(Ottawa) Le Canada a confirmé vendredi avoir participé à la planification des « frappes de précision » américano-britanniques contre des zones du Yémen contrôlées par les houthis. Londres et Washington répètent pour leur part que l’opération menée jeudi relevait de la « légitime défense ».

L’appui militaire canadien a été fourni par des membres du personnel des Forces armées canadiennes (FAC) déployés au sein du Commandement central des États-Unis. Ils ont contribué en soutenant « la planification » dans le cadre de l’opération Fondation, a indiqué le ministère de la Défense nationale vendredi.

« Aucun équipement militaire des FAC n’a été utilisé dans la conduite des frappes contre les positions houthies », a spécifié le ministère de la Défense.

Les frappes en question ont été menées par les forces armées des États-Unis et du Royaume-Uni avec la collaboration du Canada, de l’Australie, de Bahreïn, du Danemark, de l’Allemagne, des Pays-Bas, de la Nouvelle-Zélande et de la Corée du Sud.

Elles ont eu lieu après des semaines d’attaques menées par les houthis contre des navires qu’ils disent liés à Israël en mer Rouge. Ces attaques, affirment les houthis, visent à protester contre les bombardements menés dans la bande de Gaza par Israël en réponse à l’attaque sanglante du Hamas en territoire israélien le 7 octobre dernier.

Des responsables américains et britanniques ont déclaré avoir attaqué jeudi une trentaine de sites militaires utilisés par le groupe rebelle soutenu par l’Iran au Yémen, afin de réitérer que les alliés ne toléreraient pas les attaques contre des navires dans la mer Rouge, un secteur important pour le trafic maritime mondial.

Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a demandé vendredi à « toutes les parties » d’éviter « l’escalade », selon son porte-parole. À la demande de la Russie, le Conseil de sécurité devait se réunir en urgence vendredi après-midi.

Le pays de Vladimir Poutine y a alors dénoncé une « agression flagrante » et une « frappe massive » sur « le territoire du Yémen » de la part des États-Unis et du Royaume-Uni.

PHOTO CARLOS OSORIO, ARCHIVES REUTERS

Justin Trudeau

Ottawa maintient sa position

Ottawa a maintenu pour sa part son soutien à l’opération qui a fait cinq morts.

« Le Canada appuie ce que les États-Unis et le Royaume-Uni ont fait […], mais nous n’avons pas offert de ressources opérationnelles pour les frappes », a confirmé le premier ministre Justin Trudeau en marge d’une annonce sur le logement en Ontario vendredi.

Ces attaques étaient « très ciblées » et elles étaient conçues dans le but d’empêcher les houthis de continuer de viser les voies maritimes, ce qui est « absolument inacceptable et dangereux », en plus d’être contraire à la Charte des Nations unies et des résolutions du Conseil de sécurité, a poursuivi le premier ministre.

Le Canada appelle les houthis « à cesser leurs attaques immédiatement » et réaffirme que ceux-ci « doivent assumer les conséquences de leurs actes », ont indiqué dans une déclaration commune la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, et le ministre de la Défense nationale, Bill Blair.

Divergence dans l’opposition

L’action militaire a le soutien total du chef conservateur Pierre Poilievre. « Les houthis, c’est [un groupe] qui est appuyé par le gouvernement d’Iran qui menace la sécurité internationale, et qui harcèle et menace les soldats de nos alliés », a-t-il dit en point de presse à Winnipeg, au Manitoba.

Les frappes menées contre les houthis ne sont pas passées comme une lettre à la poste aux États-Unis, où des élus, y compris certains démocrates, ont reproché au président américain Joe Biden de ne pas avoir consulté le Congrès avant de passer à l’action.

Ici, la députée néo-démocrate Heather McPherson a exprimé un sentiment similaire. « Les parlementaires n’ont pas été consultés. En cette période dangereuse, les libéraux font des choix dangereux », a-t-elle reproché au gouvernement sur X, jeudi soir.

« Le Canada devrait faire pression en faveur d’un cessez-le-feu à Gaza. Au lieu de cela, les libéraux se joignent à une autre action militaire sans aucune idée de ce qui pourrait arriver ensuite », a-t-elle poursuivi sur la même plateforme.

Invité à commenter cet élément, Justin Trudeau s’est contenté d’affirmer que le gouvernement avait agi « à l’intérieur de ses autorités ».

En effet, le gouvernement n’a pas besoin de l’aval du Parlement avant de prendre des décisions de nature militaire. La contribution du Canada à l’opération a d’abord été dévoilée par Washington. L’annonce canadienne est venue plusieurs heures après, tard jeudi soir.

Avec l’Agence France-Presse et Vincent Larin, La Presse