(Ottawa) Le directeur du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), David Vigneault, réfute les propos du ministre Bill Blair selon lesquels l’agence de renseignements n’a pas jugé opportun de l’informer, en mai 2021, que le député conservateur Michael Chong était la cible de manœuvres d’intimidation de la part du régime communiste chinois.

Le grand patron du SCRS a certifié mardi soir devant un comité parlementaire qu’une note d’avertissement au sujet des activités de la Chine visant M. Chong et des membres de sa famille vivant encore à Hong Kong avait été préparée spécifiquement pour Bill Blair, qui était alors ministre de la Sécurité publique.

Or, M. Blair a affirmé il y a une dizaine de jours devant ce même comité qu’il n’avait jamais reçu une telle note d’avertissement parce que M. Vigneault avait déterminé qu’il ne s’agissait pas de renseignements que le ministre avait besoin de connaître.

M. Blair, qui est aujourd’hui ministre de la Protection civile, a aussi indiqué qu’il n’était pas au courant des menaces visant M. Chong avant la publication d’un reportage dans le Globe and Mail à ce sujet en mai. Il a soutenu que s’il avait été informé de menaces visant un député, il aurait agi.

M. Blair avait aussi indiqué que les questions sur les raisons pour lesquelles l’information ne lui avait pas été communiquée devraient être soumises au directeur du SCRS.

Mardi soir, M. Vigneault a donc contredit les déclarations de M. Blair après avoir été interpellé à plusieurs reprises par des députés conservateurs siégeant au comité de la procédure de la Chambre des communes. Ce comité se penche depuis quelques semaines sur les allégations selon lesquelles des députés ont été victimes d’ingérence étrangère.

Le Service canadien du renseignement de sécurité et spécifiquement moi avons partagé l’information avec le ministère de la Sécurité publique avec la directive très précise de [la] partager avec le ministre [Bill Blair].

David Vigneault, en réponse aux questions du député conservateur Luc Berthold

« Je ne doute pas du fait que le ministre ne l’a pas reçue. Je pense que ses commentaires ont été très clairs. Mais je pense aussi que c’est important de comprendre qu’on avait partagé le renseignement et la note d’information », a ajouté le grand patron du SCRS.

Des notes d’avertissement de l’Unité de gestion des enjeux, considérées comme de la plus haute importance et rédigées pour qu’elles soient absolument lues par le ministre de la Sécurité publique, le SCRS en produit environ deux ou trois par semaines.

Des informations « dans un trou noir »

Pourquoi Bill Blair a-t-il affirmé le contraire devant le comité ? M. Vigneault n’a pas voulu s’avancer. Il s’est contenté de dire qu’il s’agissait visiblement d’une lacune dans la transmission des informations entre les agences de renseignements et les ministères et les élus qui doit être corrigée et qui est en train de l’être.

Le député conservateur Luc Berthold a dit trouver inacceptable que le SCRS dispose d’un budget annuel frisant les 650 millions de dollars pour recueillir des renseignements touchant la sécurité nationale et que des informations cruciales concernant des menaces visant des élus tombent carrément « dans un trou noir ».

Il y a deux semaines, la conseillère à la sécurité nationale auprès du premier ministre, Jody Thomas, avait utilisé cette même expression afin d’expliquer pourquoi la note d’avertissement avait été transmise en mai 2021 aux sous-ministres de la Sécurité publique, des Affaires mondiales et de la Défense nationale, mais qu’elle n’avait pas été communiquée aux personnes appropriées à Ottawa.

Dans la foulée de cette controverse, le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, a émis une directive ministérielle qui exige que le SCRS informe rapidement tout élu qui serait victime d’ingérence étrangère.

Avec La Presse Canadienne