Quelle est leur influence ? On voit beaucoup de motards et d’autres criminels qui se rendent au Mexique. On dirait que c’est plus fort que la Colombie, maintenant. »