Québec se dit préoccupé par des décisions récentes des tribunaux qui viennent compliquer le travail des municipalités désireuses de protéger des milieux naturels sur leur territoire. Le gouvernement Legault prévoit d’ailleurs proposer une révision de la Loi sur l’expropriation au cours des prochaines semaines.

Le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, a indiqué lundi que son gouvernement déposerait prochainement un projet de loi afin de modifier la Loi sur l’expropriation. La réforme de la loi est une demande du monde municipal, dont l’Union des municipalités, qui estime être désavantagée face aux promoteurs avec la législation actuelle.

« Dans les prochaines semaines, les prochains mois, deux de nos collègues, tantôt les Transports à travers la Loi sur l’expropriation, tantôt les Affaires municipales à travers la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, apporteront des modifications », a souligné le ministre Charette, lundi, alors qu’il participait à une conférence de presse pour annoncer la création d’un parc de conservation le long de la rivière des Mille Îles.

Rappelons que la loi actuelle sur l’expropriation avantage les promoteurs, puisque la valeur de l’expropriation ne tient pas seulement compte de la valeur marchande d’un terrain, mais aussi des pertes financières potentielles encourues par le propriétaire d’un terrain exproprié.

Dans ces circonstances, le coût d’une expropriation peut parfois s’élever jusqu’à plusieurs millions de dollars au-dessus de la valeur marchande du terrain exproprié.

Or, des décisions récentes des tribunaux risquent de compliquer le travail des municipalités désireuses de protéger les milieux naturels sur le territoire. Des décisions qui « préoccupent » le gouvernement Legault, a indiqué Benoit Charette.

La semaine dernière, la Cour supérieure du Québec a conclu que deux entreprises appartenant au sénateur Paul Massicotte avaient été victimes d’expropriation déguisée d’un terrain situé dans le boisé des Hirondelles, que la Ville de Saint-Bruno-de-Montarville veut protéger. Le promoteur réclame 15 millions de dollars, mais le montant de l’indemnité qui lui sera accordée sera déterminé au cours d’une autre audience du tribunal.

En septembre dernier, la Cour suprême du Canada a aussi rejeté une demande d’appel faite par la Ville de Mascouche. La municipalité contestait une décision de la Cour d’appel du Québec, qui lui ordonnait de verser une compensation financière à une citoyenne, Ginette Dupras, pour expropriation déguisée. Celle-ci s’opposait à un changement du règlement de zonage empêchant dorénavant tout lotissement sur son terrain. Elle réclame 4,5 millions de dollars pour un terrain acheté pour la somme de 1 $ en 1976.

D’autres changements législatifs à venir

« C’est une inquiétude, souligne le ministre Charette. Vous parlez du boisé des Hirondelles la semaine dernière, ce n’est pas le type de jugement que l’on aime recevoir. Cependant, on en prend acte. […] Mais ce sont des jugements qui, oui, nous préoccupent très certainement », ajoute-t-il.

Le ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs a précisé que son ministère pourrait aussi proposer des changements législatifs afin de faciliter le travail des municipalités soucieuses de protéger leurs milieux naturels.

« Et du côté du ministère de l’Environnement, on envisage la possibilité aussi de modifier notre législation pour s’assurer que la volonté des municipalités soit mieux reconnue, notamment par les municipalités, mais aussi dans une perspective de protection du patrimoine naturel », affirme Benoit Charette.

« Il y a beaucoup d’élus qui se mobilisent pour le protéger [le patrimoine naturel], a-t-il signalé. Avec les contraintes [les décisions des tribunaux] que vous avez mentionnées, dans certains cas, ce sont les plans, des projets qui sont littéralement compromis. Donc, deux modifications législatives à venir dans les prochaines semaines, les prochains mois. Possiblement, une modification qui relèverait du ministère de l’Environnement aussi au cours des prochains mois, sinon de la prochaine année. »

Rivière des Mille Îles : un parc de conservation verra le jour en 2024

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Vue aérienne de la rivière des Milles Îles. Dix municipalités de la couronne nord de Montréal ont annoncé, lundi, vouloir y créer un parc de conservation.

Dix municipalités de la couronne nord de Montréal ont annoncé lundi vouloir créer un parc de conservation le long de la rivière des Mille Îles d’ici 2024. Une table de concertation sera chargée de fixer les limites de ce parc métropolitain. Le projet à l’étude couvre une zone de 42 kilomètres.

La Ville de Laval et neuf municipalités de la couronne nord ont convenu d’entreprendre « toutes les démarches nécessaires afin d’obtenir un statut officiel pour les 42 km de milieux naturels qui bordent la rivière des Mille Îles d’ici 2024 ». Cette zone s’étend de Deux-Montagnes jusqu’à Mascouche.

Le futur parc inclura notamment le refuge faunique de la rivière des Mille Îles, dont l’agrandissement est à l’étude. L’initiative permettra aussi à la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) de se rapprocher de son objectif de protéger 30 % de son territoire d’ici 2030.

Le projet, qui a reçu l’appui du gouvernement du Québec, est soutenu par les villes de Laval, Rosemère, Deux-Montagnes, Boisbriand, Mascouche, Terrebonne, Sainte-Thérèse, Saint-Eustache, Lorraine et Bois-des-Filion.