Les Québécois continuent d’acheter des voitures de plus en plus grosses, mais aussi davantage de modèles électriques. Les véhicules utilitaires sport (VUS) ont représenté près des deux tiers des nouvelles immatriculations en 2023 dans la province, tandis qu’une nouvelle voiture sur cinq est désormais zéro émission.

C’est ce que montrent les plus récentes données de Statistique Canada. Selon l’organisme, les Québécois ont acheté en 2023 un peu plus de 260 000 véhicules à usages multiples – une catégorisation qui inclut surtout les VUS, mais également les véhicules multisegments.

Le tout représente environ 63 % des 415 000 nouvelles immatriculations enregistrées l’an dernier. Cette proportion est légèrement plus élevée que dans le reste du Canada, où elle oscille autour de 59 %. Selon le rapport, les nouvelles immatriculations de VUS ont globalement bondi de 20,8 % en 2023 au Canada par rapport à l’année précédente.

À l’échelle du pays, les VUS « ont continué d’être le type de véhicule préféré des Canadiens », avec plus de 1 million d’immatriculations, ce qui représente 59,7 % des véhicules automobiles neufs en 2023. Il s’agit d’une augmentation par rapport à 2022, année durant laquelle cette proportion était de 56 %.

Ce sont un peu plus de 1,7 million de véhicules neufs, toutes catégories confondues, qui ont été immatriculés au Canada en 2023. Il s’agit d’une hausse de plus de 13 % par rapport à 2022.

Avec 677 000 cas uniques, l’Ontario est toujours la province affichant le plus grand nombre total d’immatriculations de véhicules neufs.

Le Québec arrive deuxième en la matière, avec ses 415 000 immatriculations, suivi de la Colombie-Britannique (210 000). Cela dit, le bond le plus marqué a été observé à l’Île-du-Prince-Édouard, où les immatriculations ont augmenté de 20 %.

Plus de véhicules électriques que jamais

Tout indique que les véhicules électriques ont de plus en plus leur rôle à jouer dans ces hausses. Dans la dernière année, les ventes de voitures électriques à batterie et de modèles hybrides électriques ont suivi une tendance à la hausse d’environ 19 % au Québec, soit beaucoup plus que dans les autres provinces (8 %).

Quand on regarde toutes les immatriculations de véhicules enregistrées au Canada, on constate que les véhicules à émission zéro (VEZ) représentent aujourd’hui un peu plus d’une voiture sur 10, à savoir 10,8 % d’entre elles. Au total, le nombre de VEZ immatriculés au pays est en hausse « de 49,4 % par rapport à 2022 et de 114,6 % par rapport à 2021 ».

L’an dernier, la grande majorité (92 %) des véhicules zéro émission ont « été immatriculés dans les trois plus grandes provinces du Canada ». C’est le Québec qui ouvre la marche avec tout près de 42 % des immatriculations de véhicules carboneutres en 2023. L’Ontario arrive deuxième avec 27 %, suivi par la Colombie-Britannique avec 23 %.

Selon une récente étude de l’Université de la Colombie-Britannique, l’avantage du Québec s’explique probablement par le fait que c’est ici que le choix de conduire un véhicule électrique revient le moins cher au Canada, grâce aux subventions à l’achat élevées et aux bas tarifs électriques.

Comme le rapportait la semaine dernière La Presse, c’est aussi au Québec que les propriétaires de voitures électriques peuvent atteindre le plus rapidement la parité des coûts avec les véhicules à essence. « Au Québec, le propriétaire d’une voiture électrique doit parcourir au moins 46 kilomètres par jour pour être gagnant par rapport à une voiture traditionnelle. Au Nunavut, ce chiffre s’élève à 180 kilomètres », a illustré un des auteurs de l’étude, Bassam Javed.

Or, les subventions vont diminuer. Dans son budget présenté mardi, Québec a en effet annoncé que les subventions pour les acheteurs de voitures électriques diminueront graduellement à compter de 2025, jusqu’à la fin du programme Roulez vert en 2027. En 2022-2023, 238 millions de dollars avaient été distribués aux acheteurs. L’année dernière, le programme a coûté autour de 400 millions.

Une taille à réduire

Selon Daniel Breton, ex-ministre du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs, il faudra aussi rapidement diminuer la taille des véhicules électriques en circulation au Québec.

Même les véhicules électriques n’échappent pas à la prise de poids. À l’heure actuelle, pas moins des trois quarts des véhicules zéro émission sont des VUS au Canada.

« Je dis depuis de nombreuses années qu’il faut que les constructeurs arrivent avec de plus petits véhicules électriques, qui sont presque tous disparus du paysage au profit des VUS et des pick-up. S’il y a des modèles de plus petite taille qui s’en viennent, je pense que ça va être un game changer », affirme celui qui est aujourd’hui président de Mobilité électrique Canada.

Chez Greenpeace, le porte-parole Patrick Bonin abonde en ce sens.

Le fait que les subventions ne fassent pas de distinction en fonction de la grosseur du véhicule électrique, ça contribue à ce que les gens choisissent des véhicules plus imposants.

Patrick Bonin, porte-parole de Greenpeace Canada

« Il faut que le gouvernement, à travers sa loi zéro émission, envisage l’option d’exiger de la part des manufacturiers une diversification de l’offre en termes de petits véhicules électriques. L’offre est de plus en plus limitée, puisque l’industrie favorise la vente des gros véhicules vendus plus cher », ajoute M. Bonin.

Daniel Breton, lui, rappelle que l’électrification du parc de véhicules doit se faire « en complémentarité » avec des incitatifs au transport collectif et à l’autopartage. « L’idée, ce n’est pas l’un ou l’autre, c’est l’un et l’autre. Il faut décourager l’auto solo, encourager la mobilité durable et faire en sorte que les voitures qui demeurent soient électriques », conclut l’ancien politicien à ce sujet.

Avec Pierre-André Normandin, La Presse

En savoir plus
  • 2400 $
    C’est la somme que les Québécois doivent payer en plus pour une voiture électrique au Québec, en moyenne, un chiffre beaucoup moins élevé que dans la plupart des autres provinces canadiennes.
    source : Université de la Colombie-Britannique