Qu’on ait quitté le Québec ou qu’on vienne d’y débarquer, le 24 juin est plus qu’une simple date au calendrier. La Presse a sondé des expatriés et de nouveaux arrivants pour savoir comment ils soulignent la fête nationale.

Adopter le Québec

Saf Hakawati

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, LA PRESSE

Saf Hakawati

Né en Arabie saoudite d’un père québécois et d’une mère libanaise, Saf Hakawati a vécu sa jeunesse au Moyen-Orient, et a déménagé au Québec en 2020. Depuis qu’il y habite, Saf considère fièrement le Québec comme son pays. Il s’est établi ici à 18 ans pour poursuivre ses études à l’Université McGill, mais aussi pour vivre librement son identité.

Même s’il étudie dans un monde anglophone, Saf Hakawati chérit le français et la culture québécoise avec passion. C’est pourquoi la fête nationale occupe une place importante dans son cœur.

« Mes parents se sont mariés un 24 juin, raconte-t-il, alors ça a toujours été un jour important chez nous. Mais c’est seulement quand je suis arrivé au Québec que j’ai réellement compris ce que la Saint-Jean voulait dire. »

Pour lui, c’est un jour de rassemblement. « Peu importe notre origine ou notre orientation sexuelle, on se réunit tous pour célébrer une culture commune à la Saint-Jean. Je trouve ça formidable ! »

En plus des célébrations, le jeune homme voit le 24 juin comme une occasion d’en apprendre plus sur l’histoire du Québec, ce qu’il estime être un « devoir de citoyen ».

Saf Hakawati invite donc tout le monde à célébrer, car selon lui, « la diversité rend un pays plus fort, mais il faut rester uni dans notre culture ».

Simone Caron, La Presse

Maryam Gholami

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

Maryam Gholami

L’année dernière, Maryam Gholami dansait dans son salon en regardant le grand spectacle de la fête nationale à la télévision. Cette année, elle prendra part aux festivités pour célébrer le Québec pour sa culture et sa langue uniques.

Maryam Gholami a quitté son Iran natal pour s’installer au Québec le 24 novembre 2021 avec son mari.

Dès son arrivée, elle tenait à apprendre le français. Parce que pour elle, « être québécois, c’est parler le français ». Elle avait d’ailleurs suivi des cours de français à l’université en Iran, alors qu’elle avait 18 ou 19 ans. Faute de pouvoir s’exercer, elle a dû mettre la langue de côté. Elle est donc très reconnaissante de pouvoir la réapprendre. « Merci, le Québec ! », a-t-elle lancé en entrevue.

Pour Maryam Gholami, la fête nationale, c’est d’abord et avant tout un évènement culturel, la célébration d’une culture unique. Elle affectionne d’ailleurs particulièrement la chanson Gens du pays, de Gilles Vigneault, depuis qu’elle l’a entendue à la fin du spectacle diffusé l’année dernière.

Maryam Gholami souligne l’importance de respecter et de chérir toutes les langues et toutes les cultures. « Ensemble, nous sommes plus forts, nous formons un beau grand jardin constitué d’une multitude de fleurs de couleurs différentes. »

Mélissa Khadra, La Presse

Elena Leontyeva

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

Elena Leontyeva

Elena Leontyeva, une Russe installée à Montréal depuis deux ans et demi, est venue au Québec parce qu’elle croit que c’est un bon endroit pour assurer l’avenir de son fils de 6 ans. En se comparant à ses quelques amis québécois, elle dit ne pas encore se sentir québécoise, mais que ça s’en vient « pas à pas ».

Pour célébrer la fête nationale, elle compte enfiler des vêtements blanc et bleu et se diriger vers le parc Maisonneuve en agitant son drapeau fleurdelysé. « En plus de conserver mes traditions, je veux aussi donner quelque chose de nouveau à mon fils, parce qu’il faut faire partie de la culture québécoise », souligne-t-elle.

La fête nationale lui rappelle Ivan Kupala, une fête célébrée le 7 juillet dans son pays d’origine. Cet évènement annuel, qui était autrefois religieux, est maintenant à vocation culturelle, tout comme le 24 juin au Québec.

