Les 15,5 millions en financement d’urgence annoncés jeudi matin par le ministre responsable des Services sociaux, Lionel Carmant, sont largement insuffisants, pour combattre la crise de l’itinérance, dénonce la mairesse de Montréal, Valérie Plante.

En fait, cette somme ne permettrait même pas de répondre aux besoins pour la métropole, a souligné Mme Plante, qui n’a pu s’empêcher de laisser échapper un rire quand elle a été interrogée sur le sujet, jeudi en conférence de presse.

« Le montant annoncé par le ministre ne représente qu’un plaster, alors que l’itinérance est une plaie ouverte qui saigne », a-t-elle lancé. « C’est très loin de ce qui est nécessaire. On a besoin de 2000 logements sociaux par année, on parle de centaines de millions de dollars, en rattrapage. »

La solution à l’itinérance passe par des logements sociaux permanents avec accompagnement de la part d’intervenants qui peuvent épauler les personnes aux prises avec de multiples problèmes de santé mentale, de consommation de drogue et autres, a plaidé la mairesse, déplorant que M. Carmant n’ait évoqué que les refuges d’urgence en mêlée de presse jeudi matin.

Valérie Plante a toutefois apprécié le fait que la ministre de l’Habitation, France-Élaine Duranceau, ait été aux côtés du ministre Carmant pour cette annonce, a-t-elle noté. « Enfin, on a reçu le signal que le gouvernement du Québec comprend qu’on ne peut pas parler d’itinérance sans parler de logement, les deux sont intimement liés », a-t-elle souligné.

PHOTO PATRICK SANFACON, LA PRESSE

L’itinérance est en explosion au Québec et a bondi de 44 % en cinq ans.

La mairesse se préparait à quitter Montréal pour se rendre à Québec, où se tient vendredi le grand sommet sur l’itinérance organisé par l’Union des municipalités du Québec (UMQ), lors duquel elle souhaite des engagements plus importants de la part des élus provinciaux.

Elle a souligné que les montants octroyés par le gouvernement provincial aux organismes communautaires pour construire des logements sociaux sont déconnectés de la réalité du marché. De plus, au cours des trois dernières années, Québec n’a financé aucun logement destiné à sortir des personnes sans-abri de la rue, a dénoncé Mme Plante.

Le maire de Québec, Bruno Marchand, s’est montré moins tranchant envers le gouvernement en conférence de presse dans la capitale, jeudi. « J’ai entendu qu’il y avait une volonté à court terme de répondre à l’urgence. Je salue ça. Est-ce que (15 millions) c’est suffisant ? On verra en fonction de ce qui est annoncé. Il faut répondre à l’urgence, il faut ouvrir des places pour les gens qui n’ont pas de toit sur leur tête », a-t-il indiqué.

Le maire a toutefois fait une demande claire au gouvernement à la veille du sommet sur l’itinérance : de meilleures statistiques.

On apprenait mercredi que le Québec comptait au moins 10 000 personnes en situation d’itinérance selon le plus récent dénombrement du gouvernement. Le dernier exercice remontait à 2018, soit quatre ans plus tôt.

« On a besoin de statistiques annuelles, tranche le maire Marchand. Il faut s’engager à définir des objectifs, des cibles et un calendrier de travail. Il faut en rendre compte à la communauté, c’est ça être imputable. Les gens en situation d’itinérance s’attendent à ça de nous. »