Un petit triplex situé dans une rue tranquille du Village a subi d’importantes transformations ces dernières années, notamment par l’ajout de deux étages supplémentaires pour créer deux nouveaux logements, de magnifiques appartements sur deux étages, qui sont mis en location sur Airbnb.

Depuis, un voisin qui habite juste en face de l’immeuble affirme vivre l’enfer en raison du va-et-vient de touristes et du bruit émanant des terrasses, qui donnent sur la fenêtre de sa chambre à coucher.

« Depuis qu’ils sont là, je ne dors plus et ça me rend malade », témoigne Daniel Thiffault, qui s’est rendu plusieurs fois au conseil d’arrondissement de Ville-Marie pour dénoncer la situation.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Daniel Thiffault, dont l’appartement se trouve en face d’un immeuble dont les propriétaires font de la location touristique

Pourquoi y a-t-il des locations sur Airbnb dans cette rue alors que l’arrondissement de Ville-Marie les autorise seulement rue Sainte-Catherine, entre les rues Saint-Mathieu et Atateken ?

Constats d’infraction

Les autorités municipales ont remis le 12 avril trois constats d’infraction de 1000 $ chacun pour cette adresse, pour exploitation illégale d’une résidence de tourisme commerciale, à la suite d’une enquête de l’escouade spéciale sur les Airbnb.

« Ce dossier est problématique en vertu de notre réglementation et on va maintenir la pression sur les récalcitrants de ce genre-là », assure le conseiller municipal de ce secteur, Robert Beaudry.

On va resserrer encore plus nos contrôles parce que les stratégies utilisées sont de plus en plus pernicieuses.

Robert Beaudry, conseiller municipal dans Ville-Marie

Le copropriétaire de l’immeuble Guillaume Jodoin affirme de son côté que les trois appartements qui sont offerts en location sur Airbnb sont les résidences principales des occupants, ce qui est permis par la réglementation municipale. « Il est permis de louer sa résidence principale et la loi ne met pas de limite non plus aux nuitées par année pour la résidence principale. Les permis sont en ordre et légaux », soutient-il, dans un échange de courriels avec La Presse.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Le copropriétaire de l’immeuble affirme que les locations sont conformes à la réglementation municipale.

Des documents obtenus par La Presse en vertu de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels indiquent cependant que, pour cet immeuble, cinq demandes ont été faites à l’arrondissement de Ville-Marie pour la location touristique dans une résidence principale.

Mêmes noms

Deux avis de conformité ont été délivrés au nom de Guillaume Jodoin et deux au nom d’une autre copropriétaire. Comment ces deux individus peuvent-ils déclarer avoir deux résidences principales ?

L’arrondissement aurait-il pu refuser de délivrer les certificats de conformité à ces personnes déclarant plus d’une résidence principale ? Selon Robert Beaudry, les autorités municipales n’ont pas le pouvoir de déterminer où est la résidence principale d’un individu.

Guillaume Jodoin explique que, avec les travaux d’agrandissement et de transformation, une adresse a disparu et d’autres se sont ajoutées, et que de nouvelles demandes ont été faites à l’arrondissement en conséquence.

Il n’y a donc personne qui a habité ou qui habite deux appartements à la fois. Je veux être très clair là-dessus.

Guillaume Jodoin, dans un courriel

Il ajoute que son voisin d’en face, M. Thiffault, le harcèle depuis plusieurs mois, et que c’est lui qui lui fait « vivre un enfer ». « Ce qu’il mentionne concernant le bruit constant, les Uber qui débarquent en plein milieu de la nuit, les bruits provenant des terrasses est complètement faux. S’il y avait vraiment du bruit dérangeant après 22 h, il pourrait appeler la police. Il ne l’a jamais fait, car c’est toujours paisible, calme et propre », assure-t-il.

La Presse a demandé, en vertu de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics, la liste de toutes les demandes de location touristique dans des résidences principales dans l’arrondissement de Ville-Marie, afin de vérifier si d’autres demandeurs y déclaraient plus d’une résidence principale. On nous a transmis une liste avec les propriétaires des immeubles, mais les noms de tous les demandeurs avaient été caviardés, puisque l’arrondissement estime qu’il s’agit de renseignements personnels. La Presse compte contester cette interprétation devant la Commission d’accès à l’information du Québec.