Elle est un peu perplexe quand vient le temps de différencier la fête nationale du Québec et la fête du Canada. « Pourquoi le 1er juillet, alors que la fête du Canada est célébrée dans le reste du pays, le Québec déménage ? », demande Elena. Sans le savoir, elle pose une question qui indique que son intégration est déjà bien entamée.

Patrick MacIntyre, La Presse

Juan Alejandro Home

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

Juan Alejandro Home

Bien qu’il ne soit arrivé au Québec qu’à l’automne dernier, Juan Alejandro Home soulignera la fête nationale. Le Colombien d’origine croit que les festivités du 24 juin sont une occasion de célébrer la « richesse » québécoise.

« Le Québec est très diversifié. Pour reconnaître la diversité de la culture québécoise, c’est important [la fête nationale] », souligne-t-il.

D’après lui, les Québécois de tous les horizons doivent travailler ensemble. « Il y a beaucoup de diversité, mais le Québec, c’est une seule société », rappelle-t-il, estimant que les personnes autochtones devraient davantage être considérées.

Alejandro a commencé à apprendre le français au Centre Pauline-Julien, dans l’arrondissement de Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce. Après neuf mois, sa maîtrise de la langue de Molière est impressionnante, ce qui le rend très fier. « Maintenant, je vais être capable de trouver un travail, en français. C’est important pour moi, pour m’intégrer. »

La musique québécoise lui permet d’en apprendre sur la province. Alejandro adore les chansons de Paul Piché et de Daniel Bélanger, qu’il écoute régulièrement.

Comment va-t-il célébrer la fête nationale ? « C’est difficile de choisir, parce qu’il y a beaucoup de choses qu’on peut faire ! »

Philémon La Frenière-Prémont, La Presse

Aimer le Québec… même de loin

PHOTO FOURNIE PAR DIANE LEDOUX POUR LE COURRIER DES AMÉRIQUES

La fête nationale en 2017 dans un restaurant de Coconut Creek, en Floride

Colombie-Britannique

PHOTO FOURNIE PAR JEAN-FRANÇOIS GARRITY

Depuis 12 ans, Jean-François Garrity passe la fête nationale en Colombie-Britannique, où il plante des arbres.

Depuis 12 ans, Jean-François Garrity passe la fête nationale dans les camps forestiers de Colombie-Britannique, où il plante des arbres cinq mois par année. Pour ce travailleur saisonnier, le 24 juin est « une immersion pour un soir » dans le Québec qu’il quitte chaque été.

« C’est difficile de vivre son identité québécoise dans l’Ouest, parce qu’il n’y a pas vraiment de culture francophone ici, explique Jean-François Garrity en entrevue. La Saint-Jean, c’est un moyen de se rappeler d’où on vient. »

Pour les planteurs québécois qui passent leurs étés en Colombie-Britannique, la fête nationale est d’abord une occasion de parler leur langue maternelle. « On prend un coup et on se parle en français, on fait exprès », décrit le planteur.

Selon l’étiquette, les planteurs se parlent tous en anglais pour n’exclure personne. « Parler français dans un camp rempli d’anglophones, ça crée des cliques, donc c’est un peu mal vu. Mais pour la Saint-Jean, on se gâte un petit peu », raconte Jean-François Garrity.

En général, le 24 juin se fête dans les règles de l’art au camp forestier. Jean-François Garrity donne l’exemple des célébrations de 2015, qu’il a soulignées avec une douzaine d’autres planteurs. « Il y avait des chansons québécoises, un feu, et quelqu’un avec une guitare qui jouait du Jean Leloup. C’était comme au Québec, dans le fond. »

Fannie Arcand, La Presse

Sénégal

PHOTO FOURNIE PAR PAPE GOUMALO DIONE

pape Goumalo Dione, habitué des fêtes nationales du Québec, au Sénégal

pape Gouamlo Dione est originaire du Sénégal. Il décrit le Québec comme sa deuxième nation. Normal, puisqu’il y a passé 20 ans, y a étudié à l’Université de Sherbrooke et s’y est marié. Depuis qu’il a été nommé attaché aux affaires éducatives et culturelles par la Délégation générale du Québec à Dakar, en 2020, il tient à mobiliser la communauté « québégalaise », pour l’initier à la culture et à la vie communautaire québécoises.

