On le dit brouillon, flou, improvisé. À deux semaines du retour en classe de milliers d’élèves québécois, le plan pour la rentrée scolaire présenté mercredi par le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, aurait dû rassurer les parents. Il semble surtout avoir semé la confusion.

Les enfants devront porter des masques ici, mais pas là. Les activités parascolaires reviendront en force, mais une preuve vaccinale sera exigée pour pratiquer certaines d’entre elles. Lesquelles ? On ne le sait pas encore…

Adieu, bulles-classes, bonjour, cours à option : on recommencera à mélanger les enfants, leurs aérosols et leurs gouttelettes. Et si une éclosion survenait quelque part ? On mettra toute cette marmaille en quarantaine ? Mystère et boule de gomme. On nous reviendra bientôt là-dessus.

Bref, comme on nous l’avait promis, ce sera une rentrée sous le signe de la normalité… à moins que les choses ne dérapent.

Et, franchement, elles risquent de déraper.

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On peut blâmer tant qu’on veut le ministre Jean-François Roberge, devenu au fil des mois l’un des souffre-douleur de cette pandémie. Mais il faut admettre que son numéro d’équilibriste – entre le retour à la normalité tant souhaité et la nécessité de protéger les enfants du variant Delta – était périlleux.

On aurait voulu un plan solide, clair, rassurant. On aurait voulu que le ministre nous dise à quoi nous attendre. Mais pour ça, il lui aurait fallu une boule de cristal. Parce qu’il ne sait pas plus que vous et moi de quoi l’automne sera fait.

Tout ce qu’on sait, c’est que la quatrième vague enfle, lentement mais sûrement. Le nombre des cas d’infection augmente. Les hospitalisations, aussi. « Les chiffres ne vont pas dans le bon sens », a admis mercredi le Dr Yves Jalbert, directeur général adjoint de la protection de la santé publique.

« C’est la position que nous avons maintenant, a-t-il ajouté. Mais nous suivons la situation de très près et, au besoin, nous arriverons avec de nouvelles mesures. »

Autrement dit, le plan pour la rentrée scolaire est loin d’être coulé dans le béton. Il pourrait même être périmé bien avant… la rentrée scolaire.

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On ne sait pas grand-chose, disais-je, mais on sait que la prochaine vague sera celle des non-vaccinés. François Legault l’a déclaré, mercredi. Joe Biden avait dit la même chose avant lui. Les statistiques le montrent déjà.

On sait que cette vague emportera les hésitants, les retardataires et les complotistes à l’hôpital ou à la morgue. Ceux-là n’auront à s’en prendre qu’à eux-mêmes. Après tout, ils auront décidé de leur propre sort.

Mais il ne faut pas oublier qu’un large groupe n’a tout simplement pas accès au vaccin : les enfants de moins de 12 ans. Et ce sont eux qu’on s’apprête à réunir dans des endroits fermés, plusieurs heures par jour, cinq jours par semaine.

Pour eux, il faut mettre le paquet. Le dépistage rapide à l’école. La ventilation dans toutes les classes au plus vite. Le port du masque, aussi, comme en Ontario. Il faut protéger ces non-vaccinés involontaires par tous les moyens.

Sinon, la prochaine vague sera aussi celle des enfants.

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Aux États-Unis, des pédiatres observent une flambée des hospitalisations chez les enfants. La plupart des jeunes patients ne sont pas gravement malades. Mais le variant Delta est virulent. La situation est surtout préoccupante en Louisiane et en Floride, où il y a beaucoup d’hésitation vaccinale.

Ce n’est pas le cas au Québec. Et c’est d’ailleurs parce que 77 % des adolescents sont pleinement vaccinés, ou en voie de l’être, que l’on peut envisager une rentrée scolaire (presque) normale. Au secondaire, à tout le moins.

« Si on peut avoir un plan comme ça, c’est grâce à l’effort vaccinal. Mais ce n’est pas terminé », a prévenu le ministre Jean-François Roberge. « La meilleure façon de s’assurer de participer aux activités parascolaires est de se faire vacciner », a renchéri la ministre déléguée à l’Éducation, Isabelle Charest.

Certains acteurs du milieu scolaire s’émeuvent du fait que les ados devront présenter une preuve vaccinale pour pratiquer certaines activités à haut risque de transmission. Ils nous mettent en garde contre la formation de deux classes d’élèves, voire d’une brèche dans l’accès universel à l’école.

Il y a pourtant une solution pour éviter cette terrible ségrégation. C’est tout simple. Il suffit de retrousser sa manche.

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La même solution s’applique aux élèves du secondaire non vaccinés risquant d’être « stigmatisés » s’ils sont les seuls à être renvoyés à la maison en cas d’éclosion. S’ils veulent éviter ce sort affreux, qu’ils se fassent vacciner. Ce n’est pas sorcier.

Faudrait-il renvoyer tous les élèves pour éviter qu’une poignée de récalcitrants se sentent stigmatisés ? Sérieusement, après les 18 mois de galère qu’ils ont traversés, il me semble que les ados n’ont pas à payer ce prix-là. Ils n’ont plus à le payer.

Pour les élèves du primaire, le casse-tête en cas d’éclosion sera plus compliqué. Face à la menace du variant Delta, l’Académie américaine de pédiatrie exhorte la Food and Drug Administration à autoriser au plus vite la vaccination des enfants de 5 à 11 ans.

D’ici là, il faudra se rabattre sur d’autres méthodes pour protéger les jeunes enfants du virus. La plus efficace, après le vaccin lui-même ? Je vous le donne en mille : vacciner tous ceux qui gravitent autour d’eux. Les profs, les parents, les grands frères, les grandes sœurs. Tout le monde.

Faites-vous vacciner, pour eux.