(Québec) Les citoyens de Jean-Talon sont plongés dans leur quatrième élection complémentaire depuis 2008. Alors que des enjeux comme le logement, le coût de la vie, l’environnement ou encore la mobilité préoccupent les différents candidats, ils ont tous des défis propres à relever en vue du scrutin du 2 octobre prochain.

Faire entendre sa voix

La candidate caquiste Marie-Anik Shoiry affirme que son saut en politique est simplement la continuité de son engagement dans sa communauté. La directrice générale et fondatrice de « Vide ta sacoche » est consciente que si elle est élue, elle se retrouvera dans un caucus déjà imposant.

De plus, les anciennes députées caquistes Claire Samson et Émilie Foster ont indiqué – dans des mots bien différents – que la liberté d’expression était limitée au sein de la Coalition avenir Québec (CAQ). Dans ce contexte, Mme Shoiry pense-t-elle être en mesure de faire entendre les revendications de ses futurs commettants si elle est élue ?

« Je pense que je vais pouvoir, si je suis élue, avoir ma voix au caucus et faire avancer les choses, du moins c’est mon intention. […] Je pense qu’on peut avoir notre place. J’y crois sinon je ne me serais pas lancée », dit-elle.

Mme Shoiry dit avoir eu des discussions avant de prendre la décision de se lancer pour s’assurer qu’elle puisse porter les dossiers qui lui tiennent à cœur. « Ma compréhension, c’est qu’au caucus, il y a une grande liberté d’expression et que tous peuvent dire ce qu’ils pensent et faire part de leur opinion. Moi, c’est ce qu’on m’a dit et j’y crois », soutient-elle.

Calmer les attentes et créer la surprise

La candidate du Parti libéral du Québec (PLQ) dans Jean-Talon, Élise Avard Bernier, est bien consciente que la situation n’est pas facile pour son parti qui a détenu cette circonscription jusqu’à l’arrivée de la caquiste Joëlle Boutin en 2019.

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La candidate du PLQ, Élise Avard Bernier

Selon l’agrégateur de sondages Qc125, le PLQ a bien peu de chances de gagner dans Jean-Talon. Une lutte à deux se dessine entre la CAQ et le Parti québécois (PQ). 

« Je ne suis pas venue en politique pour perdre, mais à ce jour, est-ce que je vais passer du quatrième ou du cinquième rang au premier ? Je ne pense pas », admet la candidate tout en croyant pouvoir créer la surprise.

Elle soutient tout de même qu’il reste encore de l’espoir pour son parti dans Jean-Talon. « Je ne pense pas que les libéraux ne sont plus dans Jean-Talon. Je pense qu’il faut aller les rechercher et leur donner confiance », assure-t-elle.

« Le PLQ est en reconstruction et je pense que c’est un bon moment pour embarquer avec les libéraux. Je crois que j’incarne le renouveau », ajoute-t-elle.

Enfin gagner

Lors de l’élection générale de 2022, le solidaire Olivier Bolduc a terminé deuxième avec 24 % des votes. Alors qu’il en est à sa troisième campagne dans Jean-Talon et que les projections de vote le placent en troisième position derrière le PQ et la CAQ, M. Bolduc est néanmoins sûr que cette fois, c’est la bonne.

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Le candidat de QS, Olivier Bolduc

« On a vu qui a été élu dans la région de Québec depuis 2018. Il y a eu des gens de la CAQ et de QS qui ont été élus. Il n’y a pas d’autres partis qui ont fait élire des députés dans la région de Québec », soutient-il.

Et la stratégie du candidat solidaire est déjà bien définie : il cherche à rallier les sympathisants solidaires et à convaincre les indécis qu’il est le bon choix pour représenter les gens de la circonscription.

« C’est sûr que si quelqu’un dit qu’il vote fermement pour la CAQ, il n’y a pas vraiment de temps à perdre-là », affirme-t-il, arguant que QS et le parti de François Legault sont à l’opposé du spectre politique.

Incarner le gouvernement en attente

Cette élection partielle a débuté sur les chapeaux de roue pour le candidat péquiste Pascal Paradis. La Presse a révélé qu’il avait eu des discussions avec la CAQ quant à la possibilité de se lancer sous la bannière caquiste lors du dernier scrutin général en 2022. M. Paradis affirme que durant ces discussions, le directeur de cabinet de François Legault, Martin Koskinen, lui avait confié que la CAQ allait abandonner le troisième lien autoroutier après l’élection, ce que nie avec véhémence François Legault.

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Le chef du PQ, Paul St-Pierre Plamondon, et le candidat Pascal Paradis

Maintenant le principal intéressé veut passer à autre chose et est déjà tourné vers l’avenir. Selon lui, son parti peut convaincre qu’il a ce qu’il faut pour remplacer la CAQ. « On voit venir les prochaines élections, et on voit ce que les sondages montrent. Vous voyez que de plus en plus les gens voient le PQ comme l’alternative, comme le gouvernement en attente et ça je pense que c’est très dynamisant », soutient-il.

Et bien que la circonscription n’ait jamais fait élire un député péquiste, il assure que les citoyens lui parlent de la raison d’être du PQ. « Les gens me posent des questions sur la souveraineté », dit-il.

Tenter d’imposer ses thèmes

Bien que ce soit à Québec que le Parti conservateur d’Éric Duhaime a obtenu ses meilleurs résultats lors du dernier scrutin en 2022, Jean-Talon ne semble pas une circonscription très favorable aux idées du parti. Le chef a d’ailleurs décidé de ne pas se lancer et de céder sa place à un jeune étudiant de 24 ans, Jesse Robitaille.

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Le candidat conservateur Jesse Robitaille et le chef du PCQ, Éric Duhaime

Ce dernier fait campagne autour de deux propositions simples : contre le tramway et pour le troisième lien autoroutier à l’Est.

La partielle est également l’occasion pour le PCQ de tenter d’imposer ses thèmes dans le débat public, comme la critique du wokisme. M. Robitaille affirme d’ailleurs avoir quitté l’Université Laval en raison du climat de censure.

« J’avais une professeure qui ne permettait pas aux étudiants de dire le mot “homme” et le mot “femme” parce que ces mots étaient transphobes selon elle », relate-t-il.

« Avec le wokisme, avec l’état de censure, la liberté d’expression est menacée et c’est très préoccupant », ajoute le candidat conservateur.

Jesse Robitaille soutient que la plateforme de son parti est en accord avec la majorité de gens de Québec. Comment expliquer alors que le PCQ ne semble pas avoir le vent dans les voiles ? « C’est souvent une question de visibilité. Il faut rencontrer les gens et faire connaître notre plateforme », affirme-t-il.