Une adoption massive du vélo électrique pourrait réduire du quart le nombre de déplacements en automobile, démontre une nouvelle étude de la Chaire mobilité de Polytechnique Montréal et d’Équiterre. Les auteurs parlent d’un « énorme potentiel » à développer pour retirer des barrières à la pratique du vélo et réduire la place de la voiture.

Un millier de testeurs

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Des cyclistes circulant sur le Réseau express vélo (REV) de la rue Saint-Denis, à Montréal

Réalisée dans les trois dernières années, cette vaste étude a été menée auprès de 1000 participants qui ont utilisé des vélos à assistance électrique (VAE) équipés de traceurs géographiques pour la majorité de leurs déplacements quotidiens. « On a calculé les distances moyennes parcourues en couplant ça avec des données des dernières enquêtes origine-destination (OD). Et le résultat, c’est qu’un déplacement en auto sur quatre, donc 25 %, pourrait être remplacé par le VAE », affirme la directrice adjointe aux programmes éducatifs chez Équiterre, Marilène Bergeron. Elle rappelle que 75 % des Québécois vivent à moins de 14 kilomètres de leur lieu de travail, mais y vont régulièrement avec la voiture. « Il y a un énorme potentiel qui est là. »

Plus vite, plus loin

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En général, un vélo à assistance électrique est en moyenne 21 % plus rapide que le vélo traditionnel.

En quoi les vélos électriques changent-ils la donne ? En fait, ces appareils permettent surtout d’étirer la portée efficace d’un vélo. Règle générale, un VAE est en moyenne 21 % plus rapide que le vélo traditionnel ; les distances qu’on peut ainsi parcourir sont entre 9 % et 22 % plus grandes. « Sur des parcours similaires, l’assistance électrique permet de réduire le temps de trajet de 16 % sur un terrain vallonné et de 29 % sur un terrain plat par rapport au vélo traditionnel », lit-on par ailleurs dans le rapport. En moyenne, Équiterre calcule par ailleurs qu’un vélo électrique émet 780 fois moins de gaz à effet de serre (GES) qu’une voiture à essence, et 25 fois moins qu’un véhicule électrique.

Plus d’infrastructures

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La chercheuse Catherine Morency

Selon Catherine Morency, titulaire de la Chaire mobilité à Polytechnique Montréal, l’étude illustre la nécessité de « construire plus d’infrastructures » de stationnement et de recharge pour les vélos électriques, souvent plus lourds et plus chers à acquérir. « Les craintes de vol, c’est un enjeu et on doit les prendre en compte pour convaincre les gens d’en utiliser au quotidien. La réalité, c’est que les infrastructures ne sont pas là présentement pour permettre une vraie transition », analyse la chercheuse. Elle affirme que le VAE aurait pour effet de « démocratiser l’usage du vélo » de façon rapide, en propulsant au passage l’achalandage des transports en commun. « Si on pense nos réseaux en fonction des trajets, tout le monde va en être gagnant. »

Des incitations à envisager

PHOTO SARAH MONGEAU-BIRKETT, ARCHIVES LA PRESSE

Un cycliste sur un vélo électrique circulant sur le Réseau express vélo (REV) de la rue Saint-Denis, à Montréal

Équiterre, de son côté, suggère aux pouvoirs publics – surtout au gouvernement du Québec – d’envisager l’attribution d’une subvention pour le remplacement d’un véhicule à combustion par un vélo électrique, au moyen d’un « système de redevance-remise ». « Ça pourrait aussi être une subvention pour une location de longue durée, voire la conversion électrique d’un vélo standard. Il y a plusieurs façons de le moduler », note Mme Bergeron à ce sujet. Les employeurs, ajoute-t-elle, ont aussi un rôle à jouer. « L’intérêt est élevé pour des programmes de location de vélos et d’aménagement aux bureaux, voire d’un remboursement kilométrique. Il faut que les grandes entreprises y pensent », ajoute-t-elle.

L’exemple de Saanich

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La municipalité de Saanich, en Colombie-Britannique

En Colombie-Britannique, la municipalité de Saanich, située dans la région de Victoria, a mis en place dans les dernières années des programmes de rabais à l’achat allant de 350 $ à 1600 $ sur les vélos électriques, en fonction de la situation socioéconomique de chacun. Et depuis, les premiers résultats sont probants. Une récente étude de l’Université de la Colombie-Britannique a révélé que l’adoption du vélo électrique a littéralement explosé. Non seulement 60 % des bénéficiaires du programme s’initiaient au cyclisme quotidien, mais surtout, ils ont en moyenne réduit de 48 kilomètres leur circulation en voiture chaque semaine, l’équivalent d’une baisse de 30 à 40 %.