Le chef de la police de Montréal, Fady Dagher, reconnaît qu’il faudra « plus de renforts et d’efforts » dans le Village, où le sentiment de sécurité est fragilisé par le vandalisme et des problèmes liés à l’itinérance. L’administration Plante doit dévoiler une stratégie jeudi pour sécuriser le secteur.

Fady Dagher, qui présentait mardi matin le bilan 2022 du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) aux élus montréalais, a dit comprendre la grogne de certains commerçants qui envisagent de fermer leur terrasse devant les problèmes de sécurité.

Le chef du SPVM affirme s’être rendu dans un restaurant du secteur à deux reprises dans les dernières semaines, pour y manger, le week-end. « J’ai pu constater ce dont vous parlez, mais j’ai aussi pu constater des interventions. J’ai vu les gens travailler sur le terrain. Il va falloir qu’on ait un peu plus de renforts et d’efforts à ce niveau-là. On comprend tout le monde, mais c’est une population vulnérable et le côté humain va être très important. Et ça prend du temps », a-t-il insisté.

En marge d’une activité publique tenue mardi, la mairesse Valérie Plante, elle, a révélé qu’une « stratégie » serait présentée jeudi pour le secteur du Village. Cette politique, soutient la mairesse, a été planifiée « bien avant tout ce qui se passe maintenant ».

« On prend ce problème-là très au sérieux. On ne lâchera pas et on va continuer à soutenir tout le monde », a dit la mairesse, en rappelant que 40 policiers supplémentaires patrouillent dans le secteur depuis déjà quelques semaines. Leur impact « prendra un certain temps à se matérialiser », a-t-elle néanmoins temporisé.

Patience, les solutions arrivent

Fady Dagher appelle les commerçants à la patience. « Franchement, [aux commerçants], je leur dirais : ne lâchez pas prise, dans le sens qu’on va réussir, mais ça va prendre encore un peu de temps. On s’est déjà entendus avec la Ville qu’on va rajouter des opérations ou des interventions plus ciblées envers certaines personnes », a-t-il expliqué mardi.

Il soutient que depuis février, ses troupes ont mis « plus de 5000 heures de patrouille » dans le Village et réalisé plus de 2700 interventions tantôt répressives, tantôt pour entrer en relation avec les communautés. « On a aussi continué à sensibiliser avec les commerçants pour leur dire : dès qu’il y a quelque chose, appelez-nous », maintient M. Dagher.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, ARCHIVES LA PRESSE

Fady Dagher, chef du SPVM

C’est un milieu tellement sensible avec une grande vulnérabilité. […] Ces personnes sont en crise, ont une grande vulnérabilité, ont peu de sommeil et consomment, bref, il y a toutes sortes de choses qui font en sorte que c’est difficile.

Fady Dagher, chef du SPVM

Le chef de police demande donc à la population et aux commerçants « un peu de patience », promettant d’apporter des solutions bientôt. « On va réussir au fur et à mesure qu’on va avancer. Et je suis sûr qu’on va trouver des solutions, mais elles ne sont pas immédiates, ça va prendre un peu de temps. »

L’été débute à peine que, face à la croissance de l’itinérance, le chef de police appréhende déjà la prochaine saison froide. « Notre ambition, c’est que ça se fasse soit cette année ou l’année prochaine. Là, l’hiver s’en vient, il va falloir qu’on pense aussi à tout l’aspect des métros, soit comment on va vivre avec l’itinérance dans le métro. Il y a toute cette chaîne-là qu’il faut préparer aussi pour 2024-2025 », a poursuivi M. Dagher.

Fracture due à la pandémie

Depuis la pandémie, Valérie Plante estime qu’une « fracture importante s’est faite dans l’est du centre-ville ». « Tant et aussi longtemps qu’on va se dire que les gens qui n’ont pas un toit, qu’ils vagabondent dans la ville, on n’y arrivera pas non plus », a-t-elle toutefois prévenu. « Loin de moi de donner la responsabilité à Québec, parce qu’on fait ce qu’il faut, mais il y a des gens vulnérables dans nos rues dont il faut s’occuper, en mettant un toit au-dessus de leur tête. »

Son administration assure avoir « augmenté aussi le nombre de travailleurs sociaux et intervenants de rue depuis le mois d’avril » dans le Village, entre autres « pour s’attaquer au réseau de drogues et faire en sorte que les entrées de métro soient sécuritaires ».

« On entend les commerçants, on sait que c’est difficile et on veut tout faire aussi à court terme pour que l’été se passe bien pour eux », a ajouté le responsable de la sécurité publique au comité exécutif, Alain Vaillancourt, lorsqu’interrogé sur le sujet mardi.

Avec Isabelle Ducas, La Presse