Le légendaire boxeur Muhammad Ali a effectué son dernier voyage à travers sa ville natale, vendredi, alors que des milliers de personnes en deuil bordaient les rues où le futur champion du monde des poids lourds a jadis pourchassé, chaussé de bottes de randonnée, des autobus scolaires en guise d'entraînement pour ses combats.

«Il était un énorme coup de foudre, créé par Dame Nature avec de l'air fin, une combinaison fantastique de puissance et de beauté», a dit le comédien Billy Crystal dans son hommage, qui a beaucoup fait rire la foule.

Son cercueil rouge-cerise, drapé d'un linceul islamique, a été placé dans un corbillard par un groupe de porteurs incluant notamment les anciens boxeurs Mike Tyson et Lennox Lewis et l'acteur Will Smith. Les neuf enfants d'Ali, sa femme, deux de ses ex-épouses et d'autres membres de la famille ont rejoint le cortège.

Le cortège de 17 voitures s'est ensuite mis en route pour un cimetière de Louisville sur un parcours de 28,5 km et il est passé devant la maison d'enfance d'Ali, le gymnase où il a appris la boxe et le musée qui porte son nom, sur le boulevard Muhammad Ali.

Il a été enterré autour de midi - sa pierre tombale portant simplement l'inscription «Ali» - lors d'une cérémonie privée, suivie en après-midi par un service commémoratif grandiose en présence de plus de 15 000 personnes, dont l'ancien président Bill Clinton.

«Je peux entendre Muhammad dire à l'instant: »Il fallait bien que je sois honoré par au moins un président»», a lancé M. Clinton.

Ali, l'athlète le plus charismatique et controversé du 20e siècle, est mort vendredi dernier à 74 ans après une longue bataille contre la maladie de Parkinson. Un service traditionnel funéraire musulman a eu lieu, jeudi, en présence d'environ 6000 admirateurs venus de partout dans le monde.

La veuve d'Ali, Lonnie, à sa première apparition publique depuis la mort de son mari, a pris la parole coiffée d'un chapeau qui couvrait ses yeux.

«Muhammad a indiqué que lorsque la fin viendrait, il voulait utiliser sa vie et sa mort comme un enseignement. Il voulait rappeler aux gens qui souffrent qu'il avait vu le visage de l'injustice, a-t-elle relaté. Il n'est jamais devenu amer au point d'abandonner ou d'utiliser la violence.»

Le président Barack Obama n'a pu faire le voyage en raison de la graduation scolaire de sa fille Malia. Valerie Jarret, une conseillère à la Maison-Blanche, a lu une lettre écrite par M. Obama lors de la cérémonie qui disait à quel point Ali lui avait transmis l'audace de penser qu'il serait pourrait un jour devenir président.

«Muhammad Ali était l'Amérique. Impétueux. Provoquant. Novateur. Jamais épuisé. Toujours prêt à défier les pronostics. Il incarnait nos libertés de base: la religion, la liberté d'expression et d'esprit», a écrit le président.

Alors que les limousines se dirigeaient vers le cimetière, des amateurs ont applaudi comme lors de ses combats, debouts sur des voitures, tenant leur cellulaire et des affiches, courant parfois même près du cortège pour toucher aux voitures. Ils ont lancé plusieurs fleurs sur le pare-brise de la limousine, à un point tel que le chauffeur a dû tasser quelques bouquets pour voir la route.

D'autres ont regardé le triste spectacle silencieusement alors que le champion effectuait un dernier tour de piste.

Vendredi matin, des centaines de personnes ont envahi les rues en face du salon funéraire.

Ali a choisi le cimetière, qui figure sur le registre national des lieux historiques, comme son dernier lieu de repos il y a une décennie. Ses 130 000 tombes rassemblent le gratin du Kentucky, incluant le fondateur de la chaîne Kentucky Fried Chicken, le colonel Harland Sanders.

Le porte-parole de la famille, Bob Gunnell, a précisé que la simple pierre tombale au cimetière Cave Hill est conforme à la tradition islamique.

Louisville est habituée à se retrouver au coeur de l'action à chaque mois de mai durant le Derby du Kentucky. Mais le décès du triple champion des poids lourds et d'un ambassadeur international représente certainement l'un des évènements les plus historiques pour cette ville.

«Nous redoutions tous la mort du champion, mais en même temps, nous savions que ça allait ultimement venir, a fait valoir le maire Greg Fischer. C'était égoïste de penser qu'il pourrait vivre pour toujours. Notre travail maintenant, en tant que ville, est de le porter à son dernier repos avec la classe, la dignité et le respect qu'il mérite.»

Ali avait lui-même décidé il y a quelques années que, à sa mort, les funérailles seraient accessiblse aux amateurs ordinaires, pas seulement aux personnages importants. En conséquence, des milliers de billets gratuits ont été mis à la disposition et se sont envolés en moins d'une heure.