Il y a des serviettes hygiéniques lavables. Ou en coton. En bioplastique. Mais un ingénieur des matériaux suédois pense avoir trouvé la solution la plus écologique : des serviettes hygiéniques fabriquées à partir de résidus agricoles.

« Nous voulons avoir un produit biodégradable et durable sans avoir à changer les habitudes des femmes ni les chaînes de production existantes de serviettes hygiéniques », explique Antonio Capezza, de l’École royale polytechnique (KTH) à Stockholm, qui présentait en mars ses résultats à une conférence de l’Association chimique américaine (ACS) à La Nouvelle-Orléans. « L’apparence est la même, avec une couleur beige. Et nous voulons garder l’augmentation de coût et de poids à moins de 15 %. Nous pensons avoir une solution gagnante et voir nos produits sur le marché d’ici quelques années. »

Les résidus agricoles en question incluent par exemple les tiges de maïs ou de blé qui sont habituellement transformées en paille. Des protéines sont extraites de ces résidus agricoles, puis aseptisées, pour constituer les molécules servant à la fabrication des différentes sections des serviettes hygiéniques.

Une évaluation des serviettes hygiéniques biodégradables par des consommateurs est en cours pour finaliser la commercialisation aux États-Unis. « Nous devrions avoir des résultats au début de l’année prochaine. Il nous faut avoir une certification pour les risques de réactions cutanées. »

Les résidus agricoles nécessaires peuvent varier. « Nous avons besoin de certaines proportions de protéines, qui peuvent provenir des résidus de différentes céréales, le blé, le soja, entre autres. »

Vers d’autres améliorations

Des améliorations sont toutefois déjà envisagées.

Nous avons encore du plastique pour l’enveloppe extérieure imperméable, mais nous pensons qu’il serait possible d’avoir les mêmes propriétés avec des résidus agricoles. Et nous voulons rendre le produit encore plus doux qu’il l’est actuellement, pour concurrencer les serviettes hygiéniques les plus douces du marché.

Antonio Capezza, de l’École royale polytechnique à Stockholm

Y a-t-il un danger de contamination bactérienne des résidus agricoles ? « Non, pas plus que dans la filière alimentaire actuelle. Tout est une question de contrôle de l’humidité. »

N’y a-t-il pas quelque chose d’incongru à ce qu’un homme prenne le flambeau des serviettes hygiéniques écologiques ? M. Capezza ne peut s’empêcher de dire : « Quand on le présente comme ça, en effet ça fait bizarre. Mais j’ai beaucoup de femmes dans mon équipe. »

Il existe déjà une foule de serviettes hygiéniques biodégradables, en coton, en bioplastique. En quoi l’option de M. Capezza est-elle plus durable ?

« Le coton est une bonne solution de rechange aux produits du pétrole, mais il n’y en a pas assez pour remplacer toutes les serviettes hygiéniques, et il faut des produits chimiques pour le traiter et beaucoup d’eau pour le cultiver. Il y a des questions similaires à se poser pour le bambou. Et pour ce qui est des produits biodégradables, souvent, ils ont des propriétés différentes de celles des serviettes hygiéniques ordinaires, alors ce sont des produits de niche, qui ne conviennent pas à tout le monde. »

Autres options

Geneviève St-Amour, fondatrice du site Eco Loco, qui propose des serviettes hygiéniques écologiques, estime que l’offre actuelle est très adéquate. « On n’a pas besoin de plus de technologies écologiques pour les serviettes hygiéniques. Il faut surtout sensibiliser les gens. »

Mila Zielinski, qui travaille sur la campagne sur les enjeux de menstruations Fil rouge du Réseau québécois d’action pour la santé des femmes, estime quant à elle que la solution passe par des subventions pour des serviettes hygiéniques réutilisables. « Nous avons fait un sondage et les femmes sont ouvertes aux produits réutilisables, dit Mme Zielinski. Mais ils sont difficiles d’accès, surtout à cause de leurs coûts. »

Une prochaine étape pour M. Capezza est d’adapter la technologie aux couches pour bébés. « Le défi est d’avoir une capacité absorbante beaucoup plus élevée que les serviettes hygiéniques », explique l’ingénieur d’origine vénézuélienne.

En savoir plus
  • 7,4 kg
    Impact climatique annuel, en équivalent de CO2, des serviettes hygiéniques lavables
    Source : Zero Waste Scotland
    3,7 kg
    Impact climatique annuel, en équivalent de CO2, des serviettes hygiéniques réutilisables
    Source : Zero Waste Scotland
  • 2,3 kg
    Impact climatique annuel, en équivalent de CO2, de la consommation d’un litre d’essence par une voiture
    Source : Ressources naturelles Canada