« Quand j’ai reçu mon poste d’attaché aux affaires culturelles et éducatives, la célébration de la Saint-Jean a été le deuxième évènement que j’ai organisé, raconte pape Goumalo Dione avec fierté. La diaspora est très importante, ici au Sénégal. Le Québec représente beaucoup pour moi. »

Mais voilà que cette année, ce sera différent. Des tensions sociopolitiques au Sénégal empêchent M. Dione de reprendre la grande célébration. Durant cette crise locale, il est obligé d’annuler l’évènement pour concentrer ses énergies ailleurs.

PHOTO FOURNIE PAR PAPE GOUMALO DIONE

Le 24 juin est un jour de célébration et de fête pour les Sénégalais qui rassemble beaucoup de citoyens.

Au cours des dernières années, pape Goumalo Dione a observé une réelle soif des Sénégalais pour la Belle Province durant la fête nationale. Malgré l’annulation de l’édition 2023, il garde espoir que l’évènement pourra revivre lors des prochaines années.

La fête nationale du Québec est célébrée depuis des années dans de nombreux pays de l’Afrique francophone.

Daniel Birru, La Presse

Hong Kong

PHOTO FOURNIE PAR SIMON BLANCHET

Des expatriés québécois réunis pour la fête nationale du Québec à Hong Kong

Simon Blanchet habite à Hong Kong depuis 13 ans. En quête de repères lors de son arrivée en Chine, il est entré en contact avec d’autres Québécois qui y résident. Aujourd’hui, il est le président de l’Association Québec Hong Kong, qui organise annuellement des évènements pour célébrer le 24 juin.

Les expatriés québécois se réunissent chaque année pour célébrer la fête nationale dans des lieux bien différents des plaines d’Abraham. Au menu : soupe aux pois, pâté chinois et musique traditionnelle québécoise.

PHOTO FOURNIE PAR SIMON BLANCHET

Le logo de l’Association Québec Hong Kong, inspiré du drapeau de Hong Kong avec la fleur du Bauhinia

Certaines personnes plus nanties, avec de spacieux logis, ont déjà accueilli des fêtes qui ont pris l’allure de rassemblements de type repas en commun et hot-dogs sur BBQ.

Mais le plus souvent, à Hong Kong, les appartements sont très petits, ce qui fait en sorte que les expatriés doivent trouver des salles où se réunir.

Simon Blanchet souligne qu’il y a une grande différence entre les modes de vie asiatique et occidental. « Ça fait du bien de pouvoir cultiver nos particularités en tant que nation québécoise, même ici à Hong Kong. »

« Personnellement, j’ai un petit garçon de 5 ans, qui est mixte, puisque ma femme est hongkongaise, raconte M. Blanchet. Physiquement, il n’y a pas de différence entre lui et la plupart des gens qui habitent ici. Par contre, il parle français et c’est important pour moi qu’il soit fier de ses origines québécoises. »

Naomie Duckett Zamor, La Presse

Floride

PHOTO FOURNIE PAR DIANE LEDOUX

Diane Ledoux

Diane Ledoux, Québécoise résidant à Fort Lauderdale depuis 2005, considère la Saint-Jean-Baptiste comme une occasion unique de célébrer ses origines. Presque 20 ans après son départ du Québec, son attachement pour la Belle Province demeure inchangé. « Nous restons toujours québécois, nous ne pouvons renier nos racines ! »

En entrevue, Diane Ledoux explique que c’est le climat floridien qui l’a poussée à s’établir de l’autre côté de la frontière. « Ce n’est pas parce que je n’aime pas le Québec que je vis en Floride, c’est pour profiter de la chaleur ! »

Chaque année, elle participe à des soupers organisés pour la Saint-Jean avec sa famille, des amis et d’autres francophones. « Il va y avoir des petits drapeaux, on va avoir des chansons à connotation québécoise juste pour se rappeler qu’on est québécois. »

Originaire de Sherbrooke, Diane Ledoux s’implique beaucoup dans la communauté francophone en Floride, dont le journal francophone Le Courrier des Amériques. Elle invite même les Français présents à Fort Lauderdale à célébrer avec les Québécois. Selon elle, la Saint-Jean ne devrait pas être exclusive aux Québécois ; elle y voit une occasion de faire découvrir le Québec aux autres.

D’ailleurs, cette année, les célébrations entourant la fête nationale se déroulent pour la première fois dans un restaurant français baptisé Chez Vincent Wine Bar.

Jérémy L’Allier, La Presse