(Ottawa) Deux appareils CC-130 Hercules des Forces armées canadiennes sont dans la région du Soudan, prêts à effectuer des vols d’évacuation dès que « les conditions le permettront » – conditions qui, lorsqu’elles seront réunies, risquent de ne pas le rester très longtemps, prévient Affaires mondiales Canada.

La ministre de la Défense nationale, Anita Anand, a fait le point, mercredi, alors que s’écoulent les heures du cessez-le-feu de 72 heures entré en vigueur lundi. La trêve est, au demeurant, très fragile, de nouveaux combats entre l’armée soudanaise et les paramilitaires ayant éclaté dans la capitale, Khartoum.

« Des membres et des ressources des Forces armées canadiennes ont été envoyés dans la région et planifient des opérations d’évacuation […]. Ils coordonnent, en étroite collaboration avec nos alliés et nos partenaires, leurs efforts en vue de pouvoir évacuer le plus grand nombre possible de personnes », a-t-elle indiqué.

Les 200 militaires canadiens récemment déployés à Djibouti et en Jordanie « sont prêts » à commencer les vols d’évacuation et le feront « dès que les conditions au sol le permettront », a déclaré Mme Anand. Et elles ne tiendront pas bien longtemps, ont prévenu de hauts fonctionnaires gouvernementaux.

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Anita Anand, ministre de la Défense nationale

Car au-delà des prochains jours, l’environnement sécuritaire risque de se dégrader dans le pays du nord-est de l’Afrique, et il faut donc profiter de la « fenêtre » qui s’est ouverte tandis qu’elle l’est, a expliqué la sous-ministre adjointe de la section consulaire chez Affaires mondiales, Julie Sunday.

Même si la trêve offre une occasion, cela ne rend pas l’opération baptisée « Savane » simple pour autant : un vol canadien qui devait atterrir mercredi au Soudan a été annulé, selon le vice-amiral Bob Auchterlonie, commandant du Commandement des opérations interarmées du Canada.

Chaque appareil CC-130 Hercules peut transporter environ 100 passagers. La première portion du trajet sera aux frais du gouvernement, mais une fois en sécurité dans un tiers pays sûr, les personnes évacuées devront payer leur billet vers le Canada, s’ils désirent rentrer. Des prêts d’urgence pourraient être consentis.

En plus de ce duo d’avions dans la région, le Canada a déployé deux navires en mer Rouge, à Port-Soudan, une frégate et un navire de ravitaillement. Des évacuations maritimes sont aussi possibles, mais ce n’est pas l’option que les Forces armées privilégient, a signalé le vice-amiral Auchterlonie.

180 Canadiens secourus

Sur quelque 1800 Canadiens qui se trouvent au Soudan, selon le registre d’Affaires mondiales, environ 700 avaient réclamé une forme d’aide, a indiqué la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, lors d’une mêlée de presse, mercredi.

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Mélanie Joly, ministre des Affaires étrangères

Un peu plus tard, la sous-ministre Julie Sunday a précisé que 180 Canadiens avaient été secourus jusqu’à présent. Elle a remercié pour leur apport l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et la Grèce, ainsi que les États-Unis, qui ont évacué les diplomates de l’ambassade du Canada à Khartoum.

Le Canada accuse un retard par rapport à d’autres pays en matière de rapatriement.

Lorsqu’on lui a demandé d’expliquer l’écart avec des pays qui sont, eux, parvenus à établir des ponts aériens au cours des derniers jours, Mme Anand s’est contentée de remercier les pays qui ont porté assistance aux Canadiens coincés au Soudan.

Et les Soudanais ?

Les sièges des vols d’évacuation canadiens sont réservés aux citoyens et résidents permanents ainsi qu’à leur famille immédiate (partenaires et enfants), et potentiellement aux employés locaux de l’ambassade du Canada à Khartoum, s’ils souhaitent partir.

Puisque sa mère âgée de 82 ans, souffrante, ne possède pas la citoyenne canadienne, Doha Elsharief, qui en est pour sa part titulaire, a préféré rester dans la capitale soudanaise. « Toute la journée, on entend des balles siffler et des bombes. On doit souvent se réfugier sous un lit », a-t-elle témoigné dans un appel WhatsApp.

« Les choses commencent vraiment à se détériorer. On manque de nourriture et d’eau, et c’est impossible de retirer de l’argent. Mais rentrer au Canada et laisser ma mère derrière, je ne peux pas faire ça », a confié celle qui habite Edmonton et qui a pris la direction du Soudan il y a un an pour accompagner sa mère.

Si le ministre de l’Immigration, Sean Fraser, a assoupli lundi dernier certaines mesures migratoires (pour les Soudanais au Canada et les Canadiens au Soudan), il n’a toujours pas proposé de programme d’accueil spécifique pour les Soudanais comme cela a été fait pour les Afghans ou pour les Ukrainiens.

Il ne l’a toutefois pas catégoriquement écarté. « J’étudie d’autres options », a laissé tomber le ministre.

Aide consulaire

Les citoyens canadiens au Soudan qui ont besoin d’une aide consulaire d’urgence peuvent communiquer avec le Centre de surveillance et d’intervention d'urgence d’Affaires mondiales Canada par téléphone (+1 613-996-8885), par message texte (+1 613-686-3658), par WhatsApp (+1-613-909-8881), par Telegram (Urgence Canada à l’étranger) ou par courriel (sos@international.gc.ca).

En savoir plus
  • 512
    Le conflit qui a éclaté au Soudan le 15 avril dernier a fait 512 morts et 4193 blessés, dont de nombreux civils.
    source : ministère soudanais de la Santé