Avec 25 % de la population étudiante du Québec, les trois universités anglophones attirent 38 % des étudiants internationaux. Comment expliquer cette différence, perçue comme une menace pour l’avenir de la langue française par certains ou comme une source de déséquilibre financier par d’autres ?

1. La langue

L’un des premiers facteurs, c’est bien sûr la langue. L’anglais est devenu la langue internationale de l’enseignement. Résultat : le bassin de recrutement des universités anglophones est beaucoup plus grand que celui des universités francophones.

L’exemple le plus frappant est celui de la Chine. Ce pays envoie un très fort contingent d’étudiants au Canada. Le plus souvent, la langue de communication est l’anglais. Résultat, l’an dernier, McGill comptait plus de 6000 étudiants chinois et l’Université de Montréal n’en avait que 434.

« Le bassin de recrutement est plus petit pour nous que pour McGill et Concordia, explique le recteur de l’Université de Montréal (UdeM), Daniel Jutras. C’est strictement factuel. On recrute des étudiants francophones ou qui ont une maîtrise du français. Il y a un avantage pour les universités anglophones. »

2. Les taux de refus d’Ottawa

Une autre raison qui explique cet avantage des universités anglophones est le pays d’origine des étudiants.

Les universités francophones recrutent beaucoup dans les pays africains francophones. Or, les taux de refus de permis d’études de ces étudiants étrangers sont nettement plus élevés que ceux des étudiants d’autres pays ; par exemple, ceux en provenance de l’Asie et des États-Unis obtenaient en 2022 leur permis d’études dans une proportion de 55 %.

En comparaison, selon une étude de l’Institut du Québec, 72 % des demandes de permis d’études déposées par des étudiants africains ont été refusées par Ottawa en 2022.

L’un des principaux motifs invoqués par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) est le fait que plusieurs candidats ne réussissent pas à démontrer qu’ils vont retourner dans leur pays à la fin de leurs études. Le gouvernement fédéral a cependant reconnu la présence de discrimination

« Il y a encore un trop faible pourcentage d’étudiants qui finissent par passer à travers toutes les étapes du processus et à venir sur le campus », déclare Yan Cimon, directeur des affaires internationales et de la francophonie à l’Université Laval.

3. Le prestige

Un dernier facteur joue en faveur de l’Université McGill : le prestige.

Un article publié cet été dans le quotidien français Le Monde, intitulé « L’université McGill à Montréal, un exil doré québécois », illustre le pouvoir de la réputation : « McGill, “what else” ? Choisir la prestigieuse université anglophone du Québec au moment de commencer ses études supérieures relève presque de l’évidence pour la majorité des quelque 2000 étudiants français inscrits. »

« Les étudiants internationaux magasinent la meilleure ville, la meilleure université, le meilleur programme », explique Stéphane Paquet, président-directeur général de Montréal International. « Le classement des universités, c’est archi important, et la qualité de vie des villes, c’est aussi archi important. Une centaine d’universités se bat pour ce monde-là. »

Classée 30e au monde par le QS World University Rankings 2024, l’Université McGill occupe le 2e rang au Canada, après l’Université de Toronto. L’Université de Montréal, qui figure aussi dans ce classement, occupe le 141e rang.

Pour augmenter le nombre d’étudiants internationaux, l’UdeM mise sur les pays francophones, mais aussi sur l’Amérique latine.

« L’Université de Montréal est connue en Amérique latine, explique le recteur, Daniel Jutras. On a plus d’étudiants brésiliens que d’étudiants belges. Je pense qu’on pourrait effectivement se tourner vers cet espace du globe. »

Consultez le palmarès (en anglais)