(Ottawa) Le premier ministre Justin Trudeau a déclaré vendredi que l’ordonnance de la Cour internationale de justice (CIJ) est « alignée » à la position du Canada concernant l’offensive militaire israélienne à Rafah.

« La position du Canada est claire depuis de très nombreuses semaines maintenant : nous avons besoin d’un cessez-le-feu immédiat, le Hamas doit déposer les armes, libérer tous les otages. Mais il ne doit pas non plus y avoir d’opérations militaires à Rafah par Israël », a déclaré M. Trudeau vendredi lors d’une conférence de presse à Halifax.

« Les propositions de la CIJ sont contraignantes et nous espérons que tout le monde les suivra, en vertu du droit international. »

La plus haute instance judiciaire des Nations unies a ordonné vendredi à Israël d’« arrêter immédiatement son offensive militaire » à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, sans toutefois ordonner un cessez-le-feu dans l’enclave palestinienne.

Cette décision très ciblée de la CIJ envoie un triple message à Israël : mettre fin à l’offensive militaire à Rafah, permettre aux enquêteurs sur les crimes de guerre d’accéder à la bande de Gaza, et faciliter immédiatement l’acheminement de l’aide humanitaire dans la région.

Cette décision porte un coup dur à la réputation internationale d’Israël, mais le tribunal ne dispose pas de force de police pour faire respecter ses ordonnances.

Benny Gantz, l’un des trois membres du cabinet de guerre israélien, a annoncé vendredi que l’armée de son pays ne changerait pas de cap à Rafah, malgré l’ordonnance récente de la CIJ.

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Des juges de la Cour internationale de justice, à La Haye, le 24 mai

« L’État d’Israël est déterminé à poursuivre le combat pour obtenir la libération des otages et promettre la sécurité de ses citoyens – partout et chaque fois que cela sera nécessaire, y compris à Rafah », a déclaré M. Gantz.

Ses commentaires constituent la réaction la plus importante d’Israël à la décision de la CIJ ; le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou n’avait pas réagi publiquement dans l’immédiat vendredi.

Dure semaine pour le gouvernement israélien

Les critiques à l’égard des opérations militaires israéliennes dans la bande de Gaza se sont multipliées dans le monde, en particulier depuis qu’elles se sont concentrées sur la ville de Rafah.

Cette semaine, trois pays européens – l’Espagne, la Norvège et l’Irlande – ont annoncé qu’ils reconnaîtraient un État palestinien. Et le procureur en chef d’une autre instance judiciaire, la Cour pénale internationale, a demandé lundi des mandats d’arrêt contre les dirigeants israéliens et les responsables du Hamas.

Plus tôt ce mois-ci, aux Nations unies, le Canada s’est abstenu lors d’un vote visant à reconnaître formellement la Palestine, mais M. Trudeau a ouvert la porte au soutien d’un État palestinien avant la fin du conflit actuel.

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Benyamin Nétanyanhou

Le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, subit également des pressions dans son pays pour mettre fin à la guerre, qui a été déclenchée lorsque des militants dirigés par le Hamas ont fait irruption en Israël le 7 octobre, tuant 1200 personnes, pour la plupart des civils, et prenant environ 250 otages.

Des milliers d’Israéliens ont participé aux manifestations hebdomadaires appelant le gouvernement à parvenir à un accord pour obtenir la libération des otages, craignant de plus en plus pour leur vie.

L’offensive israélienne dans la bande de Gaza, contrôlée par le Hamas, a tué plus de 35 000 Palestiniens, selon le ministère de la Santé du territoire, qui ne fait pas de distinction entre combattants et civils.

L’opération a détruit des quartiers entiers, poussé des centaines de milliers de personnes à fuir leurs maisons et plongé certaines parties du territoire dans la famine.

Nétanyahou « empêche » le processus

Vendredi, M. Trudeau a réitéré que pour le Canada, la « solution à deux États » constitue la seule solution pour le Proche-Orient. Mais il a déploré le fait que le gouvernement israélien entrave ce processus.

« Nous avons besoin d’un État d’Israël paisible, sécuritaire et démocratique, et d’un État palestinien paisible, sécuritaire et démocratique : c’est la seule solution, à moyen et à long terme », a répété le premier ministre.

Malheureusement, le gouvernement actuel d’Israël, le gouvernement de Nétanyahou, n’a pas seulement écarté la possibilité d’une solution à deux États : il est en train d’activement essayer de l’empêcher.

Justin Trudeau

« Ce n’est pas de ça qu’ont besoin les Israéliens. Ce n’est pas de ça qu’ont besoin les gens de la région », a soutenu M. Trudeau.

La porte-parole néo-démocrate en matière d’affaires étrangères, Heather McPherson, a estimé vendredi que le gouvernement canadien devrait faire pression sur Israël pour qu’il respecte l’ordonnance de la CIJ.

Elle a réclamé des sanctions à l’encontre du cabinet de guerre israélien ainsi que du ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir, et du ministre des Finances, Bezalel Smotrich. « Le Canada doit soutenir cette décision (de la CIJ) en augmentant dès maintenant la pression sur Israël », a écrit Mme McPherson sur le réseau social X.

Avec des informations de l’Associated Press