Le NPD établit ses priorités en vue du budget pour assurer la survie des libéraux

(Ottawa ) Le NPD exhorte le gouvernement Trudeau à instaurer, dès le prochain budget, un impôt supplémentaire sur les grandes fortunes afin de financer les coûts importants liés à la lutte contre la pandémie et soutenir la relance de l’économie canadienne.

Alors que la ministre des Finances Chrystia Freeland mène depuis quelques semaines des consultations en prévision du dépôt d’un premier budget fédéral en deux ans, le Nouveau Parti démocratique (NPD) dresse une liste de ses priorités pour accorder son appui au gouvernement minoritaire libéral lors de l’éventuel vote de confiance qui doit avoir lieu sur le plan budgétaire à la Chambre des communes.

Depuis plusieurs mois, le NPD a été la formation politique vers laquelle les libéraux de Justin Trudeau se sont tournés afin d’obtenir les appuis nécessaires pour assurer la survie du gouvernement aux Communes.

Conscient du rapport de force qu’il détient, le NPD a fait part de ses exigences à la ministre Freeland dans une récente lettre de quatre pages. La Presse a obtenu une copie de cette lettre.

« Alors que des millions de personnes peinent à joindre les deux bouts et vivent de l’anxiété face à leur situation économique, une petite minorité d’individus, les plus aisés de notre société, continue de profiter de la pandémie pour s’enrichir davantage. J’espère que vous serez d’accord avec moi pour dire que cette situation doit cesser », affirme le critique du NPD en matière de finances, le député Peter Julian, dans sa lettre à Mme Freeland.

Il est temps de mettre en place, comme certains pays l’ont déjà fait, un impôt sur les grandes fortunes.

Le député néo-démocrate Peter Julian

« On peut également mettre en œuvre immédiatement un impôt supplémentaire, comme lors de la Seconde Guerre mondiale, sur les profits excessifs réalisés pendant la crise par les grandes multinationales, et qui continuent aujourd’hui d’engendrer des bénéfices faramineux », ajoute M. Julian dans sa missive

Le NPD revient ainsi à la charge avec cette idée d’imposer les plus riches. En novembre dernier, les troupes de Jagmeet Singh avaient profité de leur journée de l’opposition aux Communes afin de présenter une motion pressant le gouvernement libéral d’instaurer une nouvelle taxe de 1 % sur les fortunes évaluées à 20 millions de dollars et plus ainsi que d’adopter d’une taxe sur les bénéfices des grandes sociétés qui ont engrangé des profits « exorbitants » durant la crise de la COVID-19.

Le NPD calculait alors qu’une telle taxe rapporterait environ 70 milliards de dollars dans les coffres de l’État au cours des 10 prochaines années. Pour sa part, le bureau du directeur parlementaire du budget Yves Giroux avait estimé que cette mesure pourrait générer 5,6 milliards de dollars au cours de l’exercice financier 2020-2021 et atteindrait près de 9,5 milliards en 2028-2029.

Une idée déjà rejetée

Toutefois, cette motion a été rejetée par les députés libéraux, ainsi que par ceux du Parti conservateur et du Bloc québécois. Dans une entrevue accordée à Paul Arcand sur les ondes du 98,5 FM l’automne dernier, le premier ministre Justin Trudeau a écarté l’idée d’augmenter les taxes ou les impôts pour réduire le déficit, qui pourrait friser les 400 milliards de dollars durant l’exercice financier 2020-2021.

Dans sa lettre, Peter Julian invite aussi la ministre des Finances à prendre les mesures qui s’imposent pour mettre fin à l’utilisation « frauduleuse » des paradis fiscaux et à exiger des géants du web qu’ils paient leur « juste part ».

« C’est en ayant le courage d’exiger des riches entreprises et familles de payer leur juste part d’impôt que votre gouvernement va générer les revenus nécessaires pour financer l’aide et les services sur lesquels comptent les gens qui ont souffert et qui souffrent encore des conséquences sanitaires et économiques de la pandémie », soutient M. Julian.

Dans sa missive, le NPD propose aussi :

· des changements à l’assurance-emploi pour que les travailleurs autonomes comme les artistes, les musiciens, les travailleurs contractuels ou ceux de l’industrie du spectacle y aient accès ;

· la création d’une société d’État ayant comme mandat de gérer la production locale de vaccins afin de répondre à la demande nationale ;

· des investissements pour jeter les bases d’un régime national d’assurance médicaments ;

· des investissements pour la création d’un système national de garderies ;

· un plan de relance économique visant à accélérer la transition vers les énergies propres et la lutte contre les changements climatiques.

« Ce premier budget que vous annoncerez en tant que ministre des Finances est l’occasion idéale de faire preuve d’audace », conclut M. Julian dans sa lettre.

La date du prochain budget n’a pas encore été annoncée. Au plus tôt, il pourrait être déposé dans la semaine du 22 mars ou dans celle qui suit le congé pascal, soit la semaine du 12 avril. Le budget pourrait être le fer de lance de la prochaine campagne électorale si le gouvernement Trudeau ne peut le faire adopter aux Communes.