Les femmes de la génération X ont aujourd'hui 40 ans. Plusieurs vivent une crise de la quarantaine toute particulière. Un roman québécois à la Eat, Pray, Love en témoigne.

Sophie a 39 ans. Deux enfants. Un mari. Une mère culpabilisante. Une maison en banlieue. Un boulot en ville. Bref, une vie ni banale ni franchement originale. Or, voilà qu'à l'aube de ses 40 ans, elle craque.

Une nuit, incapable de supporter ses deux ados qui ne la respectent pas (plus), son mari qui ne la voit pas (plus), sa vie qu'elle passe à donner sans jamais rien recevoir en retour, sans parler des interminables bouchons sur les ponts, elle ose le tout pour le tout. Sur la pointe des pieds, elle quitte sa chambre, ramasse une valise et fonce. Direction: l'aéroport, pour attraper un vol pour Cancún. Officiellement, elle pense partir deux semaines. Mais elle ne reviendra jamais tout à fait.

Fiction ou réalité? Dur à dire. Vrai, c'est d'abord le point de départ du plus récent roman de Mylène Gilbert-Dumas, L'escapade sans retour de Sophie Parent, publié chez VLB, un roman contemporain dont la trame de fond n'est pas sans rappeler le très médiatisé Eat Pray Love de l'Américaine Elizabeth Gilbert. Mais au-delà de la fiction, il risque aussi de trouver plusieurs échos dans la vie de tous les jours de bien des quadragénaires.

Non, ça n'est pas un fait vécu (ni refoulé!), mais disons que l'auteure était tout de même plutôt inspirée par le sujet! «Bon, j'ai 43 ans, répond-elle en riant au bout du fil. Et effectivement, j'ai trouvé que ma génération, les femmes de la génération X, était très prise en sandwich entre les parents vieillissants et les adolescents, qu'on a eus sur le tard. En plus, on travaille à temps plein, on a des chums, des maisons, etc. Combien de fois me suis-je dit: bon, je prendrais bien un break de deux semaines de ma vie...»

Il faut dire que la quarantaine n'est pas une décennie comme les autres. C'est souvent l'heure des bilans, puis des interrogations. «On regarde sa vie. La moitié est passée. On s'interroge. Est-ce que je veux continuer comme ça pour le reste de ma vie?»

Pour les femmes de la génération de Mylène Gilbert-Dumas, ces interrogations peuvent être particulièrement douloureuses: «Pourquoi est-ce qu'on est à bout comme ça à 40 ans? Je ne sais pas si c'était pareil pour les générations précédentes. Nous sommes une génération de femmes perfectionnistes. En même temps, on a voulu réussir nos carrières, notre vie de famille, être bonnes partout, et parfois, on éclate...» dit-elle, partageant la montée de lait d'Anne Dorval, il y a quelques années sur le plateau des Francs-tireurs. Elle n'en pouvait plus, elle non plus, de sa vie de «superwoman».

Comment les femmes en arrivent-elles là? «Je ne sais pas. C'est peut-être une question d'éducation. Déjà, petites filles, on veut plaire, que les gens nous trouvent bonnes. Plus tard, même si on se dit féministes, même si on célèbre la journée de la femme, quand on se retrouve en couple, on veut que notre maison soit propre, on fait le lavage, l'épicerie et le ménage, pour que la belle-mère nous trouve impeccables!»

Or, arrive la quarantaine, et la vision change, poursuit-elle. «On a davantage confiance en soi. Et on perd cette illusion que tout peut être parfait...» C'est là que certaines osent enfin ce que bien d'autres refoulent.

Mais attention. Car là ne s'arrêtent pas les aventures (et Dieu sait si Sophie Parent en vivra dans le roman). Car qui part doit aussi revenir. Mais comment? «Partir? Toutes les femmes y pensent. Moi, je voulais voir comment une mère qui prenait une pause, décidait de défaire sa vie, arrivait à la reconstruire après. Parce que défaire, c'est facile, mais c'est pas mal plus difficile de reconstruire après...»

Reconstruire, comme l'héroïne, en osant s'affirmer, parler pour soi, et choisir sa voix. Inspirant...

L'escapade sans retour de Sophie Parent, de Mylène Gilbert-Dumas, éd. VLB, 345 p., 29,95$