Mourir au travail, à 16 ans. Zohaib Aamir Shafiqui poussait des chariots d’épicerie, lundi soir, avant d’être happé par un camion de déneigement. La collision aura été fatale pour le jeune employé de l’épicerie IGA qui laisse une famille et des collègues sous le choc, en quête de réponses.

« On est tous déchirés. Son frère jumeau n’a pas dit un mot depuis qu’on a appris la nouvelle. Mon fils était un bon garçon. Sérieux à l’école. Il partait travailler direct après ses cours. Je ne comprends pas comment le chauffeur ne l’a pas vu », explique d’une traite Faouzia Halif, mère de la victime, en essuyant ses larmes.

L’adolescent de 16 ans a succombé à ses blessures après avoir été happé par un camion de déneigement, lundi soir à Laval.

Le drame s’est produit dans le stationnement des Galeries Laval sur le boulevard Le Corbusier, non loin du boulevard Saint-Martin Ouest, vers 21 h 20.

Le chauffeur de 49 ans a été pris en charge pour un choc nerveux, a précisé Érika Landry, porte-parole du Service de police de Laval (SPL).

« C’est l’appel qu’aucune mère ne veut recevoir », souffle Gulnaz Gausar. La tante du défunt tapote doucement l’épaule de sa sœur, la mère de la victime, en soupirant.

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Saqib Shafiqui et Faouzia Halif, parents de la victime, et Gulnaz Gausar, sa tante, dans le stationnement de l’épicerie IGA où Zohaib Aamir Shafiqui travaillait.

Le jeune Zohaib Aamir travaillait à l’épicerie IGA depuis quelques mois déjà, confirme son père.

Venu récupérer les effets personnels de l’adolescent, Saqib Shafiqui est encore sous le choc. Il tient d’une main tremblante le sac à dos de son garçon. Le père endeuillé s’est présenté sur les lieux mardi matin en quête de réponses avec sa femme et sa belle-sœur.

« Je veux savoir exactement ce qui s’est passé. » Une question taraude Saqib Shafiqui depuis l’appel de police lundi soir : comment peut-on ne pas voir un ado qui pousse des chariots d’épicerie ?

Son fils portait une veste réfléchissante qui le rendait visible malgré la pénombre, selon ce que M. Shafiqui a pu confirmer avec le personnel du IGA.

« C’est un accident. Il ne l’a pas vu. Mais on veut quand même des réponses. Ça aurait pu être évité », laisse tomber Saqib Shafiqui.

Aucun jeune ne devrait mourir au travail, plaide-t-il.

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Zohaib Aamir Shafiqui a été happé par un camion de déneigement alors qu’il poussait des chariots dans le stationnement de l’épicerie.

À l’intérieur du IGA, quelques employés éclatent en sanglots dans l’allée des surgelés. Ils viennent d’entamer leur quart de travail en apprenant la terrible nouvelle. « On est tous vraiment bouleversés. Ça ne se peut pas qu’un jeune de même rentre au travail pour ne jamais revenir », confie une employée, mère d’un garçon du même âge. Elle a préféré ne pas s’identifier puisque le personnel n’est pas autorisé à parler de l’évènement.

Un accident, selon les autorités

Les policiers poursuivent leur enquête afin de déterminer les circonstances exactes du drame. La thèse de l’accident est privilégiée.

« On ne parle pas d’éléments criminels en cause », a précisé l’agente Landry.

Ce type d’accident est « souvent un problème d’angle mort », souligne Jean-Pierre Garand, président de l’Association nationale des camionneurs artisans inc. Il ne peut commenter l’évènement survenu lundi soir, dont il ne connaît pas les circonstances exactes, souligne-t-il toutefois. « La seule façon de prévenir les accidents, c’est un contact visuel entre le piéton et le conducteur. »

Vu l’heure et l’endroit où s’est déroulée la collision, c’est possible que le conducteur ait cru qu’il était seul. « Un stationnement le soir, c’est moins fréquenté qu’une rue passante du centre-ville. »

La CNESST enquête également dans ce dossier puisque le jeune homme a perdu la vie alors qu’il travaillait au supermarché situé dans le centre commercial.

« Il effectuait une tâche relative à son travail, donc les deux parties impliquées étaient en train de travailler et c’est pour cette raison-là que la CNESST est aussi dans le dossier », a expliqué l’agente Landry, du SPL.

Accidents de travail chez les jeunes

Les décès liés au travail sont relativement rares au Québec. La CNESST en recense en moyenne un par année chez les moins de 20 ans, sur une soixantaine de décès survenant en milieu de travail chaque année.

2875 : Nombre de jeunes de 19 ans ou moins qui ont subi une lésion de travail en 2020

535 : Nombre d’accidents de travail chez les moins de 25 ans dans les épiceries, soit plus du quart des 1897 accidents survenus en 2020 dans ces établissements.

Source : Portrait lésionnel des jeunes travailleurs de 24 ans ou moins 2020